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La Ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes l’avait annoncé dans son discours de présentation du 19 juin 2014, le projet de loi relatif à santé dotera l’hôpital d’une

“responsabilité nouvelle vis-à-vis de son territoire”.

Présenté comme l’outil permettant d’atteindre cet objectif, et avec toute l’ambition que cela revêt, le groupement hospitalier de territoire (GHT) constitue l’une des propositions du futur projet de loi.

 

Il ressort des travaux de préparation du projet de loi dont une version non officielle circule déjà sur des sites internet, que le GHT se pose en héritier de la communauté hospitalière de territoire (CHT) dont la suppression serait programmée.

 

Dans la lignée de la CHT, le GHT serait ainsi destiné aux établissements publics de santé et aurait pour objet d’organiser et de mettre en œuvre une stratégie de prise en charge partagée. A cet effet, devrait être défini un projet médical commun et organisée une mise en commun de fonction supports et d’activités.

 

Mais s’agit-il pour autant d’une véritable version 2.0 ou bien d’une simple version 1.1 des CHT ?

 

Nous nous sommes attachés à rechercher et à analyser les modalités qui caractériseraient les futurs GHT et les différencieraient des actuelles CHT :

 

  • Un dispositif imposé et contraignant

 

A l’inverse des CHT, l’adhésion à un GHT constituerait une obligation pour les établissements publics de santé. Le projet de texte imposerait la date du 31 décembre 2015 pour que les établissements adhèrent à un groupement.

 

Le projet de loi attribuerait ainsi un pouvoir coercitif aux Directeurs Généraux des Agences Régionales de Santé pour décider de la création de GHT et des membres qui le composeraient. A cet effet, les DG d’ARS devraient arrêter un schéma régional des GHT en conformité avec le projet régional de santé (PRS) et fixer, dans ce schéma, la liste des établissements devant adhérer à un GHT.

 

On relèvera néanmoins que l’adhésion à un GHT ne concernerait pas tous les établissements publics de santé d’un territoire mais seulement les établissements visés par la liste. Le projet de loi prévoirait ainsi des dérogations ainsi qu’une simple possibilité de participation pour les établissements spécialisés en psychiatrie et les centres hospitaliers régionaux.

 

C’est l’approbation de la convention par le(s) DG d’ARS qui emporterait création du GHT. Aucune publication ne serait prévue à l’instar des CHT.

 

On relèvera également que la liste des membres d’un GHT devrait à tout le moins être établie en accord avec les établissements.

 

Cela nous conduit à nous interroger sur les conséquences d’un éventuel refus d’adhésion par un établissement.

 

En l’état du projet, l’absence d’adhésion empêcherait les établissements de pouvoir bénéficier des dotations de financements de l’aide à la contractualisation (dispositions qui devraient être applicables à compter du 1er janvier 2016). Les conséquences financières d’un refus d’adhésion à un GHT devraient donc dissuader tout établissement qui n’entendrait pas se soumettre aux décisions de la tutelle.

 

Mais le projet n’arrête pas là l’aspect contraignant des GHT.

 

Il serait en effet attribué au(x) DG d’ARS le pouvoir d’apprécier la conformité de la convention de GHT avec le PRS et non plus sa simple comptabilité avec le SROS comme pour les CHT. Tout renouvellement ou toute modification subirait le même sort.

 

Par ailleurs, s’il semble que les établissements puissent conserver une certaine « liberté » dans la détermination de la stratégie territoriale, le projet médical unique que chaque GHT élaborerait, devrait se conformer au projet régional de santé.

 

On peut dès lors supposer que tout projet contraire initié par un ou plusieurs des établissements membres pourrait être rejeté par la tutelle au motif qu’il ne se conformerait pas au projet médical du GHT.

 

Dans cette logique de renforcement des pouvoirs des ARS, le respect du projet médical du GHT au même titre que le PRS, devrait également s’imposer pour l’octroi de toute autorisation d’activités de soins ou d’équipements matériels lourds(dispositions qui devraient être applicables à compter du 1er janvier 2016).

 

Enfin, le projet de loi restreindrait également la liberté des établissements en imposant une certification à engager de manière conjointe.

 

  • Une dimension interrégionale

 

En l’état, le projet apporteraient une dimension nouvelle à la notion de territoire en ouvrant le périmètre géographique des futurs GHT à l’interrégionalité. Il est en effet indiqué que selon le cas, l’approbation de la convention constitutive de chaque GHT pourrait concerner un ou la plusieurs Directeurs Généraux d’ARS. Il ne s’agirait alors plus de cantonner les coopérations à une dimension infrarégionale mais au contraire d’en élargir le spectre comme ont pu d’ores-et-déjà le faire certains établissements en dehors de toute CHT.

 

  • L’ouverture aux établissements privés et aux établissements et services médico-sociaux publics

 

A l’inverse des CHT, les futurs GHT seraient ouverts aux établissements privés et aux établissements et services médico-sociaux publics.

 

Pour mémoire, les textes relatifs à la CHT autorisent aujourd’hui la participation d’établissements médicaux sociaux publics aux actions de la Communauté. Le projet de loi relatif à la santé leur conférerait un statut tout autre dans le cadre des GHT puisque les établissements médico-sociaux publics devraient pouvoir adhérer au GHT au même titre que les établissements publics de santé mais sans que les contraintes exposées ci-avant ne s’imposent à eux (obligation d’adhésion, absence de financement en cas de refus…etc.). Le législateur viserait également les services médico-sociaux publics. L’approche exclusivement sanitaire devrait donc être abandonnée au profit d’une approche (plus cohérente) de transversalité, confirmant ainsi la volonté d’une complémentarité entre les secteurs sanitaire et médico-social.

 

Les établissements privés pourraient quant à eux, non pas adhérer, mais être associés aux GHT en devenant des « partenaires ». Ce point constitue une nouveauté notable en comparaison des actuelles CHT pour lesquelles l’association de partenaires privés n’est pas prévue.

Le législateur confèrerait ici un cadre légal aux coopérations que certains établissements publics de santé, regroupés au sein d’une CHT, ont développées avec des structures privées ; ces coopérations s’écartant de toute idée de concurrence pour s’inscrire dans une logique de complémentarité.

On notera que les travaux autours du projet de loi prévoieraient l’association de ces établissements privés à l’élaboration du projet médical du GHT. Quid d’une éventuelle réciprocité ? Quid du non-respect du projet médical du GHT par un établissement privé « partenaires » ?

 

Se poserait surtout la question du périmètre et des modalités d’association de partenaires privés en particulier si elle devait conduire à des regroupements d’activités supports publiques/privées – ce qui en l’état, ne semble pas envisagé – compte-tenu des restrictions au regard des règles de la commande publique et du droit de la concurrence [Cf. Nos prochains articles].

 

  • Un fonctionnement centré sur un établissement support et gestionnaires des activités mutualisées pour le compte des membres

 

Comme pour les CHT, la détermination d’une stratégie médicale et la gestion en commun de fonctions supports, d’activités logistiques et médicotechniques constitueraient les objets premiers des GHT.

 

En l’état des travaux actuels relatifs au projet, la gestion en commun d’activités et fonctions devrait reposer sur la désignation d’un établissement support qui gérerait ces activités et fonctions pour le compte de l’ensemble des membres.

 

Il est vrai que dans le cadre des actuelles CHT, les établissements peuvent assurer des missions – sans que ces missions ne soient cependant définies – pour le compte d’autres membres. Mais compte-tenu de l’imprécision des dispositions et de la forme conventionnelle des CHT, la plupart des établissements publics de santé ayant constitué une CHT ont décidé de doubler leur CHT d’une structure de coopération dite « organique » lorsqu’il s’agissait de mutualiser des activités et fonctions. Ces structures organiques telle qu’un groupement de coopération sanitaire (GCS), sont dotées de la personnalité morale. Les établissements entendaient disposer d’un outil en capacité de gérer ces activités pour le compte de ses membres, de procéder à des achats et des investissements et d’organiser une co-décision et bénéficier le cas échéant de financements spécifiques.

 

Le projet de loi instituerait un schéma tout autre de transfert/délégation d’activité/compétence au profit de l’établissement support gestionnaire et non de regroupement d’activité au sein d’une structure tierce.

 

L’établissement support devrait obligatoirement gérer un système d’information, un département de l’information médicale, la formation initiale et continue des professionnels de santé, la politique d’achats. Il pourrait également gérer les activités administratives et logistiques et d’enseignement ou de recherche.

 

Mais que recouvrirait précisément cette fonction de gestionnaire ?

 

Les établissements donneront-ils mandat à l’établissement support pour assurer cette fonction de gestion ? La théorie du mandat fondée sur  l’article[1] 1984 du code civil, répond à un cadre très précis par lequel le mandataire agit toujours au nom et pour le compte de ses mandants. Le mandataire ne dispose d’aucune autonomie de gestion par rapport à ses mandataires qui conservent un pouvoir décisionnaire et contrôle.

 

S’agit-il d’une délégation de compétence ? On rappellera que la délégation de compétence peut prendre la forme d’une simple délégation de signature ou d’une délégation de pouvoir.

Dans le premier cas, les délégants confient au délégataire le soin de signer tout acte au nom et pour leur compte. La délégation de signature ne fait pas perdre à son auteur l’exercice de sa compétence. La délégation de signature est personnelle et cesse de produire ses effets dès qu’un changement se produit soit dans la personne du délégant, soit dans celle du délégataire. Elle ne vise en outre que certaines attributions du délégant. Ce faisant la délégation de signature n’emporte aucun transfert de compétence.

La délégation de pouvoir consiste quant à elle à transférer des compétences d’une autorité administrative à une autorité désignée, ès qualités. Elle entraîne un transfert de responsabilité du déléguant au délégataire Conformément aux principes du droit administratif, l’exercice délégué d’une compétence n’est possible que lorsqu’elle est prévue par un texte.

 

S’agit-il d’un transfert d’activité ? Le transfert d’activité est la formule la plus contraignante puisqu’il s’agirait pour les membres de céder une ou plusieurs de leurs activités au bénéfice de l’établissement support. Selon le cas, l’opération pourrait s’accompagner d’une cession de moyens matériels et d’un transfert de plein droit des personnels rattachés aux activités considérées. Dans cette hypothèse, la difficulté résiderait dans le fait que le bénéficiaire n’agirait pas pour le compte des autres établissements mais en tant que prestataire.

 

Il est pour l’heure difficile de répondre à ces interrogations :

 

– compte-tenu de la confusion rédactionnelle du projet de loi tel qu’il circule sur internet, mentionnant à la fois des « délégations ou transferts de compétences » ou un « établissement support qui assure « pour le compte de l’ensemble des établissements membres » certaines activités.

 

– faute de précisions quant aux modalités de prise de décision, de moyens de fonctionnement ou encore de partage des coûts : l’établissement support déciderait-il seul ? Qui porterait les éventuels investissements ? Comment l’établissement support « facturerait »-il le service rendu ? Les membres mettront-ils à disposition de l’établissement support leurs moyens matériels et humains ? L’établissement support devra-t-il recruter les personnels concernés ? La constitution des GHT ne serait-elle pas l’occasion de disposer d’un outil de gestion plus souple des effectifs médicaux et non-médicaux ?

 

Rien n’est non plus précisé sur les modalités de désignation de cet établissement support.

 

Si cette rédaction devait être retenue, il serait indispensable de clarifier le régime applicable. D’autant que l’adhésion à un GHT serait obligatoire et que les missions dévolues à l’établissement support toucheraient à des thématiques fondamentales que sont les SIH et le DIM. 

 

Sur ces deux thématiques (SIH et DIM), on relèvera que le projet de loi introduirait :

 

–                     une dérogation au droit au respect de la vie privé des patients et du secret des informations les concernant (article L. 1110-4 du code de la santé publique), en autorisant le transfert des informations concernant les patients d’un établissement membre au GHT. Ces données seraient réputées confiées par le patient au GHT.

 

–                     une dérogation au principe selon lequel les établissements de santé procèdent à l’analyse et à la facturation de leur activité sur la base des données médicales nominatives transmises par les praticiens (article L. 6113-7 du code de la santé publique), en confiant au responsable de l’information médicale de l’établissement support le soin de procéder à l’analyse et à la facturation de l’activité de l’ensemble des membres du GHT et à recueillir les données médicales nominatives.

 

Ces deux dérogations appellent des questions en termes de confidentialité, de faisabilité technique et de régime de responsabilité : quels seraient les équipements à disposition de l’établissement support et aux autres membres pour transférer les données ? Quid du régime de partage et d’hébergement des données ? Quid du transfert des actuelles licences ? qui serait responsable en cas d’erreur de codage ?

 

Là encore, les questions sont nombreuses et aucune réponse ne peut être apportée.

 

On précisera enfin qu’en l’état des textes, la gestion par un établissement support de certaines activités ne nous semble pas autorisée. Tel est par exemple le cas des PUI qui sont en principe limitées à l’usage des malades dans les établissements où elles sont constituées (ou qui appartiennent au GCS gestionnaire de la PUI). Les dérogations prévues en la matière demeurant très limitées. Si le GHT devait concerner des domaines comme la PUI, il serait alors nécessaire de modifier les dispositions en vigueur pour autoriser légalement l’établissement support à gérer cette activité (exemples : délivrance des médicaments répondant aux besoins des établissements membres pour la PUI, modalités de transfert et réalisation d’examens biologiques en matière de laboratoire de biologie médicale…etc.).

 

  • Des GHT sans personnalité morale

 

En l’état du projet de loi, la question de la personnalité morale du GHT semble être réglée puisque comme nous l’avons indiqué plus haut, il ne s’agirait pas d’organiser un regroupement d’activité mais un transfert/délégation d’activité à un établissement support.  L’objectif poursuivi par le législateur serait en effet d’attribuer à un établissement membre du GHT, la gestion pour le compte des autres membres des activités (hors activités de soins) qui seraient mutualisées.

 

Se pose la question de la gouvernance : répliquera-t-on le schéma des CHT avec une gouvernance complexe et lourde (commission de communauté, établissement siège dont les instances sont élargies aux représentants des autres établissements signataires, faculté d’IRP communes) ou bien laissera-t-on le soin à la convention de définir les règles d’organisation et les modalités de prise de décisions ?

 

Se pose également, la question de la compatibilité de ce schéma avec les règles fiscales et le droit des marchés publics.

 

–          Sur les règles fiscales

 

Dans la perspective d’un « établissement support gestionnaire », on doit s’interroger sur l’applicabilité de la TVA aux services qu’il rendrait aux autres membres.

 

L’article 261 B du code général des impôts exonère de la TVA, sous certaines conditions[2], les services[3] qu’un « groupement » rend à ses membres.

 

La notion de « groupement » recouvre les groupements dotés de la personnalité morale (GCS, GIP, GIE ou GCSMS) mais aussi les simples groupements de fait.

 

Dans le Bulletin Officiel des Finances Publiques[4], il est clairement indiqué que « Il n’est pas exigé que le groupement soit légalement constitué, de sorte que la notion de groupement recouvre aussi bien des entités dotées de la personnalité juridique que de simples groupements de fait. »

 

Ainsi, à supposer que la gestion des activités mutualisés pour le compte des membres de la GHT serait confiée à l’un des établissements membres dans une logique de mandat ou de délégation de compétence,  pourrait-il alors être considéré qu’un groupement de fait est bien formalisé entre le membre « gestionnaire » et les autres membres ?

 

En effet, sous réserve de respecter les conditions fixées par l’article 261 B du code général des impôts, l’exonération de TVA sur les services rendus par l’établissement gestionnaire serait vraisemblablement envisageable.

 

En revanche, si les attributions de l’établissement support devaient résulter d’un transfert d’activité, la constitution d’un groupement de fait pourrait être remise en cause puisque l’établissement support et les autres membres s’inscriraient dans une relation de fournisseur/clients et non de coopération.

 

–          Sur les marchés publics

 

Il convient de s’interroger sur l’applicabilité des règles de la commande publique lorsque la gestion d’une activité pour le compte de plusieurs pouvoirs adjudicateurs est confiée à l’un d’entre eux dans un cadre strictement conventionnel.

 

Le membre « gestionnaire » devra-t-il être considéré comme un prestataire imposant le respect des règles de la commande publique ?

 

La Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) a en effet rappelé, dans son arrêt de principe « Teckal » du 18 novembre 1999, que les règles de la commande publique sont applicables par tout pouvoir adjudicateur qui envisage de conclure, « avec une entité juridiquement distincte », un contrat à titre onéreux, que cette entité soit elle-même un pouvoir adjudicateur ou non.

 

On relèvera avec intérêt qu’au niveau européen, la jurisprudence a précisé que la coopération entre personnes publiques pouvait se manifester en dehors de toute forme juridique particulière, notamment, en dehors de la création d’un organisme spécifique (CJCE du 9 juin 2009 (Commission / Allemagne, C-480-06)[5].

 

L’article 12 de la directive 2014/24/UE, intégrant cette jurisprudence,  reconnait désormais qu’un « marché conclu exclusivement entre deux pouvoirs adjudicateurs ou plus ne relève pas du champ d’application de la directive » dès lors que les conditions cumulatives suivantes sont réunies :

 

« a) le marché établit ou met en œuvre une coopération entre les pouvoirs adjudicateurs participants dans le but de garantir que les services publics dont ils doivent assurer la prestation sont réalisés en vue d’atteindre les objectifs qu’ils ont en commun ;

b) la mise en œuvre de cette coopération n’obéit qu’à des considérations d’intérêts public ;

c) les pouvoirs adjudicateurs participants réalisent sur le marché concurrentiel moins de 20 % des activités concernées par la coopération »

 

Il est cependant permis de douter de la faisabilité d’un tel montage en droit français actuel. A notre sens il conviendrait de démontrer que le partenariat respecte les principes fondamentaux de la coopération et en particulier la co-décision et lepartage de coûts. Il ne peut en effet s’agir d’une simple sous-traitance répondant à la seule logique du paiement d’un prix moyennant la réalisation d’une prestation de service. Or, l’organisation d’une vraie co-décision se heurte au principe d’autonomie de gestion des établissements publics de santé.

 

La transcription en droit interne de la directive européenne devrait permettre de clarifier les conditions de mise en œuvre de cette disposition.

 

  • Le financement des GHT

 

Les aides MIGAC et les subventions au titre du fond de modernisation devraient être versées au GHT. En l’absence de personnalité morale propre, ce versement serait cependant impossible. Le rédacteur n’a pas tiré les leçons de la rédaction approximatives des textes initiaux relatifs aux CHT !

 

En conclusion, il semblerait que le législateur ait voulu tirer les conséquences d’un succès plus que relatif – pour ne pas dire d’un échec – de la création des CHT, en créant, plus qu’une version 2.0 des CHT, un nouvel outil d’organisation de l’offre de soins.

 

Centré sur une approche territoriale plus large, et une transversalité sanitaire/médico-sociale, le GHT tel que présenté offrirait davantage de perspectives pour définir une stratégie médicale commune. Stratégie médicale qui s’imposait déjà lors de la conception des CHT, mais qui devient aujourd’hui encore plus nécessaire. A cet effet, le projet de santé veillerait à ce que les établissements publics de santé s’inscrivent véritablement dans cette optique par la mise en place d’un dispositif obligatoire et en accroissant les pouvoirs de la tutelle.

 

L’Hôpital serait ainsi et comme l’a annoncé Madame la Ministre, doté d’une responsabilité nouvelle vis-à-vis de son territoire.

 

On reste cependant dans l’attente de précisions sur les modalités d’organisation de la gestion par l’établissement support d’activités et fonctions communes pour le compte de ses membres.

 

Il serait en effet regrettable de ne pouvoir garantir aux établissements que l’organisation et le fonctionnement du GHT répondent aux critères d’exonération de l’application du code des marchés publics et puissent bénéficier du régime spécifique de l’article 261 B du code général des impôts en matière de TVA. Qui plus est si l’adhésion au GHT est obligatoire. 

 

L’apport de précisions clarifierait également la finalité réelle des GHT : est-ce que le législateur n’a pas entendu imposer une intégration progressive et préparatoire à une fusion d’établissements qui conduirait à créer une nouvelle catégorie : l’établissement public de santé « territorial » ?



[1] Article 1984 du code civil : « Le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom.

Le contrat ne se forme que par l’acceptation du mandataire. »

 

[2] Il s’agit de conditions cumulatives : le groupement doit être formalisé, les membres n’ont pas la qualité d’assujettis ou exercent une activité exonérée, les services rendus doivent concourir directement et exclusivement à la réalisation de l’opération exonérée ou exclue du champ de la taxe, les contributions aux charges ne doivent pas avoir un caractère forfaitaire mais correspondre exactement à la part des dépenses engagées pour chaque membre, les services rendus à des tiers au groupement doivent représenter moins de 50 % du total des recettes du groupement afférentes à ce service, Aucune déduction de TVA ne peut être opérée pour les services concernés et la taxe sur les salaires doit être acquittée sur les rémunérations des personnels propres du groupement concourant à la réalisation des services concernés.

 

[3] Ne sont donc pas visées les livraisons de bien

 

[4] BOI-TVA-CHAMP-30-10-40-20121001

 

[5] Dans l’affaire soumise au juge communautaire, quatre Landkreise avaient conclu avec la ville de Hambourg un contrat destiné à assurer la mutualisation du traitement de leurs déchets. La ville s’engageait à réserver une capacité d’élimination des déchets aux Landkreise au sein d’une installation de valorisation thermique dont elle s’était chargée d’assurer la construction et l’exploitation par un tiers, prestataire privé. Le juge a considéré que ce contrat était « l’aboutissement d’une démarche de coopération intercommunale entre les parties » qui contribuait à la réalisation d’une mission commune d’intérêt général, et qui échappait de ce fait, aux règles de la commande publique.  Le juge a tout d’abord considéré, que la ville de Hambourg ne pouvait pas être considérée comme un prestataire de services car elle ne supportait pas une obligation de résultat de la prestation d’élimination des déchets, le contrat se contentant d’organiser une assistance entre les personnes publiques, notamment en cas de surcharge ponctuelle de l’installation. Par ailleurs, seul l’exploitant de l’installation percevait le prix de la prestation d’élimination des déchets, les Landkreise se contentant de rembourser la part des charges leur incombant à la ville. Enfin, le juge a souligné que le contrat traduisait une démarche de coopération entre les parties, dans la mesure où la création de l’installation n’a été rendue possible que par l’engagement préalable des Landkreise à l’utiliser.

 

Schéma récapitulatif

 

 

 

CHT

 

 

GHT

Création/adhésion

 

 

 

 

Volontaire (à l’initiative des directeurs + Présidents de CME ou des Présidents de Conseil de surveillance)

 

Ou

 

Obligatoire, imposée parle DG d’ARS pour des raisons liées à la qualité ou la sécurité des soins ou à un déséquilibre financier

 

Obligatoire avant le 31.12.2015 pour les EPS sauf dérogation (les ARS arrêtent un schéma régional des GHT, qui fixe la liste des établissements publics de santé concernés (en accord avec l’ensemble des établissements))

 

Procédure

 

Elaboration par directeurs + Présidents de CME

 

Approbation par les établissements :

  • Si CHT identifiée comme devant mener à une fusion ou si participation d’un CHU : approbation par le Conseil de surveillance
  • Dans les autres cas :

Approbation par le directeur de l’établissement après information du CTE et avis du Conseil de surveillance

 

Approbation par le DG d’ARS après avis du ou des préfets de région(s) concernée(s) : appréciation de la compatibilité de la convention de CHT avec le SROS + possibilité de demander des modifications

 

Conditions d’élaboration renvoyées à un décret

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Approbation par le(s) DG d’ARS de la convention, de son renouvellement et de sa modification : appréciation de la conformité de la convention avec les PRS + possibilité de demander des modifications

Membres

Etablissements publics de santé

 

 

Adhésion à une seule CHT possible

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Possibilité pour les établissements publics médico-sociaux de participer aux actions de la CHT

Etablissements publics de santé + établissements et services médico-sociaux publics

Adhésion à une seule CHT possible

/ ! les CHU, CHS en psychiatrie et tout autre établissement désigné par le(s) DG d’ARS peuvent être associés à l’élaboration du projet médical de GHT dont ils ne sont pas membres car vocation à remplir un rôle de recours ou de référence

 

Possibilité d’association d’établissements privés « partenaires » au GHT : notamment association à l’élaboration du projet médical unique du GHT

 

Territoire

 

Infrarégional

 

Inter régionalité possible

 

Objets

 

Mettre en œuvre une stratégie commune

 

Gérer en commun certaines fonctions et activités grâce à des délégations ou des transferts de compétences + grâce à la télémédecine

 

 

Mise en œuvre d’une stratégie commune

 

Rationalisation des modes de gestion par une mise en commun de fonctions et activités par des délégations ou des transferts de compétences

 

Définition et mise en œuvre d’une stratégie médicale commune

+ mise en œuvre de la mise en commun des activités et fonctions

 

 

 

Elaboration d’un projet médical commun (définition du PMC dans la convention de CHT)

 

Régime dérogatoire simplifiant :

  • les délégations et transferts de compétences et d’activités :
  • Simplification de la procédure de transfert des autorisations
  • Cession, échange, et mise à disposition de biens meubles et immeubles
  • la mise en commun des RH et des SIH,
  • les cessions et échanges de biens,

 

Mise en cohérence des CPOM, projets d’établissements, PGFP et programmes d’investissement

 

Possibilité de créer des pôles de territoire

 

Elaboration d’un projet médical unique

 

Gestion des fonctions et activités (hors activités de soins) par un établissement support pour le compte des membres

 

A compter du 1er janvier 2016 : délivrance des autorisations en tenant compte de la conformité avec le PRS et le projet médical du GHT

 

Certification engagée de manière conjointe

 

Gouvernance

 

Désignation d’un établissement siège approuvée par les 2/3 au moins des Conseils de surveillance représentant au moins les ¾ des produits versés par l’assurance maladie au titre des activités MCO. A défaut d’accord : désignation par le DG d’ARS

Rôle : élargissement de ses instances à des représentants des autres établissements membres

 

Commission de communauté

Composé des directeurs, Présidents de CME et Présidents de Conseil de surveillance 

Compétence : suivi de l’application de la convention et propositions de mesures afin de faciliter l’application de la convention ou améliorer la mise en œuvre de la stratégie médicale commune.

 

Possibilité de disposer d’IRP communes

 

 

 

 

Etablissement support désigné par la convention

Rôles :

assure obligatoirement pour le compte des établissements membres : la gestion d’un SI, d’un DIM (régime dérogatoire de traitement des informations), la politique d’achats, la formation initiale et continue des professionnels de santé.

Peut gérer pour le compte des établissements membres les activités administratives et logistiques et d’enseignement ou de recherche

 

Forme de coopération

 

conventionnelle

 

conventionnelle

 

Aspects financiers

 

Elaboration de comptes combinés (agrégation des comptes annuels de l’ensemble des établissements après retraitements éventuels : bilan combiné, compte de résultat combiné et  annexe explicative aux comptes combinés)

 

Définition par la convention des modalités de fixation des frais pour services rendus en contrepartie des missions assumées pour leur compte par certains d’entre eux

 

Versement au GHT des aides MIGAC et subventions au titre du fond de modernisation

 

A compter du 1er janvier 2016, les établissements publics de santé non membres d’un GHT ne pourront, sauf dérogation, bénéficier de la dotation de financement d’aide à la contractualisation

 

Mentions définies dans la convention

 

 

 

 

 

Projet médical commun  compétences et activités déléguées ou transférées cessions ou échanges de biens

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Modalités de mise en cohérence des CPOM, projets d’établissements, PGFP et programmes d’investissement

 

Modalités de coopération en matière de gestion

 

Modalités de mise en commun des RH et des SIH

 

Modalités de fixation des frais pour services rendus en contrepartie des missions assumées pour leur compte par certains d’entre eux

 

Modalités d’articulation entre EPS signataires et établissements médico-sociaux participant

 

Composition du Conseil de surveillance, directoire, organes représentatifs du personnel de l’établissement siège

 

Création d’IRP communes

 

L’établissement de comptes-combinés

 

Stratégie médicale unique

 

 

 

 

Modalités d’organisation et de fonctionnement du GHT notamment l’établissement support

 

Délégations ou transferts d’activités de soins ou d’équipements matériels lourds

 

Résiliation


  • soit par décision concordante des conseils de surveillance
  • soit sur demande motivée des conseils de surveillance de la majorité des établissements
  • soit sur décision du DGARS après avis du représentant de l’Etat dans la Région  en cas de non application de la convention.