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Les faits ayant donné lieu à l’arrêt rendu par le Conseil d’Etat en date du 11 février 2015 (n° 368990) sont classiques. En effet, le 19 avril 2000, Monsieur B a subi au sein d’un centre hospitalier une opération destinée à mettre en place une prothèse intermédiaire de la hanche. Devant la persistance de douleurs, des prélèvements ont été effectués le 7 décembre 2000, mettant en évidence une infection par un streptocoque B.

 

Cette infection ayant entraîné une invalidité permanente évaluée à 10 %, Monsieur B a recherché la responsabilité du centre hospitalier. Si le Tribunal administratif a rejeté les demandes de Monsieur B, la Cour administrative d’appel a, après avoir sollicité un avis technique, infirmé le jugement et, reconnaissant l’existence d’une infection nosocomiale, condamné le centre hospitalier à verser diverses sommes à Monsieur B et à la CPAM.

 

En premier lieu, l’arrêt s’est prononcé sur la recevabilité de l’appel interjeté à l’encontre du jugement rendu par le Tribunal administratif par Monsieur B qui, au moment de l’appel était placé en curatelle renforcée. En effet, il rappelle sur le fondement de l’article 468 du Code civil que « La personne en curatelle ne peut, sans l’assistance du curateur, conclure un contrat de fiducie ni faire emploi de ses capitaux. / Cette assistance est également requise pour introduire une action en justice ou y défendre ». Au cas d’espèce, le Conseil d’Etat note que le curateur de Monsieur B avait autorisé son appel.

 

En deuxième lieu, le Conseil d’Etat a rappelé les conditions d’engagement de la responsabilité d’un établissement de santé au titre des infections nosocomiales contractées avant l’entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002 : « 5. Considérant que l’introduction accidentelle d’un germe microbien dans l’organisme d’un patient lors d’une hospitalisation antérieure à l’entrée en vigueur des dispositions relatives à la réparation des infections nosocomiales issues de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé révèle une faute dans l’organisation ou le fonctionnement du service hospitalier et engage la responsabilité de celui-ci ».

 

Néanmoins, l’élément essentiel de l’arrêt se situe dans la précision selon laquelle : « qu’il en va toutefois autrement lorsqu’il est certain que l’infection, si elle s’est déclarée à la suite d’une intervention chirurgicale, a été causée par des germes déjà présents dans l’organisme du patient avant l’hospitalisation, ou encore lorsque la preuve d’une cause étrangère est rapportée par l’établissement de santé ; (…) qu’en se fondant ainsi sur un faisceau d’éléments pour affirmer que le germe avait été introduit dans l’organisme du patient lors de l’intervention du 19 juin 2000, la cour n’a pas commis d’erreur de droit ; que la simple possibilité que l’infection ait présenté un caractère endogène n’était pas de nature à faire obstacle à l’engagement de la responsabilité du service public hospitalier ».

 

En d’autres termes, pour se défaire de sa responsabilité au titre d’une infection nosocomiale contractée à l’occasion d’une intervention chirurgicale antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 4 mars 2002, le centre hospitalier doit démontrer que l’infection a été causée par des germes déjà présents dans l’organisme avant l’hospitalisation (la simple probabilité étant insuffisante) ou apporter la preuve d’une cause étrangère.  

 

En dernier lieu, le Conseil d’Etat a rappelé la « méthodologie » à suivre s’agissant du recours subrogatoire d’un organisme de sécurité sociale. La pension d’invalidité ayant pour objet exclusif de réparer les pertes de revenus professionnels et l’incidence professionnelle de la victime, « il appartenait aux juges du fond de déterminer, en premier lieu, si M. B… avait subi, du fait de l’infection contractée au centre hospitalier (…), des pertes de revenus professionnels et une incidence professionnelle et, dans l’affirmative, d’évaluer ces postes de préjudice sans tenir compte, à ce stade, du fait qu’ils donnaient lieu au versement d’une pension d’invalidité ; que, pour déterminer ensuite dans quelle mesure ces préjudices étaient réparés par la pension, il y avait lieu de regarder cette prestation comme réparant prioritairement les pertes de revenus professionnels et, par suite, comme ne réparant tout ou partie de l’incidence professionnelle que si la victime ne subissait pas de pertes de revenus ou si le montant de ces pertes était inférieur au capital représentatif de la pension ; que, dès lors que l’infection engageait l’entière responsabilité du centre hospitalier, le montant intégral des pertes de revenus et de l’incidence professionnelle devait être mis à sa charge ; que la victime devait se voir allouer, le cas échéant, une somme correspondant à la part de ces postes de préjudice non réparée par la pension ou par des indemnités journalières, le solde étant versé à la CPAM de Haute Corse ».