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Ne pas être retenu dans un marché, formalisé ou non, parce que l’offre est moins convaincante, que les références sont moins nombreuses ou moins éclatantes, ne pose pas de réel problème (si ce n’est d’ego…).

Ne pas être retenu parce qu’un concurrent, aux capacités similaires, propose un tarif très inférieur à ce qui se pratique habituellement, est pour le moins irritant. Et c’est de moins en moins rare…

Dans un article publié en 2007, Nil Symchowicz indiquait déjà : « Économiquement, il est aberrant de considérer que les prestations des avocats publicistes, dont les vrais spécialistes sont aujourd’hui encore en nombre très limité, peuvent valoir aux alentours de 100 euros HT de l’heure, lorsqu’on sait, si l’on prend l’exemple du barreau de Paris, que les prestations des avocats oscillent généralement entre 200 euros HT et 600 euros HT de l’heure, selon la notoriété, le degré de spécialisation et l’ampleur de leurs charges. (…) Ces pratiques de dumping, pourtant si souvent observées, ne peuvent correspondre à la valeur sincère de la prestation fournie, tout simplement parce qu’elles ne répondent pas à deux lois les plus fondamentales de l’économie de marché. D’une part, les prix des services doivent inclure l’ensemble des charges de la prestation et doivent comporter une juste rémunération du prestataire. D’autre part, plus un service est rare et spécialisé, plus il est cher. Résultat des mises en concurrence telles qu’elles sont conduites: ces deux lois sont méconnues et les prix des prestations d’avocats ultras spécialisés, souvent renommés, se rapprochent de ceux d’une heure de main-d’oeuvre d’un garagiste ou d’un coiffeur ? dont les charges sont sans commune mesure avec celles des cabinets d’avocats ? et sont très éloignés, même, des prix d’avocats généralistes » (« Choix d’un avocat : la question de confiance », La lettre du cadre territoriale, n°347, 1er novembre 2007).

Heureusement, les juridictions veillent…mais pour combien de temps ?

Ainsi, par une ordonnance du 18 février 2011 (n°1100716), le juge des référés du Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise a-t-il annulé les décisions par lesquelles la commune de Villiers-le-Bel avait décidé d’attribuer un marché à un cabinet d’avocat et enjoint à ladite commune de reprendre la procédure au stade de l’examen des offres, "Considérant qu’il résulte de l’instruction que le prix de l’offre de la société X ne correspond manifestement pas au taux horaire habituellement pratiqué par les cabinets d’avocats de ce secteur d’activités, ni même d’ailleurs au taus horaire pratiqué par le candidat lui-même sur son site internet qui fait état d’une tarification susceptible de varier de 130 à 380 euros HT, à moins d’estimer de manière extrêmement brêve le temps de travail nécessité par la rédaction d’une consultation écrite ; qu’une telle estimation aurait donc dû nécessairement interroger la commune sur les modalités en vertu desquelles la société X estimait pouvoir répondre à la charge de travail devant lui incomber en vertu dudit marché et sur les modalités de fixation du prix proposé".

Face à une telle offre paraissant anormalement basse, la commune aurait dû demander, par écrit, toutes précisions utiles afin de vérifier les justifications fournies et, le cas échéant, écarter l’offre comme étant anormalement basse.

Il est de nombreux cas où l’explication est évidente : prestataire non autorisé à fournir des conseils juridiques, associations non autorisées à intervenir dans le domaine concurrentiel, voire bénéficiant de subventions leur permettant d’afficher des tarifs très bas…

En règle générale, le service est à la hauteur du tarif ! C’est ainsi que régulièrement nous récupérons, parfois en catastrophe, des dossiers en deshérence ou les conséquences calamiteuses de conseils indadaptés ou incohérents. Il y a une justice tout de même ! Comme me le disait encore récemment Mâme Michu, ma voisine, "Mon pôvre monsieur, de nos jours, il faut être très riche pour acheter bon marché ! ".

Ou, si la prestation est de bonne qualité, le nombre d’unités d’oeuvre servant de base au calcul des honoraires (heures, jours) s’envole et l’on s’aperçoit, mais trop tard, que le tarif horaire ou journalier n’était qu’un leurre… Ah, c’est dur de s’être fait pigeonner !