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On se souvient que l’article 2 de la loi MURCEF a rendu caduque la jurisprudence antérieure dégagée tant par la Cour de cassation que par le Tribunal des conflits selon laquelle les marchés publics pouvaient être des contrats de droit privé. En effet, par son arrêt Sté Locunivers du 17 décembre 1996, la cour de cassation avait jugé que la soumission d’un contrat aux dispositions du code des marchés publics ne lui confèrait pas, par elle-même, le caractère d’un contrat administratif. Cette solution avait été adoptée également par le Tribunal des conflits dans deux arrêts du 5 juillet 1999 (Commune de Sauve c. Sté Gestener ; UGAP c. Sté Activ SA) puis dans deux autres décisions du 14 février 2000 (Commune de Baie-Mahault ; Crédit Lyonnais c. EDF).

Cette jurisprudence qui appliquait aux marché publics passés entre une personne publique et une société privée les critères matériels du contrat administratif, fondés sur l’exorbitance de certaines dispositions et l’exécution du service public posait des difficultés sans fin aux acheteurs comme à leurs fournisseurs et même aux autorités de contrôle (qualification du contrat, choix de la juridiction et de la procédure, contrôle de légalité ou non, etc.). En effet, à défaut de constater la présence de l’un ou l’autre des critères matériels de l’acte administratif, le marché pourtant conclu selon les règles du code des marchés publics pouvait être un contrat de droit privé.

C’est pourquoi il été décidé de constituer, sur le modèle ancien des contrats relatifs à l’exécution d’un travail public (loi du 28 Pluviose an VIII), un bloc de compétence exclusif au profit du juge administratif. C’est ainsi que l’article 2 de la loi MURCEF dispose que "les marchés passés en application du code des marchés publics ont le caractère de contrats administratifs".

Malgré sa simplicité, ou à cause d’elle, cette disposition continue d’agiter les esprits. Fort heureusement le Tribunal des conflits nous apporte de nouveau ses lumières par deux décisions du 14 novembre 2011 (N° 3817 Société O10C Business Solutions c/ Commune de Roquebrussanne ; n°3813 Union des groupements d’achats publics c/ Eurl C2 Conseils et Formation).

Sont des contrats administratifs tous les marchés qui entrent dans le champ d’application du code des marchés publics, que les procédures définies par ce code aient été mises en oeuvre ou non.

Cette solution a déjà été retenue à plusieurs reprises, à propos de contrats d’assurance (TC 24 avril 2006, OPHLM de Montrouge c/ Société mutuelle d’assurance des collectivités locales, n° 3503), ou de la facturation présentée à l’Etat par France Télécom (TC 19 mars 2007, société France Télécom, n° 3594), ou encore, à propos de location, par une personne publique, de matériel de photocopie (TC 17 décembre 2007, Société Lixxbail c/ Etat, n° 3651). La Cour de cassation n’a pas appliqué une solution différente à propos de contrats d’assurance conclus par une commune (Cass. Civ. 1ère, 23 janvier 2007, Bull. civ.I n° 40), solution retenue au visa des articles 1 et 2 du code des marchés publics et de l’article 2 de la loi Murcef.

Néanmoins l’expression « marchés passés en application du code des marchés publics » n’implique pas pour autant que les marchés conclus, à la seule initiative des parties, selon l’une des procédures prévues par le code des marchés publics, lorsque ces marchés n’entrent pas dans le champ d’application de ce code, soient des contrats administratifs (CE, avis, 29 juillet 2002, Société MAJ Blanchisserie de Pantin, n° 246921).

Ces analyses sont particulièrement intéressantes en matière de groupements de coopération (GIP, GCS, GCSMS) de droit public dont les marchés ne relèvent pas, sauf exception, du code des marchés publics et donc ne devraient pas être des contrats administratifs en dehors des cas admis par la jurisprudence et rappelés supra…