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La constitution de pôles de santé avec reconstruction à la clef a été souvent l’occasion de soutenir économiquement des cliniques privées lucratives en perte de vitesse.

L’Etat n’a pas hésité à demander à des gestionnaires d’établissements publics de santé de commettre des illégalités en construisant des locaux et en prenant en charge une grande partie des coûts.

C’est ce que mettent en lumière plusieurs rapports des Chambres Régionales des comptes, au moment même où des instructions interministérielles invitent les comptable hospitalier à dénoncer le mondre dérapage…

Ø        CRC Lorraine, 9 septembre 2009, Centre hospitalier « Jeanne d’Arc » de Bar-le-Duc

Le rapprochement avec la polyclinique du Parc, qui s’est matérialisé par la construction, par l’hôpital et sur son emprise, de nouveaux locaux pour la polyclinique et d’un bloc opératoire commun géré par un groupement de coopération sanitaire (GCS), n’est pas sans soulever certaines questions.
(…)
La redevance versée par la polyclinique a été ainsi calculée au regard de sa capacité contributive et non pas de l’équilibre financier de l’opération immobilière, celle-ci ne s’équilibrant que par une subvention de l’Agence régionale de l’hospitalisation. La chambre observe que cette minoration de la redevance de la polyclinique peut s’analyser comme une aide publique indirecte, aide qui ne relève pas de la compétence des établissements publics de santé, contrairement à la possibilité laissée aux collectivités territoriales aux termes des articles L. 1511-1 et suivants du code général des collectivités territoriales. Cette aide indirecte apparaît également de nature à fausser le jeu de la libre concurrence et donc susceptible d’être censurée par le juge européen. De plus, le dispositif de réévaluation de la redevance versée par la polyclinique ne permet qu’une réévaluation annuelle à partir de la huitième année de versement sur la base de 0,5 % par an de majoration fixe et 50 % de l’indice annuel des coûts à la construction sans que la somme des deux ne puisse excéder 1,5 %.

La convention d’occupation du domaine public signée entre l’hôpital et la polyclinique a également été conclue sans limitation de durée, ce qui est contraire à l’article L. 2122-2 du code général de la propriété des personnes publiques. De plus la convention prévoit, dès la trente et unième année, une mise à disposition exclusive des locaux à la polyclinique sans versement de redevance. Les locaux de la polyclinique restent donc propriété de l’hôpital mais celui-ci ne bénéficie plus de participation de la polyclinique pour en assumer le gros entretien. Il s’agit là aussi d’une aide économique indirecte accordée à la polyclinique.
Enfin, cette opération immobilière fait courir un risque financier à l’établissement en raison de l’augmentation possible de la charge des emprunts à taux variable souscrits dans le cadre de cette opération.



Ø        CRC Bretagne, 7 juillet 2010, Centre hospitalier de Dinan


Le principe retenu était que l’opération de construction du pôle de santé ne devait rien coûter, in fine, à l’établissement. Dans un premier temps, le coût des constructions devait être couvert par des emprunts. Ensuite, le loyer versé par la polyclinique plus une aide conséquente versée dans le cadre du plan Hôpital 2007 devaient couvrir les amortissements, les frais financiers liés aux emprunts et les actifs non amortis2. L’objectif clairement affiché était que l’opération ne devait aucunement peser sur l’autofinancement de l’établissement. Seul un léger déséquilibre de 0,6 M€ était déjà affiché.

(…)Outre le fait que l’opération n’est pas équilibrée pour l’établissement, le plan de financement présente des faiblesses notamment sur le plan juridique.

(…)Une opération financièrement intéressante pour la polyclinique
Pour un coût total de 47,5 M€, la Polyclinique du Pays de Rance finance sur la durée d’amortissement 25,7 % du total par le biais des loyers versés (12,2 M€). En revanche, elle va bénéficier d’une majorité de l’espace du nouveau bâtiment. En effet, si les services de stérilisation et d’imagerie seront partagés, sur les huit salles du bloc, six seront dédiés uniquement à la polyclinique et la totalité des 90 lits d’hospitalisation et des 27 lits d’ambulatoire seront gérés par la polyclinique. Au total, 80% de l’espace sera occupé par la polyclinique. Parallèlement, 74,3% du coût sera supporté par le secteur public.

En réalité, le montant du loyer payé par la polyclinique est un montant maximum, qui pourrait être diminué si les résultats financiers de la polyclinique du Pays de Rance sont inférieurs à
140 000 € chaque année. En effet, dans la renégociation du montant du loyer, la polyclinique a accepté de verser 170 K€ supplémentaires chaque année à partir de 2017 jusqu’en 2029 sous la forme suivante : une part fixe de 100 K€ et une part variable comprise entre 0 et 70 K€. Cette part variable qui ne peut excéder dans tous les cas 70 K€ correspond au résultat comptable de l’exercice de la polyclinique avec une franchise de 140 K€.
Or, les bénéfices de la polyclinique ont été respectivement de 125 et 130 K€ sur les exercices 2006 et 2007. Cela signifie que si les résultats restent similaires, la polyclinique n’aurait à payer que 100 K€ supplémentaires à partir de 2017. Dans cette hypothèse, et comme elle s’y est engagée dans un courrier daté du 27 juillet 2009, l’ARH se substituera à la polyclinique et versera directement au centre hospitalier la somme de 70 K€. Sur la période 2017 à 2029, et compte tenu de la revalorisation moyenne de 3% du coût du loyer, l’ARH pourrait potentiellement payer jusqu’à 1,1 M€ des 2,655 M€ du loyer complémentaire de la polyclinique. Au total, sur les 47,5 M€, la polyclinique du Pays de Rance n’aurait plus à payer que 11,1 M€, soit seulement 23,4% du coût total.

Certes, la polyclinique continuera de payer après la fin de la durée d’amortissement un loyer indexé sur l’indice du coût de la construction publié par l’INSEE mais qui sera limité au montant initial qui était fixé en 2009 à 312 K€. La Polyclinique qui n’aura plus à payer après 2029 les compléments correspondant à la période 2017-2029, n’aura pas à provisionner les sommes nécessaires à l’entretien des locaux.

La chambre observe donc qu’il s’agit d’une opération financièrement intéressante pour la polyclinique sans qu’il y ait, à l’heure actuelle, de réelle contrepartie en matière de mutualisation de services médico-techniques comme l’anesthésie ou la gestion du bloc opératoire. L’établissement précise dans sa réponse que ce partenariat a toutefois permis de maintenir localement une offre de soins en chirurgie dont profite également l’activité de médecine de l’établissement public. Par ailleurs, l’établissement et la polyclinique déclarent avoir repris en 2010 des négociations pour aboutir à une meilleure mutualisation des moyens sur le bloc opératoire et pour la permanence des soins en anesthésie.


Ø        C.R.C. Provence-Alpes-Côte d’Azur – Etablissement hospitalier public Centre hospitalier de Carpentras – 01 septembre 2004

« (…) il n’a pas été fait mystère qu’il s’est agi au premier chef de permettre au secteur privé de bénéficier de subventions indirectes au travers d’un loyer calculé sur le coût réel des parties communes après abattement de la subvention FIMHO perçue par l’hôpital ».