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Le collège de déontologie du Conseil d’Etat s’est prononcé sur trois demandes d’avis portant sur le statut d’autoentrepreneur (Avis n° 2012/8 et n° 2012/5 et 2012/6 du 22 octobre 2012).

Les avis rendus portent certes sur des demandes concernant des magistrats administratifs mais ont à l’évidence vocation à s’étendre à l’ensemble des agents publics.

En effet, depuis la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique, précisée par  son décret d’application n°2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d’activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l’Etat  éclairé par une circulaire du 11 mars 2008 relative au cumul d’activités, il est possible de cumuler une activité privée avec un emploi public.

Le collège de déontologie rappelle tout d’abord que le statut d’auto-entrepreneur créé par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 et les principes, règles et bonnes pratiques applicables en matière de déontologie "constituent deux corps de règles ayant vocation à s’appliquer indépendamment l’un de l’autre".

Autrement dit, ce n’est pas la statut ou la forme d’exercice de l’activité privée qui compte, mais les conditions dans lesquelles cette activité est menée.

Dans ces conditions, l’adoption de ce statut n’est en lui-même soumis ni à déclaration ni à autorisation ; il n’appelle pas davantage la saisine de la commission de déontologie.

Cependant :

–  les activités accessoires doivent être compatibles avec les fonctions de l’agent public et ne pas affecter l’ exercice de celles-ci ;
– elles sont subordonnées à une autorisation préalable ;
– le statut d’auto entrepreneur n’exonère pas l’agent public de l’obligation d’assurer l’intégralité des tâches inhérentes à ses fonctions ; il lui incombe de porter périodiquement à la connaissance de son supérieur hiérachique tous éléments d’information sur la consistance de l’activité exercée sous le statut d’auto-entrepreneur de façon à permettre la vérification en commun du respect de cette obligation.
– l’intéressé doit s’abstenir d’intervenir dans des affaires dont il aurait eu à connaître dans l’exercice de ses activités  antérieures ;
– l’agent public doit veiller à ce que les termes « auto-entrepreneur » ne soient pas à l’origine de confusions sur la nature des activités exercées à ce titre et sur leur compatibilité avec ses fonctions. Il doit aussi ne pas perdre de vue que toute nouvelle activité accessoire qu’il envisagerait d’exercer dans le cadre de ce régime devrait satisfaire aux règles et conditions découlant de la loi du 13 juillet 1983 et du décret du 2 mai 2007.

On rappellera que la Commission de déontologie de la fonction publique s’est également prononcée à plusieurs reprises sur cette même question.

Parmi les enseignements que l’on peut tirer de ses avis, on peut notamment relever que :

– le cumul d’activités ne doit pas porter atteinte à la dignité des fonctions administratives exercées par l’agent. Ainsi un sapeur-pompier professionnel ne saurait envisager la création d’une auto-entreprise d’échange à caractère sexuel sur Internet (avis n° T-2009-274 du 14 mai 2009).
– l’intéressé doit s’abstenir de toute relation d’affaires, dans le cadre de son activité professionnelle privée, avec les personnes ou entreprises qu’il a eues, a, ou aura à connaître dans le cadre de son activité publique, doit éviter toute concurrence avec les missions de son employeur public, doit respecter la réglementation qui lui est appliquée concernant les plages de repos obligatoires, ne saurait se prévaloir, dans ses relations professionnelles exercées au titre du cumul, de sa qualité d’agent public (avis n° T 2009-372 du 11 juin 2009, à propos d’un sapeur-pompier) ;
– les interventions d’un agent des douanes, en tant qu’entrepreneur les interventions d’un agent des douanes, en tant qu’entrepreneur privé, dans les relations entre le service auquel il appartient et les entreprises qui sollicitent les services douaniers est susceptible de compromettre le fonctionnement
normal, l’indépendance et la neutralité du service, dès lors que l’intéressé pourrait notamment contrôler des marchandises appartenant à des clients qu’il aurait conseillés dans ses activités privées (avis n° 10.A0194 du 17 mars 2010).
– Est également incompatible l’activité, sous le statut d’auto-entrepreneur, de conseil aux particuliers en gestion de patrimoine avec les fonctions qu’exerce
l’intéressée, agent administratif principal du Trésor, qui est affectée à la trésorerie générale de l’Isère au sein de l’équipe de renfort des postes comptables. En effet, ses fonctions administratives lui permettent d’avoir accès à des données sensibles et nominatives en matière de fiscalité des entreprises et des particuliers, de recouvrement des impôts et amendes, de telle sorte que ce cumul est de nature à porter atteinte au bon fonctionnement, à l’indépendance ou à la neutralité du service (avis n° 10.A1235 du 17 novembre 2010).

Il convient de rappeler également que le décret n° 2011-82 du 20 janvier 2011 qui a modifié le décret n° 2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d’activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l’Etat, a introduit une distinction entre les activités accessoires pouvant être exercées uniquement sous le régime de l’auto-entrepreneur (services à la personne, vente de biens fabriqués personnellement par l’agent) et celles pour lesquelles l’agent aura le choix entre ce régime et tout autre régime d’activité.