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La rupture d’approvisionnement est actuellement définie « comme l’incapacité pour une pharmacie d’officine ou une pharmacie à usage intérieur définie à l’article L. 5126-1 de dispenser un médicament à un patient dans un délai de 72 heures. Ce délai peut être réduit à l’initiative du pharmacien en fonction de la compatibilité avec la poursuite optimale du traitement du patient »[i].

 

Pour lutter contre les ruptures d’approvisionnement, le législateur (loi n°2011-2012 du 29 décembre 2011) et le pouvoir règlementaire (décret n°2012-1096 du 28 septembre 2012) ont distingué les obligations de chaque acteur du circuit du médicament, et imaginé un mécanisme de diffusion rapide de l’information par le recours à un centre d’appel.

 

L’avant-projet de loi annonce quelques modifications au schéma actuel de lutte contre les ruptures de médicaments, en recentrant les exploitants de médicaments sur leurs responsabilités. Les réelles modifications interviendront par voie règlementaire.

 

1er constat : Le législateur met en place, parallèlement au système actuel de lutte contre les ruptures de médicaments, un système de lutte spécifique à la rupture de « médicaments d’intérêt thérapeutique majeur ». Il s’agit d’une nouvelle catégorie de médicament qui se caractérise par la nécessité d’être pris par le patient en continu, à défaut de quoi toute interruption peut mettre en jeu son pronostic vital ou lui faire perdre une chance de guérison[ii].

 

Il reviendra à l’ANSM de définir la liste de ces médicaments[iii].

 

2nd constat : Le législateur entend replacer les entreprises pharmaceutiques exploitant de médicaments au cœur de leur responsabilité. L’une de leurs obligations est de garantir l’approvisionnement approprié et continu des grossistes-répartiteurs, des pharmacies et des personnes autorisées à délivrer des médicaments, de manière à couvrir les besoins des patients en France[iv]. Cette obligation est réaffirmée et devient une obligation législative et non plus règlementaire.

 

Pour y satisfaire, l’avant-projet de loi entend les soumettre à de nouvelles obligations, et notamment à celle de mettre en place des plans de gestion des pénuries, permettant de prévenir et gérer les ruptures et apporter toutes informations aux pharmaciens d’officine, de PUI, et aux pharmaciens responsables ou délégués des grossistes répartiteurs[v].

 

L’anticipation devient la règle, très certainement pour mettre en œuvre très rapidement les solutions qui s’imposent. Dans le système actuel, l’entreprise pharmaceutique exploitant de médicaments faisant face à une rupture ou un risque de rupture en informe immédiatement l’ANSM pour décider ensemble des solutions à mettre en place.

 

Dans le mécanisme proposé, l’exploitant propose et l’ANSM lui donne son accord pour la mise en œuvre effective du dispositif. Il ne reviendrait plus à l’ANSM d’informer les pharmaciens d’officine et de PUI, mais de se recentrer sur un rôle de contrôle et supervision.

 

L’avant-projet renforce ainsi la responsabilité des exploitants puisque tout manquement à ses obligations (information des pharmaciens et grossistes, non établissement d’un plan de gestion des pénuries, non mise en place de mesures alternatives) seront susceptibles d’une sanction financière[vi].

 

Les grossistes-répartiteurs ne sont pas en reste puisque leur participation à la prévention et à la gestion des ruptures de médicaments devient une obligation de service public, en plus de celles prévues à l’article R.5124-59 CSP (astreinte, livraison dans les 24H…). En d’autres termes, le grossiste-répartiteur ne devrait plus être soumis à une simple possibilité d’information sur les risques de rupture ou sur une rupture effective (article R.5124-59-1 CSP), mais à une obligation d’information.

 

Un bon schéma valant plus qu’un grand discours, comparons « l’avant/après ».

 


[i] Article R.5124-49-1 CSP

[ii] Futur article L.5111-4 CSP

[iii] Futur article L.5121-29 CSP. On constatera à ce titre la rédaction alambiquée de cet article qui ne prévoit une liste qu’en cas de rupture mise en évidence… Ce principe est difficilement compréhensible compte tenu de la nécessité d’avoir une réactivité immédiate pour améliorer l’approvisionnement. De notre compréhension, il s’agit pour l’ANSM d’établir une liste des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur pour lesquels la lutte contre la rupture d’approvisionnement doit être renforcée.

[iv] Article R.5124-48-1 CSP

[v] Futur article L.5121-30 CSP

[vi] Futur article L.5423-8 CSP