Selon l’information diffusée depuis deux jours, la ministre de la santé aurait donné instruction au directeur général de l’Etablissement public de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) de résilier unilatéralement, pour “motif d’intérêt général”, les commandes de vaccins contre la grippe A(H1N1) à hauteur de 50 millions de doses sur les 94 millions initialement commandées.
Une telle décision pourra-t-elle réduire la dépense publique d’ores et déjà engagée ? Rien n’est moins sûr.
En effet, on ne peut que rappeler qu’une fois qu’un marché public est notifié, l’entreprise a l’obligation de réaliser les prestations pour lesquelles elle s’est engagée dans l’acte d’engagement.
En revanche, l’acheteur public a la possibilité, s’il estime que « l’intérêt général » est en jeu, de résilier le marché à tout moment, même en l’absence de faute du titulaire (CE, Assemblée, 2 mai 1958, Distillerie de Magnac-Laval). Il s’agit là de l’un des principes fondamentaux du droit des contrats administratifs qui résulte d’une jurisprudence constante et particulièrement ancienne (CE, 17 mars 1864, Paul Dupont).
Une incertitude économique pèse donc sur le titulaire qui doit mobiliser des moyens humains et financiers. Cette incertitude doit donc trouver une contrepartie. C’est pourquoi, si un marché public est résilié pour un motif d’intérêt général, il est possible pour le titulaire de ce marché d’être indemnisé : « Considérant, toutefois, que, si la cour a pu, sans erreur de droit, exclure du préjudice indemnisable la valeur des matériels et des prestations non conformes au marché, elle ne pouvait, en revanche, après avoir constaté que la résiliation du marché était intervenue pour un motif d’intérêt général et non en raison des fautes reprochées par le centre hospitalier à la société requérante, exclure aussi le manque à gagner subi du fait de la non exécution du contrat pendant la première année et de la perte de chance sérieuse de voir le marché renouvelé pour les deux années suivantes ; » (CE, 9 novembre 2007, n°264422, SARL Gaz technique de France c/ Centre hospitalier intercommunal d’Elbeuf).
Cette indemnité est fixée par référence au prix du contrat en cas de résiliation unilatérale en cours d’exécution du marché (CE, 27 octobre 1978, Ville de Saint Malo). Il s’agit de respecter le principe fondamental du droit du partenaire contractuel de la personne publique à l’équilibre financier du contrat.