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La Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF) vient de mettre en ligne un arrêt du 9 décembre 2011 (n°180-656, "Groupe hospitalier Sud Réunion (GHSR)) par lequel elle condamne un chef d’établissement et un directeur des ressources humaines à 10 000 € d’amende chacun pour avoir effectué des recrutements d'agents au-delà des effectifs autorisés par les crédits budgétaires. Ces deux cadres disposaient de circonstances aggravantes :

– le chef d’établissement, malgré l’intérim, du fait de son ancienneté dans les cadres, de sa parfaite connaissance de l'établissement et de la délégation de signature et de gestion étendue qui lui était accordée, disposait des moyens d'assurer une surveillance efficace de la gestion du GHSR ;
– le directeur des ressources humaines, malgré la position subordonnée de son poste et le caractère circonscrit de ses missions, disposait d'une large délégation, d'une part pour la gestion des crédits budgétaires affectés aux ressources humaines, d'autre part pour la gestion des recrutements des personnels titulaires et non titulaires.

La CDBF, saisie par le ministre de la santé à la suite d’un rapport de l’IGAS, relève en effet :

– que les charges nettes de personnel (titre I) sont passées de 148,9 M€ en 2005 à 157,9 M€ en 2006 et168,2 M€ en 2007,
– que cette augmentation de près de 20 M€ en trois ans représente les deux tiers de l'augmentation des dépenses sur la même période,
– qu'une grande partie des déficits des comptes 2007 et 2008 du GHSR est la conséquence directe et certaine du recrutement d'agents en méconnaissance de la régularité budgétaire et des règles de gestion des ressources humaines ;
– que la direction des ressources humaines a créé des emplois alors qu'elle ne pouvait méconnaître l'absence de crédits pérennes pour les financer, en détournant de leur objet des crédits dédiés accordés par l'ARH et en pratiquant des recrutements massifs de personnels contractuels sur des emplois permanents, ce qui permettait de ne pas faire apparaître une augmentation trop forte de l'effectif de personnels titulaires et stagiaires ;
– que divers recrutements massifs effectués en surnombre notamment le 22 août 2006 (43 agents) et le 15 mars 2007 (21 agents) ne correspondaient ni à des postes non pourvus ni à des prévisions de départs à anticiper.

Elle considère que :
-la création d'emplois permanents sans crédits disponibles constitue un engagement de dépenses en dépassement de crédits, donc une infraction aux
règles relatives à l’exécution des dépenses au sens de l'article L. 313-4 du code des juridictions financières ;
– l'abandon du suivi budgétaire, "qui a masqué la dégradation de la situation financière du GHSR et conduit à un grave déficit budgétaire en 2007 et 2008, témoigne d'un défaut général de surveillance et d'une méconnaissance des obligations de bonne gestion auxquels est astreint tout responsable d'un organisme soumis au contrôle des juridictions financières ; qu'il constitue de ce fait une infraction aux règles relatives à l'exécution des dépenses de l'établissement prévue par l'article L. 313-4 précité du code des juridictions financières."

De manière très pédagogique, elle rappelle, à tous ceux qui souhaiteraient se défausser courageusement sur leurs sous-fifres :

– qu'il appartient à l'ordonnateur d'un établissement public de prendre des mesures adéquates de contrôle des dépenses, de pallier l'absence d'instruments de suivi des effectifs rémunérés pour que ceux-ci correspondent aux crédits disponibles et aux besoins en personnel de l'établissement ;
– que l'autorité qui accorde à un subordonné une délégation de signature n'est pas dessaisie de ses compétences ; que dès lors, la délégation de signature à M. Y… n'exonère pas M. X…, autorité délégante, de sa responsabilité ;
– que le défaut d'information reproché à un subordonné n'est pas de nature à exonérer la responsabilité du directeur de l'établissement auquel il appartient d'exiger de ses subordonnés la transmission des données relevant de leur compétence.