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L’HEBDO DE L’ACTUALITE DANS LE DOMAINE DE LA SANTE

Cette semaine, la publication d’une instruction relative au compte personnel de prévention de la pénibilité, un décret  relatif au suivi médical post-professionnel dans la fonction publique hospitalière et deux arrêts du Conseil d’Etat qui doivent attirer toute notre attention au regard des précisions qu’ils apportent sur la procédure administrative contentieuse.

RESSOURCES HUMAINES

La pénibilité encadrée 

« Choisissez un travail que vous aimez et nous n’aurez pas à travailler un seul jour de votre vie ». En dépit des encouragement de Confucius, la pénibilité s’invite parfois au casting, la réforme des retraites mettant en scène la prévention de la pénibilité, entre opportunités et contraintes »[1]. L’instruction n° DGT/DSS/SAFSL/2016/178 du 20 juin 2016 relative à la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité a pour objet de préciser la nature des obligations des employeurs en la matière. Elle annule et remplace l’instruction précédente du 13 mars 2015[2], rappelle les dispositions applicables pour les expositions de l’année 2015 et présente les mesures transitoires pour l’année 2016. Il apparaît que, par la suite, ce texte devrait être complété par une nouvelle instruction précisant les modalités d’acquisition et d’utilisation des points par les salariés.

Le compte de pénibilité a été instauré par la loi n°2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, la pénibilité se définissant comme une exposition au-delà de certains seuils, à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels susceptibles de laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé du salarié

L’instruction de juin 2016 précise le cadre juridique de la prévention de la pénibilité qui doit permettre de diminuer l’exposition des salariés aux risques professionnels. Elle prévoit un assouplissement du dispositif législatif : une procédure simplifiée de l’évaluation annuelle des expositions est désormais mise en place alors que, initialement, la loi prévoyait qu’il appartenait à l’employeur d’évaluer annuellement l’exposition de ses salariés aux facteurs des risques professionnels.

L’objectif est que toutes les entreprises s’engagent dans la prévention la pénibilité au travail. Si le salarié demeure, malgré une application des mesures de protection collective et individuelle, exposé au-delà des seuils d’exposition, son compte personnel de prévention sera crédité en points. Le nombre de point accumulés permettra au salarié de bénéficier d’une formation permettant d’accéder à des postes moins exposés à la pénibilité (reconversion), de bénéficier d’un temps partiel sans perte de salaire ou encore de partir plus tôt à la retraite.  L’employeur doit établir une déclaration, ce qui doit responsabiliser les employeurs vis-à-vis de leurs salariés en les incitant à diminuer l’exposition de ces derniers aux facteurs de risques professionnels.

La circulaire précise l’entrée en vigueur des six derniers facteurs de pénibilité qui devront s’appliquer à partir du 1er juillet 2016 : manutentions manuelles de charges, postures pénibles, vibrations mécaniques, agents chimiques dangereux, températures extrêmes, bruit. Cette liste complète celle des quatre facteurs pour lesquels le dispositif est déjà appliqué depuis le 1er janvier 2015 : travail de nuit, travail en équipes successives alternantes, travail répétitif, activités exercées en milieu hyperbare. Cette liste étant exhaustive, qu’en est-il des autres risques notamment des risques psychosociaux ? Pour le moment, aucune nouvelle précision autre que celles prévues par la circulaire n’a été annoncée.

http://circulaire.legifrance.gouv.fr/pdf/2016/06/cir_41030.pdf

FONCTION PUBLIQUE

Suivi médical post-professionnel, le temps de l’harmonisation

Le décret n°2016-828 du 22 juin 2016 relatif au suivi médical post-professionnel des agents des établissement publics de santé, sociaux et médico-sociaux exposés à un agent cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction harmonise les modalités de mise en œuvre du suivi médical post-professionnel des agents de la fonction publique hospitalière (Décret n° 2013-1151 du 12 décembre 2013) avec celles de la fonction publique de l’Etat (Décret n°2009-1546 du 11 décembre 2009) et de la fonction publique territoriale (Décret n° 2015-1438 du 5 novembre 2015). Ce texte qui entrera en vigueur au 1er septembre 2016, modifie les articles 3 et 8 du décret n°2013-1151 du 12 décembre 2013. Jusqu’alors, les agents des établissements mentionnés à l’article 2 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 n’étaient pas soumis aux mêmes dispositions que les deux autres corps de la fonction publique.

Désormais, l’attestation d’exposition de l’établissement employeur est établie après avis du médecin du travail et conformément au modèle défini par l’arrêté mentionné à l’article D.461-25 du code de la sécurité sociale. Le bilan annuel de la mise en œuvre du suivi médical post-professionnel devra être présenté devant le CHSCT.

Le décret précise également la teneur et la portée du dossier individuel des salariés qui doit être distingué du dossier médical et  comporter l’ensemble des fiches d’exposition ou de prévention des expositions établies par les établissements employeurs de l’agent. Ce dossier individuel a vocation à être transmis au médecin du travail de l’établissement d’accueil ainsi qu’au service du personnel, sauf refus de l’agent.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000032753666&dateTexte=&categorieLien=id

PROCEDURE ADMINISTRATIVE

Objectif rapidité !

Dans un arrêt CE, 4 mai 2016, n°396332, la Haute Juridiction rappelle qu’une demande faite sur le fondement de l’article 521-2 du Code de justice administrative (référé-liberté) ne saurait être soumise à la condition que le requérant produise la décision.

En l’espèce, M.B demande au juge des référés du Tribunal administratif de Marseille de suspendre l’exécution de la décision par laquelle le directeur des routes « méditerranée » a refusé de lui accorder le bénéfice du concours de chef d’équipe d’exploitation des travaux publics de l’Etat, dans l’attente que se libère un emploi situé dans une zone plus proche de son domicile que celle où se situait l’emploi qui lui avait été proposé. Le juge des référés du tribunal administratif de Marseille avait alors rejeté cette demande comme étant manifestement irrecevable, en application de l’article R.522-3 du Code de justice administrative, au motif que l’intéressé n’avait pas produit la décision attaquée.

Le Conseil d’Etat estime que  le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a entaché son ordonnance d’erreur de droit, « Considérant que la recevabilité d’une demande en référé présentée sur le fondement de l’article L. 521-2 de ce code,  justifiée par l’urgence et tendant à ce que le juge des référés ordonne à l’administration, sous quarante-huit heures, toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle celle-ci aurait porté une atteinte grave et manifestement illégale ne saurait être soumise, eu égard à son objet et à ses modalités de mise en œuvre, à la condition que le requérant produise, lorsque celle-ci existe, la décision dont la suspension de l’exécution est demandée, ou justifie de l’impossibilité de la produire ».

Les dispositions de l’article R.412-1 du Code de justice administrative aux termes desquelles une requête doit, sous peine d’irrecevabilité, être accompagnée de la décision attaquée, ne sont donc pas applicables en matière de référé-liberté.

Le défaut d’information préalable, ça agace

Conformément à l’article R.711-3 du Code de justice administrative, « si le jugement doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaitre, avant la tenue de l’audience, le sens de ces conclusions sur l’affaire qui les concerne ».

Désormais, les parties devront être informées des modifications du sens des conclusions du rapporteur public, sous peine d’irrégularité. L’arrêt CE, 4 mai 2016, n°380548 vient en effet de préciser que si le rapporteur public envisage de changer sa position, il doit effectuer une mise en ligne des nouvelles conclusions sur l’application Sagace afin d’en informer les parties.

A défaut, si les parties n’ont pas été informées de cet élément, et que, de facto, elles ne connaissent pas le sens des nouvelles conclusions, le rapporteur méconnait la portée des dispositions de l’article R.711-3 du Code de justice administrative précité.

Le Conseil d’Etat précise et conforte ainsi sa jurisprudence relative à la mise en œuvre du contradictoire dans le contentieux administratif :

–       les parties doivent être en mesure de connaître avant l’audience l’ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public propose à la formation de jugement (CE, 21 juin 2013, n°352427 communauté d’agglomération du pays de Martigues).

–       la procédure encourt l’irrecevabilité si le rapporteur public modifie, lors de l’audience, le sens des conclusions sans avoir préalablement prévenu les parties (CE, 5 mai 2006, n°259957 Société Mullerhof).

Cette  nouvelle décision du Conseil d’Etat ne peut qu’être saluée. En effet, dans le cadre de l’exercice pratique du droit de la défense, toute modification du sens des conclusions peut avoir  une incidence non négligeable sur le déroulement de l’audience, les conclusions du rapporteur public influençant forcément la présentation des observations et la stratégie de défense des parties intéressées.



[1] Social, risque professionnels – le compte personnel de prévention de la pénibilité : moteur, action ! J.LECLERC-TREHIN, JA 2015, n°528, p.41