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Dans un arrêt du 23 mai 2018[1], le Conseil d’Etat a jugé de l’imputabilité à l’Etat d’une faute commise par un organisme social, ici Pôle emploi, et sur la simplification du contentieux administratif.

Dans le contexte d’une demande de condamnation de Pôle emploi au versement d’une indemnité en réparation des préjudices subis du fait des fautes que cet organisme aurait commises dans la gestion d’un dossier d’allocation de solidarité spécifique, le juge administratif considère que Pôle emploi agit au nom et pour le compte de l’Etat et qu’ainsi les fautes qu’il pourrait commettre à cette occasion, sauf à être détachables, sont de nature à engager non pas sa responsabilité mais celle de l’Etat.

L’imputabilité à l’Etat d’une faute commise par un organisme social n’est pas sans rappeler la position adoptée par le juge administratif à l’occasion de la jurisprudence dite Popin[2] faisant valoir que la justice étant rendue de manière indivisible au nom de l’Etat, ce dernier est responsable de l’exercice de la fonction juridictionnelle par les juridictions administratives et peut répondre des dommages pouvant résulter de cet exercice.

De plus, en l’espèce les juges du Palais Royal ajoutent « qu’il appartient au juge administratif, saisi d’une action indemnitaire après le rejet d’une telle réclamation préalable, de regarder les conclusions du requérant tendant à l’obtention de dommages et intérêts en réparation de fautes commises par les services de l’organisme chargé du service des prestations au nom et pour le compte de l’Etat comme également dirigées contre ce dernier et de communiquer la requête tant à cet organisme qu’à l’autorité compétente au sein de l’Etat » appliquant ainsi les dispositions de l’article L.114-2 du Code des relations entre le public et l’administration disposant que « lorsqu’une demande est adressée à une autorité administrative incompétente, cette dernière la transmet à l’autorité administrative compétente et en avise l’intéressé ».

Commet alors une erreur de droit la juridiction qui rejette des conclusions visant à obtenir l’indemnisation des préjudices subis du fait de fautes commises par les services de Pôle emploi dans la gestion, au nom et pour le compte de l’Etat, de son dossier d’allocation de solidarité spécifique, au motif qu’elles avaient été dirigées contre Pôle emploi.

Le recours à l’encontre de cette institution, tendant à l’indemnisation d’un préjudice, est ainsi recevable, le Conseil d’Etat jugeant que « lorsqu’un organisme de droit public ou un organisme de droit privé chargé d’une mission de service public est chargé du service de prestations au nom et pour le compte de l’Etat, une réclamation préalable adressée à cet organisme en vue d’obtenir la réparation des préjudices nés de fautes commises dans le service d’une telle prestation doit, en principe, être regardée comme adressée à la fois à cet organisme et à l’Etat, lequel, en l’absence de décision expresse de sa part, est réputé l’avoir implicitement rejetée à l’expiration du délai de deux mois suivant la date de réception de la demande par l’organisme saisi, alors même que ce dernier l’aurait également rejetée au titre de sa responsabilité propre ».

La gestion de dossiers d’allocations de solidarité spécifiques est donc une activité exercée au nom et pour le compte de l’Etat par Pôle emploi, sa nature justifiant que la responsabilité de l’Etat puisse alors être engagée.

Le Conseil d’Etat précise ainsi les conséquences de la reconnaissance d’une faute administrative conduisant à l’engagement de la responsabilité de l’Etat du fait des organismes publics mais surtout met en exergue la simplification du contentieux administratif faisant valoir qu’un recours adressé contre cet organisme est alors réputé dirigé également contre l’Etat. Le recours administratif préalable et le recours contentieux sont donc réputés adressés indifféremment aux deux entités.

De la sorte, une telle simplification du contentieux administratif pourrait alors s’appliquer à tous les organismes exerçant une activité au nom et pour le compte de l’Etat, tendant en conséquence vers une réelle simplification de l’engagement de la responsabilité de l’Etat du fait d’un tiers agissant en son nom et pour son compte.

[1] CE, 23 mai 2018, n°405448

[2] CE Sect., 27 février 2004 Mme Popin c/ Université de Strasbourg, n°217257