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Législation

Création de la Direction des achats de l’Etat (DAE)

Par un décret n° 2016-247 créant la direction des achats de l’Etat, en date du 3 mars 2016, paru au Journal Officiel du 4 mars, l’Etat modifie sa gouvernance en matière d’achat.

Cette direction qui succède au service des achats de l’Etat, est placée auprès du ministre des Finances et des Comptes publics. Cette direction des achats a pour objectif d’amplifier les économies réalisées sur les achats, mais également d’améliorer la politique d’achat qui sera définie par la direction, et les compétences des acheteurs publics.

Contentieux

L’extension de l’exception à la jurisprudence « Préfet de l’Eure »

Il est de jurisprudence bien connue que le juge administratif ne peut pas se substituer à une personne publique pour prendre une mesure qu’elle a le pouvoir de prendre, comme l’émission d’un titre exécutoire en vue de recouvrer une créance (CE, 30 mai 1913, Préfet l’Eure). Toutefois cette jurisprudence connaît une exception en matière contractuelle. En effet, il a été jugé que dans l’hypothèse où la créance à recouvrer trouve son origine dans un contrat, la personne publique est recevable à saisir le juge pour obtenir la condamnation de son cocontractant au versement d’une indemnité (CE, 26 décembre 1924, Ville de Paris c/ Chemin de fer métropolitain de Paris).

Dans cet arrêt récent, le Conseil d’Etat vient préciser cette jurisprudence et notamment son exception, dans le cas où des manœuvres dolosives auraient conduit la personne publique à contracter à des conditions tarifaires désavantageuses. Cette différence de prix résulte directement des stipulations contractuelles, même si la demande d’indemnisation est de nature quasi-délictuelle. Dès lors, les juges du Palais royal estiment que l’exception à la jurisprudence « Préfet de l’Eure » demeure applicable, la demande d’indemnisation tirant son origine d’un contrat.

Ainsi, la personne publique peut solliciter du juge que ce dernier condamne une entreprise ayant eu un comportement dolosif à l’indemniser du préjudice subi sans émettre de titre exécutoire. 

(CE, 24 février 2016, n° 395194)

 La recevabilité d’un candidat évincé à agir en référé précontractuel ou contractuel nonobstant l’irrégularité de sa candidature

Dans un autre arrêt récent, les juges du Palais Royal ont apporté des éléments quant à la recevabilité d’un candidat évincé à présenter une requête en référé précontractuel ou contractuel.

En effet, le Conseil d’Etat estime que l’auteur d’une candidature, autorisé à présenter une offre, ne peut se voir opposer l’irrégularité de sa candidature pour voir son recours rejeté.

En l’espèce, la société requérante avait vu son offre rejetée. Elle avait alors décidé d’introduire un référé précontractuel. La personne publique  mettait en exergue en défense que l’acte d’engagement avait été signé par une personne non habilitée à représenter la société.

Le Conseil d’Etat, confirmant l’ordonnance du tribunal administratif juge que « la production des documents relatifs aux pouvoirs des personnes habilitées à engager un candidat est exigible au stade de l’examen des candidatures ; qu’une offre ne saurait être regardée, par elle-même, comme irrégulière, au seul motif que le pouvoir adjudicateur ne dispose pas des documents attestant que le signataire de l’acte d’engagement est habilité à représenter l’entreprise candidate ; que lorsque l’acte d’engagement est signé par une personne qui se présente comme un responsable de cette entreprise, il est loisible au pouvoir adjudicateur, à supposer qu’il doute de la capacité du signataire à engager le candidat, de solliciter la production des documents justifiant de cette capacité ; que par suite, le juge des référés du tribunal administratif de Rouen n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que le syndicat mixte pour l’étude et le traitement des ordures ménagères de l’Eure, à défaut pour lui de s’être assuré que l’acte d’engagement remis par la société SNN n’avait pas été signé par une personne ayant qualité pour engager la société, ne pouvait se prévaloir de l’irrégularité de son offre pour soutenir qu’elle ne pouvait être lésée par les manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence qu’elle invoquait ».

Ainsi, même si la candidature était irrégulière, la requérante avait bien été lésée par les manquements et pouvait présenter une requête en vue de demander l’annulation de la procédure de passation.

(CE, 24 février 2016, n° 394945)

 

Droit pénal public

L’application à l’ensemble des marchés publics du délit de favoritisme

Le Syndicat national des personnels de la communication et de l’audiovisuel CFE-CGC avait porté plainte contre les dirigeant de France télévisions au motif qu’ils auraient conclu avec différents prestataires de nombreux marchés de services sans mise en concurrence préalable, en violation de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au Code des marchés publics.

France télévision a fait valoir que le principe d’interprétation stricte de la loi pénale interdisait d’étendre l’application de l’article 432-14 du Code pénal (délit de favoritisme) à la répression de contrats qui ne sont ni des marchés publics, ni des délégations de service public car soumis à l’ordonnance de 2005 et non au Code des marchés publics ou la loi Sapin.

La Chambre criminelle de la Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement et juge que les « principes à valeur constitutionnelle de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures » qui comme le rappelle la Cour « constituent également des exigences posées par le droit de l’Union européenne, gouvernent l’ensemble de la commande publique ».

Dès lors, elle en déduit justement que l’article 432-14 du Code pénal « s’applique à l’ensemble des marchés publics et non pas seulement aux marchés régis par le code des marchés publics, lequel a été créé postérieurement à la date d’entrée en vigueur dudit article dans sa rédaction actuelle ». Par conséquent, « la méconnaissance des dispositions de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005, relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, et, notamment, de son article 6, qui rappelle les mêmes principes, entre dans les prévisions de l’article 432-14 ».

(Cour de Cassation, 17 février 2016, n° 15-85363)