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Utiliser des éléments d’origine humaine pour développer des médicaments, l’idée n’est pas nouvelle. Mais lorsque l’Homme n’est plus seulement l’auteur de la recherche mais aussi son moyen, et que cela est susceptible de servir les intérêts financiers de l’industrie pharmaceutique, l’atteinte ontologique se profile et les boucliers s’élèvent.

 

C’est dans ce cadre particulier que la législation européenne a créé en 2007 de nouvelles catégories de médicaments dénommées « médicaments de thérapie innovante » (règlement n°1394/2007 du 13 novembre 2007),  qui complète le code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (directive 2001/83/CE du 6 novembre 2001).

 

En vulgarisant, on peut considérer que ces « médicaments de thérapie innovante » (médicaments de thérapie cellulaire, thérapie génique ou d’ingénierie tissulaire) intègrent dans leur composition des cellules ou tissus humains susceptible de traiter ou de prévenir une maladie, ou de restaurer, corriger, modifier des fonctions organiques.

 

La directive de 2007, relative aux « médicaments de thérapie innovante », non transposée en France, poursuit deux objectifs : la promotion de la recherche (dans laquelle l’Europe est en retard) et la protection de la santé publique.

 

Concernant la protection de la santé, elle est aujourd’hui garantie en France dans la mesure où les « médicaments de thérapie innovante » sont d’ores et déjà considérés comme des médicaments  et sont donc soumis à ce titre à la législation applicable aux médicaments (on pense notamment à l’obligation de saisir le comité de protection des personnes avant tout essai clinique, à l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché délivrée par l’ANSM pour la poursuite d’une recherche clinique relative à un médicament…).

 

L’article 37 du projet de loi de santé vise dès lors à compléter l’arsenal juridique en vue de poursuivre le premier objectif de la directive de 2007 : promouvoir la recherche en facilitant la coopération entre établissements de santé et industries pharmaceutiques.

 

Le projet de loi s’inscrit dans la continuité des engagements pris dans le cadre du contrat stratégique de filière signé le 5 juillet 2013 entre le Ministère et les industriels pour faciliter la recherche biomédicale.

 

Lors du comité stratégique, il a été constaté une augmentation du nombre de recherches biomédicales dans le domaine des dispositifs médicaux (341 en 2011 versus 214 en 2007) en raison d’un renforcement de l’évaluation clinique avant mise sur le marché.

 

Toutefois, il a également été fait le constat que la contractualisation entre les industriels et les établissements de santé n’était pas aisée, la négociation aboutissant soit à une situation de blocage mettant ainsi un coup d’arrêt au projet de recherche, soit à des conventions hétérogènes sur le territoire nationale.

 

Pour favoriser l’attractivité de la recherche biomédicale en France, le Ministère a entendu mettre en place un environnement administratif attractif et simple. L’objectif est de fixer par arrêté un contrat type applicable à toute recherche biomédicale.

 

Que devra contenir ce contrat ? En l’état, une seule disposition est envisagée (ce qui devrait conduire à la reconnaissance de son caractère substantiel) : le contrat devra préciser les conditions de prise en charge des surcoûts liés à la recherche.

 

Est-ce à dire que les parties sont libres de définir les conditions susvisées ?

 

Non, et c’est plutôt là qu’est la révolution ! Le projet de loi envisage in fine  d’uniformiser le régime applicable aux produits et aux médicaments dans le cadre d’une recherche biomédicale.

 

Actuellement, l’article R.1121-4 du code de santé publique dispose que  « Pour les recherches biomédicales portant sur des produits autres que les médicaments, les produits faisant l’objet de la recherche sont fournis gratuitement, ou mis gratuitement à disposition pendant le temps de la recherche par le promoteur, sauf dans les cas où la loi en dispose autrement.

 

Le promoteur prend en charge les frais supplémentaires liés à d’éventuels fournitures ou examens spécifiquement requis par le protocole de la recherche ou pour la mise en œuvre de celui-ci. Lorsque la recherche est réalisée dans un établissement de santé, la prise en charge de ces frais fait l’objet d’une convention conclue entre le promoteur et le représentant légal de cet établissement ».

 

L’article 37 du projet de loi veut revenir sur ce régime dérogatoire. Dorénavant, cette disposition sera aussi applicable aux médicaments, et partant aux « médicaments de thérapie innovante ».

 

Ainsi, le contrat conclu entre le promoteur et l’établissement de santé devra prévoir, sans possibilité de dérogation, que la fourniture ou la mise à disposition à titre gracieux par le promoteur des produits faisant l’objet de la recherche, ainsi que la prise en charge des frais supplémentaires liés à d’éventuels fournitures ou examens spécifiquement requis par le protocole de recherche.

 

Affirmer ce point devrait très certainement favoriser les contractualisations qui ont pu être paralysées. La réforme envisagée apparaît donc comme une première pierre à l’édifice. Reste à sanctuariser, dans le cadre de ce contrat type, les droits de propriété intellectuelle applicable à la recherche, ou encore les conditions de perception des honoraires investigateurs pour répondre aux exigences posées par la loi n°2011-2012 en matière de transparence des liens d’intérêts.