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La volonté de « faciliter au quotidien le parcours de santé des français » est un des fils rouges de l’actuel projet de loi Santé, en particulier avec la création du service territorial de santé au public (STSP) qui vise à « organiser l’accès aux soins de proximité et les parcours de santé, notamment pour les patients atteints d’une maladie chronique, les personnes en situation de vulnérabilité ou de précarité sociale et les personnes en situation ou présentant un risque de perte d’autonomie du fait de l’âge ou du handicap » (cf. notre précédent article dans ces mêmes colonnes).

Le ton est donné… décloisonnement des secteurs sanitaire et médico-social !!!

L’objectif est d’assurer une meilleure coordination des acteurs de santé pour la prise en charge des personnes sur le plan sanitaire, médico-social ou social et ainsi garantir un parcours de santé efficient et coordonné.

C’est dans cette optique que s’inscrit l’article 50 du projet de loi qui vise à améliorer le droit des groupements et donne au gouvernement la possibilité de prendre par ordonnance plusieurs mesures visant à le simplifier et l’harmoniser.

Parmi les objectifs d’amélioration figure l’adaptation des conditions de création, d’organisation et de fonctionnement des structures de coopération.

Selon le gouvernement, cet objectif devrait permettre de « mieux articuler les groupements de coopération sanitaire (GCS) et les groupements de coopération sociaux et médico-sociaux (GCSMS) et assurer ainsi un décloisonnement effectif entre le secteur sanitaire et le secteur médico-social » (exposé des motifs du projet de loi).

 Actuellement, les GCS et GCSMS font en effet l’objet de deux législations distinctes malgré l’intégration du secteur médico-social dans le champ de compétences des ARS et malgré l’ordonnance n° 2010-177 du 23 février 2010 qui a largement aligné le régime juridique des GCSMS sur celui des groupements de coopération sanitaire, en renvoyant aux dispositions du code de la santé publique, sous réserve toutefois de l’application des dispositions spécifiques du code de l’action sociale et des familles (CASF, art. L. 312-7).

 Ainsi, alors que leur parenté génétique est incontestable, des différences persistent cependant entre les deux régimes essentiellement dans quatre domaines :

La composition du groupement :

  • Pour le GCS : Peuvent être membres les établissements de santé (au moins un obligatoirement), les établissements médico-sociaux (visés à l’article L. 312-1 du CASF), les centres de santé et pôle de santé,  les professionnels médicaux libéraux.
  • Pour le GCSMS : Peuvent être membres les établissements et services sociaux et médico-sociaux, les établissements de santé, les personnes physiques ou morales gestionnaires de droit public ou de droit privé, les professionnels des secteurs sanitaire, social et médico-social. 

L’objet du groupement :

  • Pour le GCS :
      • L’organisation et la gestion des activités administratives, logistiques, techniques, médico-techniques, d’enseignement ou de recherche .
      • La réalisation ou la gestion des équipements d’intérêt commun ;
      • Permettre les interventions communes de professionnels des secteurs sociaux, médico-sociaux et sanitaires, de professionnels salariés du groupement ainsi que de professionnels associés par convention ;
      • Etre gestionnaire d’un réseau de santé ;
      • La gestion d’autorisations.
  • Pour le GCSMS :
      • Permettre les interventions communes des professionnels des secteurs sociaux, médico-sociaux et sanitaires, des professionnels salariés ou associés du groupement ;
      • Etre autorisé ou agréé au titre des services à la personne, à la demande de ses membres, à exercer directement les missions et prestations des établissements et à assurer directement, à la demande de l’un ou plusieurs de ses membres, l’exploitation de l’autorisation ou de l’agrément (après accord de l’autorité l’ayant délivrée) ;
      • Etre chargé de procéder aux fusions et regroupements d’établissements ;
      • Créer des réseaux sociaux ou médico-sociaux et adhérer à ces mêmes réseaux ou aux réseaux et groupements de coopération ou d’intérêt public prévus par le code de la santé publique ;
      • Etre chargé pour le compte de ses membres des activités de pharmacie à usage interne ;
      • Exercer des activités dans les domaines de l’action sociale ou médico-sociale ;
      • Créer et gérer des équipements ou des services d’intérêt commun ou des systèmes d’information nécessaire à leurs activités ;
      • Faciliter et encourager les actions concourant à l’amélioration de l’évaluation de l’activité de leurs membres ;
      • Définir ou proposer des actions de formation.

La responsabilité des membres aux dettes du groupement :

  • Pour le GCS : Les règles de responsabilité aux dettes sont librement définies par les membres dans la convention constitutive du groupement. Tout est envisageable : à proportion de leurs droits sociaux, à proportion de leurs participations aux charges du groupement, globalement ou par activité, sur la base d’un pourcentage préfixé, autre.Les membres du groupement ne sont pas solidaires entre eux.
  • Pour le GCSMS : les membres sont tenus des dettes à proportion de leurs droits dans le groupement. Ils sont  donc totalement tributaires des règles de détermination des droits sociaux adoptées dans le groupement, le CASF ne retenant que les apports ou les participations aux charges.

L’approbation de la convention constitutive du groupement :

  • Pour le GCS : La convention constitutive est incontestablement approuvée par le Directeur Général de l’Agence Régionale de Santé (ARS) du siège du groupement ;
  • Pour le GCSMS : Si l’on se réfère à l’article R. 312-194-18 du CASF qui n’a toujours pas été modifié, la convention constitutive doit être transmise pour approbation …au préfet de département du siège du groupement. Qui, très souvent, ne sait qu’en faire.

Rien ne permet de justifier sur le seul plan juridique de telles différences, au demeurant marginales,  qui ne font que refléter les clivages traditionnels entre le monde sanitaire et le monde médico-social.

 Ainsi, on ne peut que se féliciter du projet d’harmonisation de ces dispositions qui, en facilitant la mise en œuvre des coopérations inter-secteurs, devrait contribuer à mettre fin aux incohérences dans les parcours de santé.

 Cependant, ne faudrait-il pas profiter de cette dynamique pour envisager enfin une harmonisation complète des dispositions relatives aux groupements en créant un seul outil juridique, véritable couteau suisse des coopérations dans les trois secteurs ?

 La distinction GCS – GCSMS n’existerait plus … vive le groupement de coopération sanitaire social et médico-social (GCS SMS – Tout autre acronyme serait le bienvenu !) !

 Cela permettrait d’ouvrir le champ des coopérations possibles (le groupement étant à objets multiples et à la carte) et éviterait aux personnes physiques et morales concernées de participer à de multiples structures de coopération, ici un GCS, là un GCSMS, là encore un GIP, ce qui commence à susciter des attitudes de rejet.

 Et soyons fous ! Pourquoi ne pas aller plus loin ? Dans l’esprit du projet de loi qui prône un parcours de santé totalement transversal, interprofessionnel et permanent tout au long de la vie … pourquoi ne pas intégrer dans le Code de la santé publique l’ensemble des dispositions du Code de l’action sociale et des Familles relatives à la planification médico-sociale, à la gestion et au financement des établissements médico-sociaux ?

 Non seulement on y gagnerait en cohérence, en simplification et en lisibilité du corpus juridique, mais il y aurait indiscutablement là un signal fort de la volonté réelle de mettre fin à la séparation inepte, onéreuse et contreproductive qui pénalise depuis plusieurs décennies la prise en charge de nos concitoyens.