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L’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d’activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique modifie en profondeur le régime relatif au temps partiel thérapeutique prévu à l’article 41-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

Les nouvelles dispositions ont été prises en application de l’article 44 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels dont le 5° autorisait le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de « Renforcer les garanties applicables aux agents publics en matière de prévention et d’accompagnement de l’inaptitude physique, améliorer les droits et congés pour raisons de santé ainsi que le régime des accidents de service et des maladies professionnelles applicables aux agents publics ».  L’article 8 de l’ordonnance « vise à simplifier et à améliorer l’accès au temps partiel thérapeutique » ainsi que le précise le Rapport au Président de la République.

A noter que, par définition, les raisons qui commandent ce temps partiel thérapeutique n’ont pas été revues par le pouvoir réglementaire agissant par voie d’ordonnance, ainsi, « le temps partiel thérapeutique peut être accordé : soit parce que la reprise des fonctions à temps partiel est reconnue comme étant de nature à favoriser l’amélioration de l’état de santé de l’intéressé ; – soit parce que l’intéressé doit faire l’objet d’une rééducation ou d’une réadaptation professionnelle pour retrouver un emploi compatible avec son état de santé ». Ce sont néanmoins les conditions autorisant le placement en temps partiel thérapeutique de l’article 41-1 susvisé qui se voient substantiellement modifiées.

D’une part, pour ce qui est du congé de maladie ordinaire, la condition liée à la durée de ce congé – auparavant de « six mois consécutifs » – est supprimée. A l’instar du congé pour accident de service ou de maladie contractée dans l’exercice des fonctions, le temps partiel thérapeutique peut être accordé dans ce cas sans aucun critère de durée quelconque. D’autre part, l’avis préalable du comité médical ou de la commission de réforme disparait. Il n’est plus utile d’attendre l’avis favorable de ces instances pour ainsi placer le fonctionnaire hospitalier en temps partiel thérapeutique. C’est donc l’entière procédure d’autorisation qui est dès lors révisée, telle qu’elle est désormais prévue à l’alinéa 2 de l’article 41-1 : « la demande d’autorisation de travailler à temps partiel pour raison thérapeutique est présentée par le fonctionnaire accompagnée d’un certificat médical établi par son médecin traitant. Elle est accordée après avis favorable concordant établi par un médecin agréé par l’administration. Lorsque les avis du médecin traitant et du médecin agréé ne sont pas concordants, le comité médical compétent ou la commission de réforme compétente est saisi ».

Si, cette procédure peut être profitable à désengorger le « prétoire » de ces instances, et participe certes à une meilleure réactivité en termes de gestion de ces situations humaines parfois délicates, la charge des expertises repose dorénavant sur l’employeur public. A noter que l’ordonnance a pris grand soin de préciser que l’avis concordant doit être celui d’un « médecin agréé ». « Exit » donc les pratiques visant à biaiser en sollicitant le médecin du travail de l’établissement, ce qui aurait pu être une solution intermédiaire pertinente. D’autant que le médecin du travail est obligatoirement consulté lors de la reprise de l’agent en cas de maladie professionnelle, ou encore après au moins trente jour d’absence en cas d’accident de travail, de maladie ou d’accident non professionnel comme le précise l’article R. 4626-29 du Code du travail.

On regrette toutefois que le pouvoir réglementaire n’ait pas saisi l’occasion de cette ordonnance pour préciser certaines « zones d’ombre » ainsi induites par ce nouveau texte, notamment dans l’hypothèse d’avis médicaux discordants. Quid de la position statutaire de l’agent dans l’attente de l’avis du comité médical ou de la commission de réforme ? Le fonctionnaire est-il placé tout de même en temps partiel thérapeutique ou maintenu d’office en congés de maladie ou d’accident du travail ? Il est également dommage que l’ordonnance n’ait pas prévu les modalités du renouvellement de ce temps partiel thérapeutique, par exemple en imposant un délai aux agents pour faire une telle demande à l’expiration de la période d’autorisation. De même, enfin, pour ce qui est de la reprise à temps plein, les établissements peuvent-ils se contenter de l’avis de leur médecin du travail ou faut-il l’avis d’un médecin agréé tel que l’imposerait le « parallélisme des formes » ? Face à ces incertitudes, les établissements publics de santé devront faire preuve d’imagination, et « naviguer au gré du vent » de la jurisprudence.

 Me Antonin LUZUY