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La rapport 2010 de la Cour des comptes sur la sécurité sociale comporte des développements très critiques sur la politique de planification et de tarification de l’imagerie médicale.
Sur les incohérences de la planification :
Au-delà de l’augmentation du parc, les objectifs d’équipement définis dans les régions sont très disparates. Ainsi, l’ARH des Pays de la Loire poursuit l’objectif, pour 2011, d’autoriser moins de 12 scanners par million d’habitants. Dans le même temps, les ARH de Champagne-
Ardenne et Midi-Pyrénées ont un objectif de plus de 18 machines par million d’habitants.
Des observations comparables peuvent être faites concernant les IRM. En Corse ou en Bourgogne, il est prévu d’autoriser l’installation de 6 à 7 IRM par million habitants quand l’Ile-de-France vise un niveau d’équipement deux fois supérieur.

Ces objectifs ne sont pas toujours le reflet de la situation sanitaire de la population. Malgré les préconisations du plan cancer de 2003, les trois régions où la mortalité par cancer est la plus élevée ont déterminé env 2006 des objectifs d’équipement en IRM inférieurs à la moyenne nationale. Au contraire, les deux régions où la mortalité par cancer est la plus faible ont défini des objectifs largement au-dessus.

Sur l’utilisation des équipements :
La mission nationale d’expertise et d’audit hospitalier (MEAH268) a réalisé, dans le cadre de ses travaux sur l’organisation de l’imagerie médicale, une étude sur 20 établissements volontaires, publics et privés. Ainsi, elle relève que la part de temps d’utilisation à pleine capacité d’un scanner varie de 14 à 42 %, soit de 1 à 3 et que le nombre d’actes produits à l’heure est compris entre 1,7 et 7,2.

Des observations comparables sont faites sur les appareils d’IRM, avec un nombre annuel d’heures de fonctionnement de l’IRM qui va de 676 à 3 674 heures et avec un nombre d’actes par heure d’ouverture qui s’étend de 1,4 à 3,3 actes.

L’ARH du Nord-Pas-de-Calais réalise un relevé annuel d’activité par appareil de scanner et d’IRM. Ces statistiques de suivi montrent que le nombre d’actes par équipement variait en 2006 pour les scanners de 4 052 à 20 444, soit de 1 à 5, pour une moyenne de 11 450 actes par appareil, et de 3 749 à 13 037 soit de 1 à 3,5 pour les IRM, avec une moyenne de 5 921 actes par machine.
A l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, le nombre annuel d’actes d’IRM par machine ne dépasse pas 5 548 pour une moyenne de 4 274. Selon la statistique annuelle des établissements de santé (SAE), le délai d’attente moyen pour les patients hospitalisés y est de plus de sept jours.
Sur les effets pervers de la tarification :
Quand un patient est hospitalisé à l’hôpital public, les examens d’imagerie qui sont réalisés au cours de son séjour sont inclus dans le tarif du séjour. Quels que soient le nombre et la nature des examens réalisés au cours de cette hospitalisation, le montant de la rémunération du séjour est le même et ne dépend que de la pathologie.
La logique de cette prise en charge d’un forfait à la pathologie est de conduire les praticiens à ne prescrire et pratiquer que les actes utiles.
Dans le cas contraire, l’établissement risque de devoir trouver les ressources nécessaires pour financer les actes excédentaires.
Au contraire, si le patient est hospitalisé dans un établissement privé à but lucratif, les actes d’imagerie médicale pratiqués durant le même séjour sont tous facturés en sus du tarif du séjour274, sur la base de la tarification s’appliquant en ville, c’est à dire des honoraires versés au radiologue libéral et du forfait technique versé au titulaire de l’autorisation d’installation de la machine. Au motif que les médecins libéraux sont rémunérés à l’acte, le principe d’une incitation à une prescription plus vertueuse, tant au bénéfice d’une maitrise des dépenses de santé que dans l’intérêt des patients, ne s’applique pas. On comprend aisément que ce système de rémunération a des conséquences très différentes dans les deux secteurs, pour les médecins comme pour les établissements où ils exercent.
Sur le déséquilibre des rémunérations des médecins :
Si les actes ne sont pas payés au même prix dans les deux secteurs d’hospitalisation, les praticiens qui les réalisent ne le sont pas non plus.
Outre la liberté d’organisation, parmi les facteurs importants d’attractivité du secteur privé cités par les professionnels, le niveau de rémunération intervient en bonne place. L’inspection générale des affaires sociales (IGAS) et la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et de la statistique (DREES) font état, dans des études publiées en 2009, de niveaux de rémunération annuelle très différents, à hauteur de 83 000 € en moyenne à l’hôpital et de 202 800 € dans le secteur libéral. Cette différence de rétribution provoque un déséquilibre inquiétant entre les différents secteurs d’exercice aux dépens du secteur public.
27,7 % des radiologues travaillent à l’hôpital public et cette part est en recul chaque année.
Entre 2003 et 2009, l’hôpital a perdu 2,2 % de ses effectifs de radiologues alors que concomitamment le nombre de ces spécialistes installés dans le secteur libéral progressait de 8,7 %. Ce déséquilibre démographique pose notamment un problème d’organisation de la permanence des soins à l’hôpital public.
En conclusion, le Cour recommande de faire évoluer la tarification :
– en appliquant des forfaits techniques qui correspondent aux coûts d’investissement et de fonctionnement des appareils ;
– en ajustant les honoraires par acte en fonction du volume de travail médical produit ;
– en supprimant la prise en charge des actes non justifiés médicalement.
Elle recommande également d’assurer au sein de la DGOS une veille technologique et les arbitrages nécessaires en vue de préciser et de mettre à jour à intervalles réguliers les grands axes de la politique d’imagerie afin d’orienter et de coordonner les déclinaisons régionales de la mise en oeuvre de cette politique.