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Ces dispositions viennent se substituer au « service territorial de santé » proposé initialement dans le projet de loi.

 1/ Rappel des dispositions

 

Les articles 12 et 12 bis créent deux nouveaux modes d’organisation des soins :

– l’équipe de soins primaires, rassemblant des professionnels de santé autour de médecins généralistes de premier recours ;

– la communauté professionnelle territoriale de santé, réunissant des acteurs assurant des soins de premier et de second recours, du secteur médico-social et social ; elle a vocation à se substituer au pôle de santé défini à l’article L.6323-4 CSP (dont il est prévu l’abrogation des dispositions).

 

Les objectifs poursuivis par le législateur sont :

– concernant l’équipe de soins primaires, d’affirmer la place du médecin généraliste dans le parcours de soins du patient et de contribuer à la structuration du parcours de santé des patients en coordination avec les acteurs de premier recours, dans une optique de prise en charge des besoins de soins non programmés et de coordination des soins ;

– concernant la communauté professionnelle territoriale de santé, de concourir à l’amélioration de la prise en charge des patients dans un souci de continuité, de cohérence, de qualité et de sécurité par la mise en place d’un projet médical commun initié par des professionnels de santé.

 2/ Analyse

 

L’équipe de soins primaires est un mode d’organisation non structurel des professionnels de santé de premier recours. Il s’agit du « premier étage » de la pyramide mise en place par le projet de loi pour restructurer l’offre de soins, à l’instar des centres de santé et des maisons de santé.

 

Cependant, l’article 12 prévoit que l’équipe de soins primaire « peut prendre la forme d’un centre de santé ou d’une maison de santé ». On émettra dès lors trois réserves :

 

– d’une part, le centre de santé ou la maison de santé sont des modes d’organisation et non des formes juridiques à part entière (association, SCM, SISA…). Il ne peut donc être soutenu que l’équipe de soins primaires peut prendre « la forme d’un centre de santé ou d’une maison de santé » ;

– d’autre part, la création d’un nouveau mode d’organisation est susceptible de faire naître une confusion dans l’esprit des professionnels de santé. Au regard des dispositions encadrant les centres de santé et les maisons de santé, il appert que ce sont ces entités qui assurent les activités de soins. L’objectif de l’équipe de soins primaires semble différent puisque l’article 12 précise que ce sont les professionnels qui assurent les soins « sur la base d’un projet de santé qu’ils élaborent ». D’aucun pourrait dès lors penser que l’équipe de soins primaires aurait vocation à regrouper des professionnels qui ne souhaitent pas créer une structure commune. Pour autant, l’article 12 bis prévoit que les communautés professionnelles territoriales de santé sont composées « de professionnels de santé regroupés, le cas échéant, sous la forme d’une ou de plusieurs équipes de soins primaires ». On doit en déduire que l’équipe de soins primaires est susceptible de se confondre avec les centres de santé et les maisons de santé qui, chacun en ce qui les concerne, doivent assurer les soins dans le respect d’un projet de santé (centre de santé) ou d’un projet médical commun (obligatoirement annexé aux statuts de la maison de santé lorsqu’elle prend la forme d’une SISA). On ne peut donc que s’interroger sur la pertinence d’un tel mécanisme.

Enfin, si l’on estime que l’équipe de soins primaires est susceptible de regrouper des professionnels de santé sans adopter une forme juridique spécifique, comment les professionnels pourraient-ils prétendre au versement de financement de l’enveloppe « Fonds d’intervention Régional » notamment en ce qui concerne la coordination des soins ? L’intérêt d’une telle mesure serait donc limité pour les professionnels de santé.

 

La communauté professionnelle territoriale de santé constitue le « second étage » de la pyramide des soins. Bien que se substituant au pôle de santé, elle s’en différencie vivement :

 

– Par son objet : alors que les pôles de santé « assurent des activités de soins de premier recours au sens de l’article L.1411-11, le cas échéant de second recours au sens de l’article L.1411-12, et peuvent participer aux actions de prévention, de promotion de la santé et de sécurité sanitaire prévues par le schéma mentionné à l’article L.1434-5 », le rôle de la communauté professionnelle territoriale de santé n’est aucunement définie par l’article 12 bis. Il s’agit simplement d’un mode de regroupement de professionnels autour d’un projet de santé commun établi à l’initiative des professionnels. Chacun poursuit en ce qui le concerne son activité, la communauté n’ayant vocation qu’à coordonner l’action de chacun, sans pour autant, en l’absence de définition, qu’elle n’assure une activité commune. Il en ressort que la communauté professionnelle territoriale de santé n’a pas vocation à porter les actions de prévention, de promotion de la santé…, ce qui devrait nous conduire à conclure qu’elle ne dispose pas de la personnalité morale. Cela ferait obstacle à ce que les professionnels disposent de fonds financiers pour poursuivre ces activités.

– Par sa composition : les pôles de santé pouvaient être constitués seulement de professionnels de santé, et le cas échéant de maisons de santé, centres de santé, réseaux de santé, établissement de santé, établissements et services médico-sociaux, GCS et GCSMS. Dorénavant, la communauté professionnelle territoriale de santé est composée de professionnels de santé, d’acteurs assurant des soins de premier ou de second recours, d’acteurs médico-sociaux et sociaux. Il existe moins de souplesse que pour la constitution d’un pôle de santé. A tout le moins, la rédaction proposée ne reflète pas l’esprit poursuivi par les députés (cf rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi relatif à la santé).

 3/ Préconisations – proposition de rédaction 

– Supprimer l’équipe de soins primaires ou à tout le moins, la distinguer des centres de santé et maisons de santé :

 Si le législateur entend maintenir l’équipe de soins primaires, il est proposé que ce mode d’organisation non structurelle ne se confonde pas avec les centres de santé et les maisons de santé afin de permettre aux professionnels de santé qui ne souhaiteraient pas se regrouper sous une structure commune, de pouvoir mettre en œuvre un projet médical commun. Dans cette hypothèse, il pourrait être envisagé la signature d’une charte valant projet médical commun, transmise à l’ARS, pour justifier l’existence d’une équipe de soins primaires. On soulignera cependant qu’à notre sens, ce mode d’organisation risquerait de ne pas être suffisamment attractif pour les professionnels de santé car il ne permettrait pas de percevoir de rémunérations complémentaires pour la coordination des soins. Pour les professionnels réunis en maison de santé, la constitution d’une équipe de soins primaires ne présenterait aucune utilité car elle viendrait se confondre avec la maison de santé qui repose nécessairement sur un projet médical commun. Il s’agirait donc d’un choix sémantique. Nous nous positionnons en faveur de la suppression de cette disposition qui n’a pour seul objectif que d’affirmer que l’initiative de la structuration provient des professionnels de santé de premier recours.

 

– Faire de la communauté professionnelle territoriale de santé un acteur de la coordination, au même titre que l’actuel pôle de santé

 Par l’avènement de la communauté professionnelle territoriale de santé, le législateur opère un recul par rapport au pôle de santé. La composition de la communauté professionnelle territoriale de santé devrait être plus souple afin d’éviter tout blocage dans sa constitution. Il est en effet difficile de mobiliser des professionnels de santé, des établissements de santé, des établissements médico-sociaux, et des acteurs sociaux autour d’un même projet. Une constitution trop rigide supposant la réunion de chacun de ces acteurs serait susceptible de constituer un frein à l’avènement des communautés professionnelles territoriales de santé. Il est à ce titre proposé de reprendre les dispositions du pôle de santé sur la composition en indiquant que la communauté professionnelle territoriale de santé est composée d’acteurs du domaine sanitaire de premier recours et le cas échant des acteurs du domaine sanitaire de second recours, d’acteurs médico-sociaux et d’acteurs sociaux. De la même manière, la communauté professionnelle territoriale de santé devrait porter elle-même les actions de prévention, d’éducation thérapeutique et de coordination et ne pas se limiter à coordonner les acteurs. Elle doit pouvoir disposer de la personnalité morale afin de pouvoir contractualiser avec les ARS.

 

– Ouvrir le débat sur les acteurs pouvant constituer une équipe de soins primaires, une maison de santé, ou une communauté professionnelle territoriale de santé

 Pa ailleurs, la présente révision législative serait l’occasion de s’interroger sur la restriction faite quant à la composition des maisons de santé et des communautés professionnelles territoriales de santé qui ne peuvent comprendre que des professionnels de santé. Or, on s’aperçoit qu’usuellement, des professionnels qui ne sont pas des professionnels de santé au sens du CSP participent activement aux projets médicaux communs (psychologue, psychanalyste, ostéopathe). Leur exclusion constitue un frein à la constitution de structure de regroupement alors qu’ils collaborent depuis toujours aux parcours de soins des patients, en lien avec les professionnels de santé. Il serait utile de s’interroger sur l’élargissement des structures susvisées à ces professionnels pour correspondre pleinement aux situations rencontrées sur le terrain.

 

– Adopter une sémantique uniforme

 Enfin, la lecture du code de la santé publique permet de constater une absence d’uniformité dans les termes employés susceptible d’être confirmée par l’adoption du projet de loi.

 

Ainsi, les centres de santé se constituent autour d’un « projet de santé », les maisons de santé doivent élaborer et joindre à leurs statuts un « projet médical commun ». Or, les équipes de soins primaires ont vocation à élaborer un « projet de santé », tout comme les communautés professionnelles territoriales de santé.

 En pratique, « projet de santé » et « projet médical commun » ont vocation à poursuivre le même objectif. Sauf à considérer qu’ils ne peuvent se confondre, une clarification sémantique serait dès lors justifier.

 

Proposition de rédaction :

 

NB : Il n’est présenté que les dispositions dont il est envisagé une modification.

 

ARTICLE 12

 

Texte adopté par l’Assemblée Nationale

Proposition de modification

(nouveau). – Après l’article L. 1411-11 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1411-11-1 ainsi rédigé :

 

« Art. L. 1411-11-1. – Une équipe de soins primaires est un ensemble de professionnels de santé constitué autour de médecins généralistes de premier recours, choisissant d’assurer leurs activités de soins de premier recours définis à l’article L. 1411-11 sur la base d’un projet de santé qu’ils élaborent. Elle peut prendre la forme d’un centre de santé ou d’une maison de santé.

 

« L’équipe de soins primaires contribue à la structuration des parcours de santé, mentionnés à l’article L. 1411-1, des usagers. Son projet de santé a pour objet, par une meilleure coordination des acteurs, la prévention, l’amélioration et la protection de l’état de santé de la population, ainsi que la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé. »

 

 

 

 

 

 

« Art. L. 1411-11-1. – En l’absence de regroupement au sein d’une structure commune, des professionnels de santé et des professionnels intervenant dans le parcours de soins de premier recours des patients peuvent se réunir autour de médecins généralistes de premier recours, afin de définir ensemble un projet de santé auquel ils entendent adhérer.

 

Le projet de santé vise à améliorer la structuration des parcours de santé des usagers, mentionnés à l’article L. 1411-1, afin d’améliorer l’état de santé de la population et réduire les inégalités sociales et territoriales de santé.

 

Le projet de santé précise les modalités d’exercice des activités de soins de premier recours définis à l’article L. 1411-11 des professionnels et favorise une meilleure coordination des acteurs.

 

En cas de regroupement des professionnels au sein d’un centre de santé ou d’une maison de santé, le projet de santé visé aux alinéas précédents constitue le projet de santé du centre de santé ou le projet médical commun de la maison de santé. »

 

 

 


ARTICLE 12 BIS

 

 

Texte adopté par l’Assemblée Nationale

 

 

Proposition de modification

« Art. L. 1434-11. – Afin d’assurer une meilleure coordination de leur action et ainsi concourir à la structuration des parcours de santé mentionnés à l’article L. 1411-1 et à la réalisation des objectifs du projet régional de santé mentionné à l’article L. 1434-1, des professionnels de santé peuvent décider de se constituer en communauté professionnelle territoriale de santé.

« La communauté professionnelle territoriale de santé est composée de professionnels de santé regroupés, le cas échéant, sous la forme d’une ou de plusieurs équipes de soins primaires, d’acteurs assurant des soins de premier ou de second recours, définis, respectivement, aux articles L. 1411-11 et L. 1411-12 et d’acteurs médico-sociaux et sociaux concourant à la réalisation des objectifs du projet régional de santé.

 

« Les membres de la communauté professionnelle territoriale de santé formalisent, à cet effet, un projet de santé, qu’ils transmettent à l’agence régionale de santé.

« Le projet de santé précise en particulier le territoire d’action de la communauté professionnelle territoriale de santé.

 

 

 

 

 

 

 

« À défaut d’initiative des professionnels, l’agence régionale de santé prend, en concertation avec les unions régionales des professionnels de santé et les représentants des centres de santé, les initiatives nécessaires à la constitution de communautés professionnelles territoriales de santé.

 

« Art. L. 1434-12. – Pour répondre aux besoins identifiés dans le cadre des diagnostics territoriaux mentionnés au III de l’article L. 1434-9 et sur la base des projets de santé des équipes de soins primaires et des communautés professionnelles territoriales de santé, l’agence régionale de santé peut conclure des contrats territoriaux de santé.

 

 

« Le contrat territorial de santé définit l’action assurée par ses signataires, leurs missions et leurs engagements, les moyens qu’ils y consacrent et les modalités de financement, de suivi et d’évaluation. À cet effet, le directeur général de l’agence régionale de santé peut attribuer des crédits du fonds d’intervention régional mentionné à l’article L. 1435-8.

 

 

 

« Le contrat territorial de santé est publié sur le site de l’agence régionale de santé afin de permettre aux établissements de santé publics et privés, aux structures médico-sociales, aux professions libérales de la santé et aux représentants d’associations d’usagers agréées de prendre connaissance des actions et des moyens financiers du projet.

 

« Les équipes de soins primaires et les acteurs des communautés professionnelles territoriales de santé peuvent bénéficier des fonctions des plates-formes territoriales d’appui à la coordination du parcours de santé complexe prévues à l’article L. 6327-2. » ;

 

 « Art. L. 1434-11. – La communauté professionnelle territoriale de santé peut assurer des soins de premier recours, des soins de second recours et des actions de prévention, de promotion de la santé et de sécurité sanitaire prévues par le schéma mentionne à l’article L.1434-5.

 

La communauté professionnelle territoriale de santé est composée d’acteurs assurant des soins de premier définis à l’article L.1411-11, et le cas échéant , d’acteurs assurant des soins de second recours définis à l’article L.1411-12, d’acteurs médico-sociaux et sociaux concourant à la réalisation des objectifs du projet régional de santé, ainsi que de psychologues, psychothérapeutes, ostéopathes.

 

 

 

 

Les membres de la communauté professionnelle territoriale de santé élaborent un projet de santé, le cas échant sur la base du projet de santé établi par les professionnels libéraux réunis ou non en centre de santé ou maison de santé, permettant notamment de favoriser la réalisation des objectifs du projet régional de santé mentionné à l’article L.1434-1 et d’améliorer le parcours de soins du patient. Le projet de santé est transmis pour information à l’agence régionale de santé. Il précise notamment le territoire d’action de la communauté professionnelle territoriale de santé.

 

« L’agence régionale de santé peut, en concertation avec les unions régionales des professionnels de santé et les représentants des centres de santé, proposer à des professionnels la constitution de communautés professionnelles territoriales de santé

 

 

 

« Art. L. 1434-12. – Pour répondre aux besoins identifiés dans le cadre des diagnostics territoriaux mentionnés au III de l’article L. 1434-9 et sur la base des projets de santé et projets de santé de territoire, les centres de santé, les maisons de santé et les communautés professionnelles territoriales de santé, peuvent conclure avec l’agence régionale de santé des contrats territoriaux de santé.

 

« Le contrat territorial de santé définit l’action assurée par ses signataires, leurs missions et leurs engagements, les moyens qu’ils y consacrent et les modalités de financement, de suivi et d’évaluation. À cet effet, le directeur général de l’agence régionale de santé peut attribuer des crédits du fonds d’intervention régional mentionné à l’article L. 1435-8. Ces fonds ne sauraient être entendus comme des honoraires.

 

 

« Le contrat territorial de santé est publié sur le site de l’agence régionale de santé afin de permettre aux établissements de santé publics et privés, aux structures médico-sociales, aux professions libérales de la santé et aux représentants d’associations d’usagers agréées de prendre connaissance des actions et des moyens financiers du projet.

 

« Les centres de santé, les maisons de santé et les communautés professionnelles territoriales de santé peuvent bénéficier des fonctions des plates-formes territoriales d’appui à la coordination du parcours de santé complexe prévues à l’article L. 6327-2. »