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S’il est un domaine d’actualité qui présente un intérêt certain pour les établissements publics de santé, c’est bien celui du CHSCT.

Nous relevions sur notre blog en début d’année 2012 (le 11 janvier 2012 pour ceux qui souhaiteraient retrouver rapidement nos observations), l’importance de l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 14 décembre 2011, rendu sous le numéro 10.20378 et qui jugeait, au visa de l’article L.4614-12 du code du travail, que la désignation d’un expert par le CHSCT des personnes morales de droit public n’avait pas à être précédée d’une mise en concurrence.

La haute juridiction judiciaire mettait fin ainsi à un débat animant nombres d’audiences devant les juges du fond ces deux dernières années.

Cet arrêt du 14 décembre 2011 est certes critiquable sur la forme : la Cour de Cassation aurait pu faire preuve de pédagogie et énoncer le raisonnement juridique conduisant à rejeter le pourvoi.

Sur le fond, ladite décision est logique en droit au regard de la jurisprudence construite par la chambre sociale de la Cour de cassation sur l’autonomie du CHSCT vis-à-vis de l’employeur. Ce point n’est pas critiquable dès lors que le CHSCT doit être indépendant de l’employeur. A défaut, sa raison d’être serait nécessairement remise en cause.

Cette jurisprudence s’explique surtout par le moyen tiré de ce que les CHSCT n’ont pas été créés pour satisfaire des besoins d’intérêt général mais pour défendre l’intérêt des salariés du seul établissement au sein duquel il est constitué (les besoins des CHSCT ne répondent donc pas aux critères posés par l’ordonnance 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics).

En l’état actuel des textes et de la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation, l’employeur public est donc limité dans les moyens juridiques qu’il peut soulever à l’appui d’une demande tendant à voir ordonner l’annulation de la délibération du CHSCT désignant un expert agréé.

Il ne peut désormais à opposer comme moyen de fond que:

–        le fait qu’il n’existe pas de risque grave
Et/ou,
–        le fait que le projet de l’employeur n’est pas un projet ayant pour objet un "aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail", en référence à l’article L.4612-8 du code du travail.

Sur ce dernier point, le critère du nombre de salariés concernés par le projet n’est pas le critère unique ni même le critère essentiel. Il s’agit plus d’un critère secondaire. Le critère essentiel est celui des conséquences du projet sur les salariés et leurs conditions de travail (Cassation sociale  10 février 2010 n°08-15.086).

Ce faisant, l’employeur public est donc placé dans une position strictement identique à l’employeur privé.

Au-delà de ces deux moyens de fond, qui doivent bien entendu correspondre à une réalité, il lui reste aussi la possibilité de soulever le moyen tiré de ce que le CHSCT n’a pas pris de décision formalisée à l’issue d’une délibération collective.

En ce sens, nous pouvons citer un arrêt récemment publié au bulletin qui rappelle la nécessité d’une décision du CHSCT et l’expression de ses membres.

–        Cassation sociale 10 janvier 2012 n°10.23206:

"Mais attendu qu’ayant relevé qu’il ressortait du seul procès-verbal de la réunion du comité d’entreprise en date du 11 mars 2009 que le CHSCT avait été informé du projet, le 3 mars précédent, et que l’avis de ses membres avait été pris lors d’un tour de table à la fin de la réunion, la cour d’appel, qui a retenu à bon droit que l’avis du CHSCT ne peut résulter que d’une décision prise à l’issue d’une délibération collective et non de l’expression d’opinions individuelles de ses membres, en a justement déduit que le CHSCT n’avait pas exprimé d’avis ; que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n’est pas fondé pour le surplus ;"

Une fois la désignation de l’expert opérée par voie de délibération, l’employeur public doit veiller à ce que la mission de l’expertise telle que présentée par l’expert agréé est conforme à la délibération du CHSCT l’ayant désigné.

En effet, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que l’employeur était recevable à saisir à nouveau le juge en la forme des référés :

"Mais attendu que la cour d’appel, saisie d’une contestation sur le champ de la mission de l’expert, a souverainement constaté que certaines investigations proposées par l’expert n’entraient pas dans le cadre de la mission qui lui avait été confiée par la délibération du CHSCT du 27 mars 2007 telle que validée par l’ordonnance de référé du 14 juin 2007 et a pu décider que la mission d’expertise devait être cantonnée à l’analyse et à la prévention des risques mentionnés dans cette délibération ;" (Cassation sociale 19 mai 2010 n°08-19316).


Commentaire du Rédacteur en Chef du blog HOUDART et ASSOCIES:

Maître Guillaume CHAMPENOIS, Avocat associé, interviendra le 14 mars 2012 à la conférence des directeurs des ressources humaines de la FHF Ile de France sur cette question du CHSCT