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“Les faits sont têtus. Il est plus facile de s’arranger avec les statistiques”.
Mark Twain

Imaginons :

Un automobiliste se fait flasher quatre fois de suite dans le même mois dans des zones où la limitation de vitesse est supérieure à 50 kms/h, pour des dépassements compris entre 20 et 30 kms/h.

La maréchaussée enquête, analyse ses déplacements, établit que le « chauffard » a parcouru 2 000 kilomètres pendant ce mois et qu’il parcourt habituellement 15 000 kilomètre par an tous véhicules automobiles confondus.

Nos fins limiers en tirent immédiatement la conclusion que notre conducteur commet un dépassement de vitesse tous les 500 kilomètres et qu’il a donc commis …30 dépassements de vitesse pendant l’année écoulée. Mathématiquement imparable!

Le calcul est vite fait : 30 dépassements de vitesse à 135 euros et 2 points de retrait par dépassement – votre compte est bon mon gaillard : 4 050 euros d’amendes et retrait du permis.

Je n’ose imaginer le tollé ! Manifestations, pétitions, grève des P.V. Que sais-je !

Et l’on aurait raison !

Comment des éléments statistiques pourraient-ils être des éléments de preuve ?

Juridiquement, la preuve est l’établissement de la réalité d’un fait ou de l’existence d’un acte juridique.La preuve est « ce qui persuade l’esprit d’une vérité » (Jean DOMAT, livre III des Lois civiles).

Or la vraisemblance statistique n’est pas constat de la réalité du fait et l’on ne saurait sans rire se référer à l’article 427 du code de procédure pénale selon lequel “Hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve” pour prétendre qu’un modèle statistique constitue un tel mode de preuve.
Et pourtant !
Et pourtant, le Guide du contrôle externe régional (Version 1.3 – 1er août 2007) en matière de T2A indique p.37 :
« Si le contrôle est réalisé dans l’objectif d’appliquer une sanction financière, et s’il porte sur une partie de l’activité définie, conformément au décret du 16 mars 2006, le tirage au sort est nécessaire.
Il devra porter sur la sélection de au moins 100 dossiers nécessaires (mais suffisants) au contrôle de facturation d’une prestation donnée. Ce nombre de 100 dossiers permet à la fois :
* d’assurer le calcul du taux de surfacturation sur un nombre de dossiers statistiquement suffisant,
* d’avoir la quasi certitude d’identifier au moins une anomalie dans l’échantillon, même en cas de ciblage peu efficace,
* de tenir compte de la charge de travail des médecins contrôleurs ».
Une notule de bas de page précise « On peut contrôler plus de 100 séjours dans l’objectif de la récupération des indus, mais 100 séjours suffisent dans l’optique de la sanction ».
Et page 78, on apprend que selon une analyse statistique réalisée par le service statistique de la direction du service médical de la CNAM-TS: « Une taille d’échantillon fixée à 100 dossiers permet, d’une part, de maintenir la charge de travail des médecins contrôleurs dans une mesure acceptable, et d’autre part, d’assurer une validité statistique suffisante aux résultats qui en sont extraits.
Sur le plan statistique, un échantillon de 100 individus permet d’obtenir une précision inférieure à plus ou moins 10% autour d’un taux d’anomalies de 30% par exemple ».
Mais il est vrai que « La statistique a démontré que la mortalité dans l’armée augmente sensiblement en temps de guerre » (Alphonse Allais, dans Le Chat noir – 11 Janvier 1890).
Alors, la statistique est incontestable, n’est-ce pas !
A moins que le juge ne vienne y mettre bon ordre, pourquoi ne pas envisager de déterminer un échantillon d’établissements stable permettant de déterminer simplement chaque année le volume global de dérives et partant d’indus et de sanction ?
Tout ceci ne serait que risible s’il n’y avait pas à la clé des répétitions “d’indus” et des sanctions de plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de milliers d’euros.