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La procédure de contrôle régional externe connaît un nouveau rebondissement avec la publication, vendredi 29 septembre 2011, du décret n°2011-1209 du 29 septembre 2011 modifiant les dispositions relatives au contrôle de la tarification à l’activité des établissements de santé.

Le pouvoir règlementaire accentue trois points :

– il tend à renforcer le caractère contradictoire de la procédure dans le cadre de la procédure de sanction financière,
– il modifie la méthode de calcul du montant de la sanction,
– il admet le principe de compensation pour le recouvrement de l’indu.

Le décret est entré en vigueur le 1er octobre 2011. Il convient donc de se pencher sur le nouveau dispositif que les établissements vont être amenés à connaître.


I- La procédure de contrôle et le recouvrement de l’indu

Le Décret vient rappeler les objectifs du contrôle et donne ainsi une valeur règlementaire à certains éléments du guide du contrôle externe régional.

Ledit guide (version 1.3 ? août 2007) précise notamment que le contrôle réalisé "vise à s’assurer que l’assurance maladie n’effectue pas de paiements injustifiés". En conséquence du contrôle, le guide rappelle que :

"Le principe fondamental des nouvelles modalités de contrôles décrites dans ce guide réside dans le fait que le résultat du contrôle entraîne des conséquences directes pour l’établissement : la mise en évidence d’un paiement indu pour un séjour donnée, et/ou d’une surfacturation sur l’échantillon de séjours contrôlés entraîne récupération d’indu dans un cas et/ou sanctions financières éventuelles dans l’autre cas (voir chapitre VII).
En cas de sous-facturation sur un séjour donné, constatée lors du contrôle sur site, une facture corrective ne pourra être émise, dans la mesure où il s’agit d’un défaut de qualité de l’information transmise".

Ainsi, le guide du contrôle externe régional prévoyait déjà la possibilité d’une compensation entre les sommes indument facturées par l’établissement de santé et les sommes dues par l’assurance maladie.

Le Décret vient renforcer ce point. Il précise dès lors que le contrôle recherche notamment les surfacturations et les sous-facturations (article R.162-42-10, alinéa 2).

L’ensemble des informations (surfacturations et sous-facturations) devront ressortir dans le rapport de contrôle, afin que le médecin DIM puisse vérifier leur bien-fondé.

En cas de sommes indûment perçues par l’établissement, l’unité de coordination régionale du contrôle externe (UCR) transmet, par tout moyen permettant de rapporter sa date de réception, le rapport de contrôle aux caisses qui ont supporté l’indu et leur demande la date, la cause, la nature et le montant de chacune des sommes dues et des sommes payées au titre des factures contrôlées. Elle procède simultanément de même pour les sommes dues par les caisses au titre des sous-facturations. Ces informations doivent être transmises dans un délai de deux mois à compter de sa demande (article R.162-42.11).

Dorénavant, la caisse dispose d’un délai de deux mois, et non plus un mois, pour faire connaître à l’UCR le montant des recettes annuelles d’assurance maladie de l’établissement au titre de l’année civile antérieure au contrôle et, si le séjour porte sur des activités, des prestations en particulier ou des ensembles de séjours présentant des caractéristiques communes, les recettes annuelles d’assurance maladie au titre de l’année civile antérieure au contrôle afférentes à ceux-ci (article R.162-42-11).

Sur la base de ces éléments, l’UCR transmet à la commission de contrôle et au directeur général de l’ARS, et non plus à la seule commission de contrôle :

– le rapport de contrôle prévu à l’article R.162-42-10;
– les observations de l’établissement, le cas échéant;
– le montant maximum de la sanction encourue;
– un avis sur les observations présentées par l’établissement.

L’établissement bénéficie d’un délai de 30 jours, et non plus 15 jours, pour présenter ses observations sur le rapport de contrôle (article R.162-42-10, alinéa 5).

Lors du recouvrement de l’indu, les caisses d’assurance maladie procèdent à la compensation entre les sommes indûment perçues par l’établissement et les sommes dues par la caisse au titre des sous-facturations. Cette compensation n’est pas automatique. L’établissement doit donner son accord préalable à toute compensation.


II- La modification de la méthode de calcul du montant de la sanction

Sur le principe, la détermination d’une sanction financière n’est pas modifiée : Le directeur général de l’ARS détermine le montant de la sanction, après avis de la commission de contrôle. Le directeur général de l’ARS dispose donc d’une compétence exclusive qui n’est pas remise en cause par le décret.

Toutefois, la méthode de calcul du montant de la sanction est entièrement refondue. Le montant de la sanction est fonction du "taux d’anomalies". Celui-ci correspond au quotient des sommes indûment perçues par l’établissement, déduction faite des sommes dues par les caisses au titre des sous-facturations constatées sur l’échantillon, et des sommes dues par l’assurance maladie au titre de la totalité des facturations de l’échantillon.

Pour prononcer la sanction financière, le directeur général de l’ARS prend en compte :

– la gravité des manquements constatés,
– le caractère réitéré des manquements,
– le taux d’anomalies.
Il en découle qu’il repose sur le directeur général de l’ARS un effort de motivation important puisqu’il devra préciser tant le caractère de gravité que le caractère réitéré des manquements.

Le montant maximum de la sanction est égal au montant des recettes annuelles d’assurance maladie afférentes aux activités, prestations ou ensembles de séjours ayant fait l’objet dudit contrôle "multiplié par le taux d’anomalie" (article R.162-42-12).

Le montant de la sanction prononcé ne peut excéder dix fois le montant des sommes indûment perçues par l’établissement, déduction faite des sommes dues par les caisses au titre des sous-facturations constatées sur l’échantillon et il doit être inférieur à la limite de 5% de la totalité des recettes annuelles d’assurance maladie de l’établissement au titre de l’année civile antérieure au contrôle.

La référence au taux d’anomalie vient renforcer le caractère proportionnel de la sanction par rapport au montant de l’indu. Le pouvoir d’appréciation du directeur général de l’ARS est, par ailleurs, doublement encadré.

Nonobstant ces limites, le montant de la sanction pourra s’avérer très important au regard du montant de l’indu. C’est pourquoi l’établissement devra user des nouvelles modalités qui lui sont offertes pour contester le montant de la sanction.


III- Le renforcement de la procédure contradictoire pour le prononcé d’une sanction financière

L’article R.162-42-3 est également refondu. L’objectif poursuivi par le pouvoir règlementaire est de renforcer la procédure contradictoire au bénéfice des établissements.

Le directeur général de l’ARS adresse à l’établissement en cause une notification sur le montant de la sanction encourue. Cette notification doit contenir :

– la date,
– la nature,
– la cause,
– le montant des manquements constatés,
– le montant de la sanction maximale encourue,
– le délai d’un mois laissé à l’établissement pour demander à être entendu, s’il le souhaite, ou présenter ses observations écrites.

La notification doit intervenir par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Le pouvoir règlementaire introduit donc une phase contradictoire plus poussée au profit de l’établissement qui peut demander à être entendu. S’il s’agit d’une avancée qu’il convient de souligner, il n’en demeure pas moins que certains éléments restent néanmoins nébuleux et il convient d’être mesuré sur cette nouveauté.

D’une part, l’article R.162-42-3 du CSS prévoit une alternative : l’établissement peut choisir entre demander à être entendu par l’ARS ou présenter des observations écrites. Le texte ne précise pas si la demande d’audition peut être accompagnée d’observations écrites.

D’autre part, le texte ne précise pas si l’ARS est tenue d’entendre l’établissement qui en fait la demande.

Dans l’hypothèse où l’ARS refuserait d’entendre l’établissement, ce dernier devra néanmoins déposer des observations écrites dans le délai d’un mois. En conséquence, et à titre de précaution, il nous semble que, l’établissement devra notifier son intention d’être entendu au directeur général de l’ARS, par un courrier circonstancié. Ainsi, l’établissement pourra garantir le dépôt de ses observations dans le délai qui lui est imparti.

Enfin, le décret ne précise pas quelle autorité a compétence pour entendre l’établissement. La lecture de l’article R.162-42-13, I, alinéa 2 semble donner compétence au directeur général de l’ARS, seule autorité à laquelle il est fait référence dans ledit article. Une difficulté d’ordre pratique risque alors de se poser. Toutefois, cette exigence s’inscrit pleinement dans la compétence propre reconnue au directeur général de l’ARS en matière de sanction financière prononcée dans le cadre d’un contrôle externe à la tarification.

En effet, à l’issue du délai d’un mois à compter de la notification ou après audition de l’établissement en cause lorsque celle-ci intervient postérieurement à l’expiration de ce délai, le directeur général de l’ARS est seul compétent pour décider ou non de poursuivre la procédure.

La procédure orale prend donc toute son importance : les observations de l’établissement peuvent dorénavant avoir un poids plus important lors de la phase contradictoire. En effet, lorsque les observations sont écrites, il n’est pas possible d’avoir un échange contradictoire. La procédure orale vient permettre la tenue de ce débat. Elle sera, très certainement, une étape préalable à une négociation avec l’ARS sur le montant de la sanction. L’établissement pourra tenter d’obtenir une sanction financière moins importante, voire à démontrer son mal fondé, ce qui conduirait à son annulation.

Si le directeur général de l’ARS décide de poursuivre, il saisit la commission de contrôle dans le délai d’un mois et lui communique les observations formulées le cas échéant par l’établissement.

La commission de contrôle rend un avis motivé portant notamment :

– sur la gravité des manquements,
-sur le montant de la sanction envisagée.

Cette motivation n’est pas exhaustive. Il conviendrait ainsi que la commission de contrôle puisse également se prononcer sur la pertinence des observations formulées par l’établissement.

Le décret introduit un délai impératif : la commission de contrôle doit adresser son avis au directeur général de l’ARS dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. A défaut, l’avis est réputé rendu.

De même, le directeur général de l’ARS dispose d’un délai d’un mois pour prononcer la sanction et la notifier à l’établissement. A défaut de notification dans le délai imparti, la procédure est réputée abandonnée. L’établissement devra donc être extrêmement vigilant sur le respect dudit délai.

La notification doit intervenir par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, et doit indiquer :

– la date,
– la nature,
– la cause,
– le montant des manquements constatés,
– le délai et les modalités de paiement des sommes en cause,
– les voies et délais de recours,
– les raisons pour lesquelles l’avis de la commission de contrôle n’a pas été suivi, le cas échéant.

Une copie de la notification est adressée à la caisse dans la circonscription de laquelle est implanté l’établissement qui assurera la procédure de recouvrement.

Enfin, le pouvoir règlementaire admet que procédure de sanction et procédure d’indu sont intrinsèquement liées. Ainsi, il prévoit notamment un article R.162-42-13, IV au terme duquel une révision du montant de la sanction peut intervenir en cas de rectification juridictionnelle du montant des indus à la suite d’un contentieux.


Si le décret du 29 septembre 2011 semble s’inscrire en réponse à la mobilisation massive des établissements à l’encontre des sanctions prononcées par le directeur général de l’ARS, et vient refonder ce pan du contrôle externe régional, il reste néanmoins un long chemin à parcourir. La procédure de contrôle régional externe demeure imparfaite.

En effet, le décret n’apporte aucune modification indicative à la procédure d’indu, ce qui reste dommageable aux établissements. Ainsi, la procédure contradictoire prévue dans le cadre de la notification d’indu n’est pas renforcée, alors qu’il est constant que le contrôle sur site, compte tenu notamment des délais sur lequel il est réalisé et l’importance des dossiers à vérifier, ne permet pas un réel échange contradictoire entre les médecins contrôleurs, les médecins DIM, et les médecins de l’établissement.

Concernant la procédure de sanction, il demeure des incertitudes quant à la mise en œuvre de la nouvelle procédure contradictoire et de ses conséquences. Les établissements doivent rester vigilants.

Enfin, le décret se contente de rappeler que le recouvrement de la sanction sera effectué par la caisse d’assurance maladie, sans toutefois apporter des précisions sur la procédure mise en œuvre, et notamment sur la suspension de la procédure de recouvrement en cas de contestation du montant de la sanction notifiée.

Ce décret n’est donc qu’une étape dans le long chemin sur lequel se sont engagés les établissements pour redonner au contrôle régional externe tout son objet, celui d’un contrôle qualité. Le meilleur reste donc à venir !