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Compétence

Quel juge compétent pour connaître du litige portant sur un contrat administratif cédé à une personne privée

Le Tribunal des conflits a été amené à se prononcer sur l’ordre juridictionnel compétent pour connaître du litige portant sur un contrat administratif cédé par la personne publique à une personne privée.

En l’espèce, l’EPIC GDF a attribué un contrat pour la construction d’un terminal méthanier à un groupement en 2004. Or, GDF a été privatisé pour devenir une société anonyme. En 2005, le groupe a cédé le contrat par un avenant rétroactif à une filiale de droit privé.

Dans le cadre d’un litige né entre les deux sociétés, le Conseil d’Etat a saisi le Tribunal des conflits pour qu’il qualifie la nature du contrat, conclu initialement entre une personne publique et une personne privée, avant de faire l’objet d’une cession rétroactive à une société privée. Cette question de la qualification de la nature du contrat est dirimante pour connaître l’ordre juridictionnel compétent pour trancher le litige.

Le Tribunal relève que le contrat litigieux a été conclu par GDF qui était alors un EPIC, pour satisfaire à ses obligations de service public. Il en est déduit que les travaux avaient un but d’intérêt général et constitue donc un contrat de droit public.

De plus, le Tribunal précise que « sauf disposition législative contraire, la nature juridique d’un contrat s’apprécie à la date à laquelle il a été conclu ; que par suite, ni la modification du statut de Gaz de France, devenu société anonyme en application de l’article 24 de la loi n° 2004-803 du 9 août 2004, ni la cession du contrat à la société Fosmax LNG avec effet rétroactif au jour de sa conclusion n’ont eu pour effet d’en modifier la nature juridique ».

Par conséquent, le Tribunal des conflits estime que « le contrat litigieux relevant d’un régime administratif d’ordre public, le recours en annulation formé contre la sentence arbitrale, impliquant le contrôle de la conformité de celle-ci aux règles impératives de la commande publique, ressortit à la compétence de la juridiction administrative ».

(TC, 11 avril 2016, n° 4043)

 

Compétence de la juridiction administrative pour connaître des litiges portant sur la responsabilité des personnes privées pour les pratiques anticoncurrentielles commises dans le cadre de la passation des contrats publics

Dans une décision de novembre 2015, le Tribunal des conflits a jugé que la juridiction administrative était compétente pour connaître d’une action en responsabilité exercée par une personne publique contre l’un de ses cocontractants, mais également contre des tiers, fondée sur des agissements commis par ces derniers à l’occasion de la passation d’un contrat administratif. Cette décision est également applicable quand lesdits agissements sont constitutifs de pratiques anticoncurrentielles relevant normalement des juridictions judiciaires.

En l’espèce, il était question d’agissements de sociétés et de leurs préposés susceptibles d’avoir conduit la région Ile-de-France à passer des marchés publics à des conditions de prix désavantageuses. Le Tribunal relève que « les litiges relatifs à la responsabilité de personnes auxquelles sont imputés des comportements susceptibles d’avoir altéré les stipulations d’un contrat administratif, notamment ses clauses financières, dont la connaissance relève de la juridiction administrative, et d’avoir ainsi causé un préjudice à la personne publique qui a conclu ce contrat, relèvent de la compétence de la juridiction administrative ».

(TC, 16 novembre 2015, n° 4035)

 

Contentieux

L’exécution d’un service concédé ne peut être cédée ou transférée à un tiers sans l’autorisation de l’autorité concédante

 

La Cour administrative d’appel de Marseille est venue rappeler un principe constant du droit des délégations de service public, à savoir que le délégataire ne peut céder ou transférer l’exécution de la mission de service public dont il a la charge sans l’accord de l’autorité concédante (CE, 20 janvier 1905, Compagnie départementale des eaux et services municipaux c/ Ville de Langres).

 

L’intérêt de cet arrêt réside dans la nature du délégataire, qui est ici une personne publique.

 

En l’espèce, par une loi du 4 août 1885, l’Etat avait concédé à la commune de Grasse la construction et l’exploitation du canal de Foulon. Par un contrat conclu en 2011, la commune a décidé de déléguer le service public d’alimentation en eau potable de Foulon à un tiers. Cette délibération a été annulée par le Tribunal administratif de Nice.

 

La Cour d’appel rappelle que « l’exécution de tout ou partie d’un service concédé ne peut être cédée ou transférée par le concessionnaire à un tiers qu’avec l’accord de l’autorité concédante ». Il est ensuite précisé que « cette règle générale s’applique même en l’absence de stipulation en ce sens dans le contrat de concession ; que, si l’article 7 du cahier des charges de la concession conclue entre l’Etat et la commune de Grasse autorise cette dernière à concéder elle-même, le cas échéant, à des tiers « les eaux de colature » (…), cette stipulation n’a ni pour objet ni pour effet d’habiliter la commune à confier à des tiers l’exploitation du service et des installations et ouvrages concédés (…) sans l’accord préalable de l’Etat ».

 

(CAA de MARSEILLE, 14 mars 2016, Commune de Grasse, n° 14MA01872)