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« Attendu que les clauses de non-réinstallation conclues entre professionnels de santé, susceptibles de porter atteinte tant à la liberté d’exercice de la profession qu’à la liberté de choix des patients, sont d’interprétation stricte et ne peuvent être étendues au-delà de leurs prévisions ».

Tel est le principe récemment rappelé par la Cour de cassation.

Dans le dossier soumis à son jugement, trois infirmières libérales exerçaient ensemble dans le cadre d’une convention d’exercice commun. Ce contrat contenait une clause de non-réinstallation interdisant à chaque associée rompant le contrat d’exercice en commun de s’installer sur la commune de Villenave d’Ornon pendant une période de deux ans suivant la rupture.

L’une d’elles a effectivement décidé de rompre la convention d’exercice en commun, et s’est installée dans une commune avoisinante.

Les associées restantes ont constaté que la retrayante avait effectué, avant l’expiration du délai de deux ans contractuellement prévu, des visites de patients à Villenave d’Ornon. Elles estimaient que la retrayante méconnaissait la clause de non-réinstallation.

La Cour d’appel avait suivi le même raisonnement, en estimant qu’alors même que la retrayante ne s’était pas effectivement installée sur le territoire de la commune, elle méconnaissait l’esprit de la clause de non-réinstallation en continuant d’exercer son activité principale sur ladite commune.

La Cour de cassation censure le raisonnement de la Cour. Point de référence à l’esprit de la convention, mais à sa lettre. C’est bien l’installation sur la commune qui était interdite par la clause, et non la visite de patients de la commune. Or, l’ancienne infirmière ne s’étant pas installée à Villeneuve d’Ornon, la clause de non-réinstallation n’a pas été méconnu.

Pour asseoir sa position, la Cour constate qu’aucun élément du dossier ne permet de constater que l’ancienne associée détournerait de la patientèle, les patients restant libres du choix de leur soignant.

Avec cet arrêt, la Cour de cassation rend un bel hommage à Voltaire : « Que toute loi soit claire, uniforme et précise : l’interpréter, c’est presque toujours la corrompre ».

Source : Cour de cassation, civ.1, 4 février 2015, n°13-26452