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Certains professionnels ou établissements, publics comme privés, de santé ignorent ou feignent d’ignorer que certains actes médicaux sont assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée.

Un rescrit publié le 27 septembre 2012 au Bulletin officiel des impôts (Rescrit n° 2012/25 (TCA)) vient préciser/rappeler que "les actes de médecine et de chirurgie à visée esthétique non remboursés par la sécurité sociale ne peuvent bénéficier de l’exonération de TVA relative aux prestations de soins rendues aux personnes.

Par mesure de tempérament, cette interprétation ne donnera lieu ni à rappel, ni à restitution de TVA au titre des actes de médecine et de chirurgie esthétique effectués antérieurement au 1er octobre 2012".  

En effet,  le 1° du 4 de l’article 261 du code général des impots (CGI), pris en application de l’article 132-1-c) de la directive européenne 2006/112/CE du 28 novembre 2006, n’exonère de la TVA que les prestations de soins à la personne, c’est-à-dire toutes les prestations qui concourent à l’établissement des diagnostics médicaux ou au traitement des maladies humaines.

La Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) a eu l’occasion de préciser dans deux arrêts du 20 novembre 2003, (CJCE, 20 novembre 2003, aff. C-307/01 Peter d’Ambrumenil et CJCE, 20 novembre 2003, C-212/01 Margarete Unterpertinger) que seules les prestations à finalité thérapeutique, entendues comme celles menées dans le but de prévenir, de diagnostiquer, de soigner et, dans la mesure du possible, de guérir des maladies ou anomalies de santé sont susceptibles de bénéficier de l’exonération de TVA.

A contrario, les actes qui ne peuvent être considérés comme des soins car ils ne poursuivent pas une finalité thérapeutique, doivent être soumis à la TVA.

Ainsi, de nombreux actes médicaux sont susceptibles d’être assujettis à la TVA comme les actes de médecine ou de chirurgie esthétique objet du présent rescrit, les expertises médicales qui ne s’inscrivent pas dans le prolongement d’activités exonérées (Rescrit n° 2011/4 (TCA)), les examens de biologie médicale destinés par exemple à établir une filiation, etc.

On pourra s’étonner que malgré l’autonomie sans cesse réaffirmée du droit fiscal, le rescrit lie exonération et prise en charge par l’assurance maladie : "Par conséquent, les seuls actes qui bénéficient de l’exonération de TVA sont ceux qui sont pris en charge totalement ou partiellement par l’Assurance maladie, c’est à dire notamment les actes de chirurgie réparatrice et certains actes de chirurgie esthétique justifiés par un risque pour la santé du patient ou liés à la reconnaissance d’un grave préjudice psychologique ou social".

Un tel lien est particulièrement problématique puisqu’il n’y a pas d’identification univoque des actes médicaux selon qu’ils sont pris en charge ou non par l’assurance-maladie. Par exemple, une rhinoplastie est prise en charge par la sécurité sociale en cas de troubles respiratoires mais pas en cas de visée esthétique, le phimosis est pris en charge mais pas les circoncisions rituelles, etc.

Et seul le médecin qui a prescrit ou réalisé l’acte sait si ce-dernier est à visée thérapeutique ou non, susceptible ou non d’être pris en charge par l’assurance-maladie qui peut le contester (cf. un certain nombre de contrôle notamment dans le cadre de la T2A).

Alors, faudra-t-il ouvrir les dossiers médicaux aux services fiscaux ?

En adoptant ce rescrit, les services de Bercy ont sans aucun doute fait une oeuvre utile de clarification du droit. Cependant, ils ont peut-être ouvert la boîte de Pandore qui imposera aux pouvoirs publics de s’interroger, au-delà des seuls aspects fiscaux, sur l’utilité réellement thérapeutique de certains actes médicaux.