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La nécessité de louer une salle de 4.800 m² afin d’accueillir les quelques 5.250 plaignantes lors de l’ouverture du procès des prothèses PIP aura-t-elle influencé le pouvoir législatif ?

La question se pose à la lecture de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, prise afin de restaurer la confiance des consommateurs. Celle-ci instaure notamment une action de groupe, plus de 170 ans après les Etats-Unis et encore bien plus longtemps après nos voisins anglo-saxons (Stephen C. Yeazell « From Medieval Group litigation to the Modern Class Action » 1987).

La nouvelle loi met en place une procédure en trois temps : 1°. Mise en jeu devant une juridiction civile de la responsabilité du professionnel par une association agréée de consommateurs (actuellement 16) ; 2°. Information des consommateurs et indemnisation de leur préjudice ; 3°. Nouvelle phase judiciaire pour statuer sur les éventuelles difficultés.

Ainsi, l’article L. 423-1 du Code de la consommation dispose qu’ « une association de défense des consommateurs représentative au niveau national et agréée (…) peut agir devant une juridiction civile afin d’obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des consommateurs placés dans une situation similaire ou identique et ayant pour cause commune un manquement d’un ou des mêmes professionnels à leurs obligations légales ou contractuelles à l’occasion de la vente de biens ou de la fourniture de services (…) ».

Mais qu’en est-il de la santé ?

Les professionnels de santé ne sont-ils pas soumis à une obligation de sécurité de résultat s’agissant des produits et matériels utilisés (civ. 1ère, 7 novembre 2000 en matière de médicaments par exemple) ?

Cependant, l’article L. 423-1 du Code de la consommation poursuit ainsi : « l’action de groupe ne peut porter que sur la réparation des préjudices patrimoniaux résultant des dommages matériels subis par les consommateurs ». Ainsi, le préjudice pris en compte ne peut être qu’un manque à gagner ou une perte d’argent. Les travaux parlementaires s’avèrent particulièrement éclairants sur ce point. Le domaine de la santé, ainsi que celui de l’environnement, sont exclus du champ de l’action de groupe au motif que dans ces domaines, les préjudices ne sont pas uniquement matériels ; ils sont aussi potentiellement corporels et moraux. Or, l’évaluation de tels préjudices ne peut être qu’individuelle.

L’action de groupe adoptée n’est donc pas à la hauteur des attentes des consommateurs, et ne résorbe pas le retard accumulé notamment au regard de la class action américaine. En effet, une telle action a été mise en œuvre outre Atlantique en particulier à l’encontre de l’Isoméride, médicament cousin du Mediator, retiré du marché après l’annonce d’effets secondaires graves (on lui attribue le décès de plusieurs dizaines de milliers de personnes et le handicap de nombreuses autres). L’action de groupe a abouti à la condamnation du laboratoire à payer 14,7 milliards de dollars aux familles.

En France, le patient n’est donc pas (pas encore ?) un consommateur comme les autres alors qu’il s’agit bien d’une personne physique qui n’agit pas à des fins qui entrent dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale. Que les victimes se rassurent, ce premier coup d’épée dans l’eau ne devrait-il pas être résorbé prochainement par la proposition de loi en date du 14 janvier 2014 visant à étendre l’action de groupe aux questions environnementales et de santé ?

 

Liselotte LARUE

Elève-avocat

 

« Mlle Sanchez : On ne va pas se leurrer. 20 millions de dollars, c’est plus d’argent que ces gens ne pourraient jamais rêver.

Erin : Alors, ça, ça m’fait vraiment chier. Premièrement, depuis la demande de non-lieu, on a réuni plus de 400 demandeurs.  On ne va pas se leurrer : nous savons tous qu’il y en a d’autres. C’est peut-être pas les gens les plus sophistiqués du monde mais ils savent diviser et 20 millions de dollars, c’est quedal une fois que tout le monde a eu sa part.

Ed : Erin… Le meeting

Erin : Et deuxièmement, ces gens-là ne rêvent pas de s’enrichir. Ils rêvent de voir leurs enfants jouer, leurs petites-filles se baigner sans craindre qu’elles aient à subir une hystérectomie à l’âge de 20 ans, comme Rosalia, l’une de nos clientes, ou que leur colonne vertébrale se détériore comme Stanley Bloom, un autre de nos clients. Alors, avant de nous emmerder avec vos simulacres d’offres, réfléchissez à ce que vaut votre colonne vertébrale, M. Walker, ou combien vous voudriez qu’on vous paie votre utérus, Mlle Sanchez, puis vous sortez votre calculette et vous multipliez tout ça par 100. En dessous de ce chiffre-là, c’est notre temps que vous nous faites perdre ».

Extraits du film « Erin Brockovich, seule contre tous » de Steven Soderbergh avec Julia Roberts et Albert Finney (avril 2000).