Scroll Top
Partager l'article



*




 

Analyse

Du mieux dans les délais de paiement des pouvoirs adjudicateur

Le 7 mars 2016, l’observatoire national des délais de paiement a rendu son rapport sur son enquête réalisée entre 2014 et 2015 au ministre de l’Economie. Globalement, ce rapport met en exergue des progrès en matière de délai global de paiement moyen qui s’établit à 28.2 jours.

Toutefois, il existe une grande hétérogénéité entre les acteurs :

 – Le délai de paiement des régions est passé de 37.4 jours en 2014 à 33 jours en 2015 ;

 – Pour les départements, le délai de paiement est passé de 24.3 jours en 2014 à 23.6 jours ;

 – Dans les communes de moins de 10 000 habitants, ce délai est de 20.9 jours en 2015 contre 21.6 jours en 2014.

Il y a toutefois deux mauvais élèves :

 – Le délai global de paiement de l’Etat a augmenté ;

 – Le délai global de paiement moyen des établissements publics de santé est passé de 39.8 jours en 2014 à 43 jours en 2015, les plus mauvais payeurs étant les « gros » établissements.

 L’ensemble de ce rapport est consultable sur le site du ministère et de l’Economie :  http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/observatoire_delais_paiement_rapport_annuel_2015.pdf

Contentieux

L’obligation pour les groupements de commandes d’allotir leurs marchés

Le recours au groupement de commande, mécanisme prévu par l’article 8 du Code des marchés publics, permet à différents pouvoirs adjudicateurs de mutualiser leurs achats et de disposer de prix plus avantageux. Toutefois, il existe peu de jurisprudence sur ces groupements laissant subsister un doute sur l’obligation de se conformer aux règles de l’allotissement fixées par l’article 10 du Code des marchés publics.

 

Les prémices de la solution avaient été fixés dans un arrêt du 11 août 2009, dans lequel le Conseil d’Etat se prononçait sur le régime des dérogations à l’allotissement dans le cadre d’un marché public mené par le coordonnateur d’un groupement de commandes qui laissait penser implicitement que l’obligation d’allotir était applicable.

La question est définitivement tranchée dans un arrêt du 18 septembre 2015 où les juges du Palais Royal estiment que « les dispositions précitées de l’article 10 du code des marchés publics, qui prévoient le principe d’une dévolution des marchés publics par lots et définissent les hypothèses dans lesquelles un marché global peut être conclu, sont applicables lorsqu’un groupement de commandes a été constitué dans les conditions prévues par l’article 8 du code des marchés publics ».

Par ailleurs, il est loisible de relever que le juge administratif sanctionne également le groupement qui prévoit dans son règlement de consultation que tous les lots seraient attribués à une seule et unique entreprise.

(CE, 18 septembre 2015, n° 389740)

 

La demande indemnitaire formée dans le cadre d’un recours Tarn-et-Garonne relève du même litige que l’examen de la validité du contrat

Dans cette affaire, une société a été écartée de l’attribution d’un marché public lancé par une région. La société a alors introduit un recours en contestation de validité du contrat auquel était joint une demande indemnitaire. Estimant que le juge ne lui avait pas accordé une indemnité suffisamment importante, la société a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal administratif de Marseille. En réponse, la région a décidé de répliquer par la voie de l’appel incident pour contester l’appréciation faite par le juge de l’indemnisation accordée à la société requérante, mais également pour critiquer l’annulation du marché.

La Cour administrative d’appel de Marseille a estimé que les conclusions dirigées par la région à l’encontre du jugement en ce qu’il avait annulé le marché relevaient d’un litige distinct de celui de l’indemnisation. Par conséquent, elle estimait que l’appel incident de la région n’était pas recevable.

En effet, il est de jurisprudence constante qu’un appel incident ne peut porter que sur un même litige (CE, 17 janvier 1958, Raguenet, req. n° 36587).

Mais le Conseil d’Etat ne va pas suivre le raisonnement de la Cour et juge que :

« lorsque le juge se prononce sur les différentes conclusions dont il peut être saisi dans le cadre d’un tel recours, qu’il s’agisse d’annuler totalement ou partiellement le contrat, d’en prononcer la résiliation, ou de modifier certaines de ses clauses, ou encore de décider la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation, ou bien d’accorder des indemnisations en réparation des droits lésés, ces mesures se rattachent toutes à un même litige ; qu’il en résulte que l’appel incident présenté par la Région ne soulevait pas, en tant qu’il contestait l’annulation du marché litigieux par le juge du contrat, un litige distinct des conclusions de l’appel principal présenté par la société évincée, qui portaient sur la réparation du préjudice résultat de cette éviction ».

Ainsi, le Conseil d’Etat consacre le principe d’unicité du litige dans le cadre d’un recours Tarn-et-Garonne, bien que la distinction de nature entre les conclusions pouvant y être présentées demeure. Cette solution ne peut être que saluée en ce qu’elle permet de garantir un certain équilibre dans le contentieux, la demande indemnitaire résultant de la solution donnée sur la validité du contrat.

 (CE, 21 octobre 2015, n° 384787)

 

Les avocats retoqués par le Conseil d’Etat

Les avocats, par l’intermédiaire du Conseil National des Barreaux (CNB), la Conférence des bâtonniers et l’Ordre des avocats à la Cour d’appel de Paris, avaient présenté un recours à l’encontre de l’Ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics.

 La critique des avocats était formulée à l’encontre de l’article 14 de l’Ordonnance en ce qu’elle n’exclue pas de son champ d’application les prestations de services juridiques relatives à la représentation par un avocat dans une procédure devant une juridiction et au conseil lié à une procédure devant une juridiction, contrairement à l’article 10 de la directive 2014/24/UE.

Le Conseil d’Etat relève que « la directive 2014/24/UE tend à la coordination des procédures nationales de passation de marchés, afin de garantir que les principes d’égalité de traitement, de non-discrimination, de reconnaissance mutuelle, de proportionnalité et de transparence soient respectés et que la passation des marchés publics soit ouverte à la concurrence ».

Les juges du Palais Royal précisent que « si les Etats membre ne peuvent, dans le cadre de la transposition de cette directive instituer des obligations de publicité et de mise en concurrence moins contraignantes que celles qu’elle prévoit, hors les cas où elle ouvrirait elle-même une telle faculté, il leur est loisible de décider de soumettre aux dispositions prises pour sa transposition des marchés qu’elle exclut de son champ d’application, des règles plus contraignantes que celles qu’elle définit, dès lors que la soumission à ces règles est compatible avec le respect du droit de l’Union européenne ».

Par conséquent, le Conseil d’Etat valide l’Ordonnance en ce qu’elle prévoit des règles plus contraignantes que celles fixées par la directive qu’elle transpose pour les règles de passation des marchés publics de services juridiques.

 (CE, 9 mars 2016, n° 393589)