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Au programme cette semaine, un jugement du Tribunal de grande instance de Paris relatif à l’illégalité d’une hospitalisation sous contrainte, un arrêt de la Cour de cassation relatif au cumul des réparations, une instruction relative à l’organisation de la prise en charge de l’urgence médico-psychologique et enfin, une ordonnance relative à la Haute Autorité de Santé.

DROIT DES PATIENTS

Le consentement : élément décisif de l’hospitalisation sous contrainte

Dans les faits, un homme a été mis en examen au cours de l’année 1995 pour des faits de dégradations commis au préjudice d’une association. Dans le cadre de l’instruction pénale, les médecins ont conclu à une irresponsabilité pénale, conduisant le préfet du département à prendre à son égard un arrêté d’hospitalisation d’office.

Cette hospitalisation d’office a par la suite été prolongée par une série d’arrêtés préfectoraux, dont le dernier précisait que « l’hospitalisation se poursuivrait jusqu’à ce qu’il en soit décidé autrement ».

L’homme a depuis, à part quelques exceptions, été placé en hospitalisation complète, et ce jusqu’en 2012. Les arrêtés précités ont tous été annulés par le Tribunal administratif de Rennes ; le juge des libertés et de la détention du Tribunal administratif de Rennes a alors ordonné la mainlevée de la mesure de placement.

Assisté de son curateur, l’homme a assigné l’agent judiciaire de l’Etat en paiement de sommes destinées à indemniser notamment sa privation de liberté illégale, la violation de l’article 5§4 de la Convention européenne des droits de l’Homme ou encore l’administration d’un médicament sous la contrainte.

Dans son jugement n°15/13139 du 21 novembre 2016, le Tribunal de Grande Instance de Paris retient « qu’en l’absence de toute décision fondant légalement l’hospitalisation sous contrainte de M. et sans qu’il y ait lieu de rechercher si elle était médicalement justifiée et nécessaire, ce dernier est fondé à solliciter l’indemnisation de l’intégrité du préjudice qui en découle ».

A la lumière de l’article 5§4 de la Convention européenne des droits de l’Homme, le Tribunal de Grande Instance affirme que « toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération sur la détention est illégale ».

 

Décision assez remarquable pour être soulignée, le Tribunal a condamné l’Etat à verser à M. la somme de 617 079,60 euros à titre de dommages et intérêts, l’homme ayant été privé de liberté, toutes ces années durant, sur le fondement de décisions illégales.

https://psychiatrie.crpa.asso.fr/IMG/pdf/2016-11-21_tgi_paris_indemnisation_record_m._j._-_l._c.pdf

PROFESSIONS MEDICALES

Cumul de réparations

Lors d’une consultation, MX, chirurgien vasculaire, diagnostique à Mme Y une sténose carotidienne droite. La patiente est alors admise dans une clinique afin de réaliser un bilan vasculaire complémentaire ; une artériographie est également réalisée par M.A, radiologue.

A la suite de cela, la patiente présente une hémiplégie des membres inférieurs et supérieurs gauches. Elle assigne alors en responsabilité et indemnisation les praticiens et l’Office National d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM).

La patiente invoque :

–       un défaut d’information préalable sur le risque d’hémiplégie lié à la pratique d’une artériographie,

–       la survenue d’un accident médical non fautif relevant d’une indemnisation au titre de la solidarité nationale.

En appel, les praticiens ont été condamnés, pour défaut d’information, à payer des indemnités à la patiente en réparation de la perte de chance d’éviter le dommage mais également au titre du préjudice moral d’impréparation.

Les praticiens invoquent la non-possibilité pour le créancier d’une obligation contractuelle de se prévaloir, à l’encontre du débiteur de cette obligation, des règles régissant la responsabilité délictuelle.

Pour autant, la Cour de cassation, dans un arrêt n°15-27.898 en date du 25 janvier 2017, retient que « le non-respect par un professionnel de santé de son devoir d’information cause à celui auquel l’information était due, lorsque ce risque se réalise, un préjudice moral résultant d’un défaut de préparation aux conséquences d’un tel risque, qui, dès lors qu’il est invoqué, doit être réparé ».

A cette occasion, la Cour de cassation rappelle donc qu’une telle position ne méconnait pas le principe de réparation intégrale et que ces préjudices distincts étant caractérisés, ils peuvent être l’un et l’autre indemnisés.

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/premiere_chambre_civile_568/101_25_35940.html

ORGANISATION

Urgence médico-psychologique : organisation de la prise en charge

L’instruction n°DGS/VSS2/2017/7 du 6 janvier 2017 relative à l’organisation de la prise en charge de l’urgence médico-psychologique a pour objet de préciser les modalités d’organisation du dispositif médico-psychologique par les agences régionales de santé de zone de défense et de sécurité (ARSZ) et les ARS ;  elle décrit également le dispositif de l’urgence médico-psychologique, notamment le fonctionnement des cellules d’urgence médico-psychologique (CUMP), et enfin l’organisation et le fonctionnement de ce dispositif en situation sanitaire exceptionnelle.

Ce dispositif est institué au profit des victimes de catastrophes, d’accidents impliquant un grand nombre de victimes ou d’évènements susceptibles d’entrainer d’importantes répercussions psychologiques en raison des circonstances les entourant notamment les victimes d’attentats. Dans ce dernier cas, le Premier ministre peut décider de l’activation de la cellule interministérielle d’aide aux victimes (CIAV) contribuant au pilotage des acteurs de l’urgence médico-psychologique et pouvant mobiliser, au besoin, la réserve sanitaire.

Il incombe aux ARS d’organiser la prise en charge des urgences médico-psychologiques dans le cadre de l’aide médicale urgente. Pour ce faire, les ARS doivent :

–       veiller à ce que chaque établissement de santé, siège de SAMU, comporte une CUMP départementale constituant une unité fonctionnelle,

–       s’assurer que ce dispositif formé par les CUMP couvre l’ensemble du territoire régional.

Ce dispositif a vocation à reposer sur des personnels et professionnels de santé volontaires spécialistes ou compétents en santé mentale[1]. Ces CUMP sont coordonnées par un psychiatre référent, responsable de l’unité fonctionnelle et désigné par l’ARS.

L’objectif premier de ces cellules est de :

–       constituer un dispositif médical d’urgence,

–       d’assurer la prise en charge médico-psychologique immédiate et post-immédiate des victimes.

Les CUMPS agissent donc en véritable relai dans la prise en charge du patient mais n’ont pas vocation à assurer le suivi des patients nécessitant une prise en charge médico-psychologique au-delà des soins immédiats et post-immédiats.

Dans le cadre du projet territorial de santé mentale, il revient aux ARS d’organiser le parcours de soins des patients pris en charge par les CUMP ainsi que leur suivi vers les établissements de santé autorisés en psychiatrie et vers les praticiens libéraux ; l’ARS endosse  ici un véritable rôle de coordonnateur dans la prise en charge des urgences médico-psychologiques.

Les CUMP départementales ainsi que les CUMP départementales renforcées seront coordonnées par des CUMP dite « régionales » dont l’activité s’organise autour de deux volets indissociables et indispensables au maintien d’un dispositif opérationnel régional de réponse face aux urgences médico-psychologiques :

–       un volet soins consistant à assurer les interventions, leur évaluation et la participation aux différents exercices,

–       un volet animation concernant l’animation des CUMP de la région, la formation initiale et continue des personnels et professionnels des CUMP notamment.

L’ARS aura également pour mission de procéder à l’évaluation annuelle du dispositif régional de l’urgence médico-psychologique.

Le réseau national de l’urgence médico-psychologique est constitué par l’ensemble des CUMP et est mobilisé par le ministre chargé de la santé :

–       en cas de situation sanitaire exceptionnelle nécessitant des renforts en moyens médico-psychologiques dépassant ceux de la zone de défense et de sécurité impactée,

–       lorsque les opérations sanitaires internationales nécessitent des moyens médico-psychologiques.

Enfin, le texte précise les modalités de fonctionnement de l’urgence médico-psychologique, notamment les modalités de participation des personnels et professionnels à la CUMP. Ces derniers, volontaires, sont inscrits sur une liste arrêtée par l’ARS. Ils peuvent exercer dans un établissement de santé ou à titre libéral et doivent pouvoir se rendre rapidement disponibles pour intervenir dès lors qu’une prise en charge immédiate de victimes est nécessaire. Cette participation est régie par la signature d’une convention[1].

L’urgence médico-psychologique faisant partie du dispositif de l’aide médicale urgente, la CUMP intervient dans le champ de compétence territoriale du SAMU auquel elle est rattachée. Les CUMP participent ainsi au réseau des urgences et leurs modalités d’intervention sont définies dans un schéma type d’intervention établi par le responsable médical du SAMU en liaison avec le référent de la CUMP et les établissements de santé concernés.

http://circulaires.legifrance.gouv.fr/pdf/2017/01/cir_41730.pdf

SYSTEME DE SANTE

Analyse prospective du système de santé

Pris en application de l’article 166 de la loi de modernisation de notre système de santé, l’ordonnance n°2017-84 du 26 janvier 2017 relative à la Haute Autorité de santé (HAS) adapte la gouvernance de cette autorité publique indépendante ainsi que ses missions et la composition de ses instances[2].

Le texte met en place une commission spécialisée, distincte des commissions mentionnées aux articles L.5123-3 du Code de la santé publique[3] et L.165-1 du Code de la sécurité sociale. Cette commission est chargée d’établir et de diffuser :

–       Des recommandations et avis médico-économiques sur les stratégies de soins, de prescription ou de prise en charge les plus efficientes,

–       D’évaluer l’impact sur les dépenses d’assurance maladie.

Une nouvelle responsabilité est confiée à la HAS à laquelle il incombe désormais de produire une analyse prospective du système de santé comportant des propositions d’amélioration de la qualité, de l’efficacité et de l’efficience lui permettant de donner une vision globale des travaux qu’elle conduit. Elle sera de ce fait en charge de formuler des propositions visant à améliorer le système de santé. Les dispositions relatives au rapport  s’appliquent pour la première fois au rapport établi au titre de l’année 2017.

L’ordonnance procède également à certaines évolutions concernant notamment la composition du collège de la HAS. Désormais, ce collège sera composé de sept membres, dont au moins trois femmes et trois hommes, choisis en raison de leur expertise et de leur expérience dans des domaines de compétence de la HAS :

–       Le président du collège, président de la HAS, désigné par le Président de la République,

–       Trois membres désignés par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale,

–       Un membre désigné par le président de l’Assemblée nationale,

–       Un membre désigné par le président du Sénat,

–       Un membre désigné par le président du Conseil économique, social et environnemental.

Il sera renouvelé par moitié tous les trois ans.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000033927650&dateTexte=&categorieLien=id

 



[1] Psychiatres, psychologues, infirmiers.



[1] Les éléments constitutifs de la convention étant déterminés par l’arrêté du 24 février 2014 relatif aux modalités d’intervention des cellules d’urgence médico-psychologiques et aux conditions de participation des personnels et des professionnels à une cellule d’urgence médico-psychologique

[2] Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n°2017-84 du 26 janvier 2017 relative à la Haute Autorité de Santé

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000033927648&dateTexte=&categorieLien=id

 

[3] Commission chargée d’établir et de diffuser des recommandations et avis médico-économiques sur les stratégies de soins, de prescription ou de prise en charge les plus efficientes