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Une commission d'enquête parlementaire – la première au Sénat – vient de se pencher une nouvelle fois sur le problème des dérives sectaires, en abordant,
après l'argent (sujet de la deuxième commission de l'Assemblée nationale) et les mineurs (sujet de la commission de 2006), la question de la santé.

La commission parlementaire fait un constat particulièrement inquiétant d’où il ressort notamment :

1. Le corps et la santé sont omniprésents dans les conceptions des mouvements susceptibles de dérives sectaires. La mise en pratique de ces conceptions se traduit parfois, pour les adeptes, par de mauvais traitements qui dégradent leur état physique et mental. Elle peut aussi conduire à une privation de soins.

2. Dans certains cas, les « thérapeutes » qui pratiquent ces « soins » étranges vont au-delà de la charlatanerie et exercent une forme d'emprise qui, comme pour les mouvements susceptibles de dérives sectaires, peut aller jusqu'à la privation de soins et, parfois, à la mort.

3. Quand bien même ils s'en tiendraient à de la charlatanerie, sans que l'on puisse déceler chez leurs clients l'existence d'une influence forte comparable à cette forme d'emprise évoquant un comportement sectaire, leurs torts ne doivent pas être minimisés compte tenu de la particulière gravité de
toute escroquerie qui affecte la santé.

4. Dans tous les cas, il est impossible d'appréhender la situation des victimes si l'on s'en tient à la logique du « consentement éclairé » : des
personnes fragiles et vulnérables comme peuvent l'être les malades peuvent effectivement se laisser persuader d'adopter des comportements
irrationnels sous l'influence de promesses de guérison.

5 La commission juge très alarmant le fait que l'image de la médecine classique, dont les indéniables progrès ont permis une augmentation considérable de l'espérance de vie, soit altérée par l'inquiétude et le climat anxiogène résultant – de manière compréhensible – de scandales récents. Elle regrette que cette image perturbée puisse conduire des personnes atteintes de pathologies lourdes à s'interroger sur les propositions thérapeutiques de leur médecin pour s'en remettre à des pratiques de « soins » sans nécessairement disposer d'une information complète sur les conséquences de leur choix.

Au terme de son enquête et de son analyse, la commission fait 41 propositions dont onze propositions intéressant les établissements sanitaires ou médico-sociaux, à savoir, notamment :

– Mettre en place à l'hôpital des groupes de détection des patients susceptibles d'être victimes de dérives sectaires ou d'abandonner leurs soins en s'inspirant des actions mises en oeuvre à l'égard de victimes de violence.
– Mettre en place une accréditation par la Haute Autorité de santé des praticiens exerçant des thérapies non conventionnelles à l'hôpital.
– Rendre obligatoire la déclaration à l'agence régionale de santé (ARS), pour les professionnels de santé, de leurs pratiques non conventionnelles et mettre en place un suivi de ces pratiques par les ordres compétents.
– Mieux encadrer l'activité des psychothérapeutes en permettant aux ARS de suspendre immédiatement leur droit d'exercice dans un souci d'ordre public (cette possibilité, qui résulte de l'article L. 4113-14 du code de la santé publique, n'existe à l'heure actuelle qu'à l'égard des professions médicales : médecins, dentistes, sages-femmes) et de procéder au retrait de leur titre.
– Subordonner l'introduction de pratiques non conventionnelles à l'hôpital à un avis favorable de la commission médicale d'établissement et soumettre cet avis à une majorité renforcée.
– Intégrer la prise en compte du bien-être du patient aux protocoles de soins, selon des modalités précises, et aux objectifs des personnels administratifs ainsi qu'à l'enseignement universitaire, afin de lutter contre le sentiment de « déshumanisation des soins ».


Contenu du rapport :

I. DÉRIVES SECTAIRES ET SANTÉ : UNE INFLUENCE DANGEREUSE ……………………. 13??
A. UN RAPPEL : DÉRIVES SECTAIRES ET « NOUVELLES SPIRITUALITÉS » ……………… 13??
B. UN CONSTAT : LA CORRÉLATION ENTRE DÉRIVES SECTAIRES ET SANTÉ …………… 16??
1. La place centrale du corps et de la santé dans les dérives sectaires ……………………………….. 16??
a) Pratiques thérapeutiques …………………………………………………………………………………….. 17??
(1) Techniques de soins : les gourous thérapeutes ………………………………………………………….. 17??
(2) Pratiques hygiénistes : rituels de purification et régimes alimentaires ………………………………. 21??
b) L'importance des revendications concernant la santé et les soins dans le discours
sectaire ……………………………………………………………………………………………………………. 22??
(1) Des « minorités spirituelles » aux « minorités thérapeutiques » ……………………………………… 23??
(2) Une remise en cause profonde de la médecine classique ………………………………………………. 24??
2. Un point commun à la plupart des victimes de dérives sectaires : pouvoir
du « gourou », privation de soins et mauvais traitements …………………………………………….. 33??
C. LES « GOUROUS » GUÉRISSEURS ………………………………………………………………………….. 34??
1. L'immense marché des « soins parallèles » ……………………………………………………………….. 35??
a) Un catalogue en ligne ………………………………………………………………………………………… 35??
b) Quelques pratiques ……………………………………………………………………………………………. 36??
2. Les paradoxes de ces étranges thérapies parallèles …………………………………………………….. 45??
a) Nature, tradition et technologie : un curieux mélange ………………………………………………. 45??
b) Une allure respectable ……………………………………………………………………………………….. 46??
(1) Eléments de respectabilité ………………………………………………………………………………….. 46??
(2) Eléments de doute ……………………………………………………………………………………………. 48??
D. DÉRIVES SECTAIRES ET THÉRAPIES DÉVIANTES : DE NOMBREUX POINTS
COMMUNS, UN DANGER MAJEUR ……………………………………………………………………….. 53??
1. Ressemblances entre les dérives sectaires et le comportement de certains thérapeutes
déviants ………………………………………………………………………………………………………………. 53??
a) Des exigences financières importantes ………………………………………………………………….. 53??
b) L'argument du complot ……………………………………………………………………………………… 54??
c) Un pouvoir d'attraction certain ……………………………………………………………………………. 57??
(1) La séduction…………………………………………………………………………………………………… 57??
(2) Les promesses ………………………………………………………………………………………………… 58??
2. Une forme d’emprise exercée par le thérapeute ………………………………………………………….. 61??
a) Des personnalités transformées, parfois en rupture avec l'environnement familial ………… 61??
b) Emprise mentale exercée par le gourou et pouvoir du thérapeute déviant …………………….. 62??
(1) La force inexplicable de l'emprise exercée par le gourou …………………………………………….. 62??
(2) L'influence du thérapeute déviant sur des personnes vulnérables : une quête sans fin
de soins et de formations thérapeutiques …………………………………………………………………. 63??
3. Gourous et thérapeutes déviants à l'origine d'un danger majeur : privation de soins
et perte de chance …………………………………………………………………………………………………. 65??
a) Les effets parfois tragiques de la privation de soins …………………………………………………. 65??
b) La notion de perte de chance ………………………………………………………………………………. 66??
– 4 –
II. UN DANGER DÉMULTIPLIÉ PAR LE DÉVELOPPEMENT DES PRATIQUES
THÉRAPEUTIQUES NON CONVENTIONNELLES, PAR LA DIFFUSION
EN TOUTE LIBERTÉ D'UNE OFFRE DE SOINS NON MAÎTRISÉE SUR
INTERNET, PAR LE SOUTIEN APPORTÉ DE FACTO À LA TRANSMISSION
DE CES TECHNIQUES DANS LE CADRE DE LA FORMATION
PROFESSIONNELLE ET PAR UNE RÉPONSE GLOBALEMENT
INSUFFISANTE DES POUVOIRS PUBLICS …………………………………………………………… 71??
A. LE DÉVELOPPEMENT DES PRATIQUES THÉRAPEUTIQUES NON
CONVENTIONNELLES ………………………………………………………………………………………….. 71??
1. Pratiques non conventionnelles et médecine ………………………………………………………………. 74??
a) Terminologie ……………………………………………………………………………………………………. 74??
(1) Médecine douce, médecine naturelle, médecines non conventionnelles, médecine
alternative… ? ………………………………………………………………………………………………… 74??
(2) La médecine en France : une discipline pratiquée par les docteurs en médecine inscrits
au Conseil de l'Ordre ……………………………………………………………………………………….. 76??
b) Quel succès des pratiques non conventionnelles ? Une approche statistique à
préciser …………………………………………………………………………………………………………… 77??
(1) Un phénomène stable depuis les années 1980 …………………………………………………………… 77??
(2) Des statistiques à affiner ……………………………………………………………………………………. 79??
c) Pourquoi le succès des pratiques non conventionnelles ? ………………………………………….. 80??
(1) Pour les usagers : compenser ce qu'ils considèrent comme les défaillances
de la médecine traditionnelle ………………………………………………………………………………. 80??
(2) Pour les praticiens ……………………………………………………………………………………………. 87??
2. Les pratiques non conventionnelles : un succès fondé sur de multiples malentendus …………. 87??
a) Des risques méconnus ………………………………………………………………………………………… 88??
(1) Les dangers liés à ces pratiques ……………………………………………………………………………. 88??
(2) Les pratiques alternatives porteuses d'un danger létal …………………………………………………. 89??
b) Les pratiques non conventionnelles : des incertitudes multiples… ……………………………… 91??
(1) … sur leur nature …………………………………………………………………………………………….. 91??
(2) … sur leurs qualités………………………………………………………………………………………….. 92??
c) Un combat à armes inégales contre la médecine : les promesses de la magie
contre la rigueur de la pensée rationnelle ………………………………………………………………. 94??
3. L'officialisation des pratiques non conventionnelles, une solution peu convaincante ………… 96??
a) L'illusoire encadrement par les professionnels de santé ……………………………………………. 97??
b) L'hôpital : quelle prise en compte de la demande des patients dans l'hôpital public
en situation de crise ? ………………………………………………………………………………………… 100??
(1) Quelle rigueur dans le choix des pratiques intégrée aux soins hospitaliers ? ………………………. 100??
(2) Une question non résolue : la poursuite des soins après la sortie …………………………………….. 103??
4. Un constat aggravant : toute avancée dans la reconnaissance des pratiques
non conventionnelles conforte les défenseurs des « libertés thérapeutiques » ………………….. 107??
B. LA DIFFUSION EN TOUTE LIBERTÉ D'UNE OFFRE DE SOINS
NON MAÎTRISÉE SUR INTERNET ……………………………………………………………………….. 113??
1. Un paramètre incontournable dans l'analyse de l'influence des mouvements
susceptibles de dérives sectaires dans le domaine de la santé ……………………………………….. 113??
a) Un vecteur d'information médicale en plein essor …………………………………………………… 113??
b) Le risque en ligne ……………………………………………………………………………………………… 114??
c) Un grand marché des soins non validés en ligne ……………………………………………………… 117??
d) Une prévention insuffisante ………………………………………………………………………………… 120??
2. L'interactivité des internautes : la limite du contrôle des responsables de sites ……………….. 122??
a) Un flux d'information impossible à contrôler …………………………………………………………. 123??
b) Une déontologie variable d'un site à l'autre et une certification à améliorer ………………… 127??
3. La nécessité d'une vigilance accrue …………………………………………………………………………. 134??
a) Définir une vraie stratégie de communication des pouvoirs publics sur Internet ……………. 134??
b) Renforcer les moyens consacrés à la veille Internet et à la lutte contre la
cybercriminalité ……………………………………………………………………………………………….. 136??
– 5 –
C. LE SOUTIEN APPORTÉ DE FACTO À LA TRANSMISSION DE CES
TECHNIQUES DANS LE CADRE DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ……………… 139??
1. Un danger observé depuis près de vingt ans ………………………………………………………………. 139??
a) Un danger dénoncé par les précédentes commissions d'enquête parlementaires ……………. 139??
b) Les réformes législatives et réglementaires depuis 2000 …………………………………………… 140??
c) L'oubli du champ de l'enseignement supérieur ………………………………………………………. 143??
(1) La question des diplômes universitaires (DU) …………………………………………………………… 143??
(2) Les établissements privés …………………………………………………………………………………… 144??
2. Une menace particulière dans le domaine de la santé ………………………………………………….. 146??
a) Les secteurs du développement personnel et du bien-être particulièrement visés …………… 146??
b) Une difficulté particulière pour le contrôle : un marché éclaté en très petites
structures ………………………………………………………………………………………………………… 148??
c) Une faiblesse spécifique : la procédure de qualification des organismes
de formation …………………………………………………………………………………………………….. 149??
d) Une autre limite au contrôle : le recensement des métiers existant en France
dans le domaine de la santé, du bien-être et du développement personnel
tel qu'il résulte du fichier ROME …………………………………………………………………………. 151??
e) Un problème : la dilution de la responsabilité dans la sélection des organismes
de formation professionnelle……………………………………………………………………………….. 155??
f) Une question non résolue : quelle protection pour le particulier acheteur
de formation professionnelle ? …………………………………………………………………………….. 156??
3. Une nécessaire mobilisation des pouvoirs publics pour limiter le développement
de phénomènes potentiellement sectaires dans le domaine de la formation
professionnelle …………………………………………………………………………………………………….. 157??
a) Sensibiliser tous les acteurs de la formation …………………………………………………………… 157??
b) Coordonner les efforts et définir une responsabilité partagée des acteurs
de la formation …………………………………………………………………………………………………. 159??
c) Un label de qualité pour orienter les financements publics ……………………………………….. 159??
D. UNE RÉPONSE GLOBALEMENT INSUFFISANTE DES POUVOIRS PUBLICS
FACE À UN DANGER DÉMULTIPLIÉ ……………………………………………………………………… 160??
1. L'inégale implication des institutions ……………………………………………………………………….. 161??
a) La vigilance sectaire : une organisation administrative affaiblie ………………………………… 161??
(1) Une vigilance relâchée des services ministériels ……………………………………………………….. 161??
(2) Une coordination insuffisante de l'action locale ………………………………………………………… 163??
(3) Un pilotage défaillant de la politique gouvernementale ……………………………………………….. 169??
b) Une implication forte des services enquêteurs ………………………………………………………… 174??
c) Une implication inégale des ordres médicaux et paramédicaux ………………………………….. 179??
d) Un contrôle inexistant de la vente des appareils pseudo médicaux ……………………………… 186??
2. Une réponse judiciaire difficile à mettre en oeuvre malgré l'existence d'outils
législatifs importants …………………………………………………………………………………………….. 187??
a) Un arsenal législatif complet ……………………………………………………………………………….. 187??
(1) De nombreuses qualifications pénales susceptibles d'incriminer les personnes physiques
et morales ……………………………………………………………………………………………………… 187??
(2) Un droit civil protecteur des personnes, de la famille et de l'enfant …………………………………. 193??
(3) La nécessaire conciliation des intérêts en présence devant le juge administratif ………………….. 195??
b) Des poursuites judiciaires difficiles à mettre en oeuvre …………………………………………….. 196??
(1) Des obstacles à l'engagement de l'action publique …………………………………………………….. 198??
(2) Une spécificité « sectaire » difficile à appréhender pour la justice ………………………………….. 204??