Scroll Top
Partager l'article



*




 

Par un arrêt en date du 24 juin 2015 (n° 14-15.538 et n° 14-19.562), la Première chambre civile de la Cour de Cassation a confirmé sa jurisprudence, s’agissant de l’application de la règle « Aliments ne s’arréragent pas » aux établissements publics de santé tentant de recouvrer leurs créances auprès des obligés alimentaires de leur débiteur défaillant.  

Dans cette affaire, une patiente avait été hospitalisée au sein des Hospices civils de Lyon du 22 janvier au 23 juillet 2008, étant précisé que la caisse de sécurité sociale avait délivré un accord de prise en charge limité jusqu’au 3 juin 2008. Les frais postérieurs à cette date étaient donc demeurés à la charge de la patiente. 

Devant l’absence de paiement par cette dernière, l’établissement de santé avait assigné devant le Juge des affaires familiales les obligés alimentaires de la patiente sur le fondement de l’article L. 6145-11 du Code de la santé publique. 

La Cour de Cassation a confirmé sa position, et considéré que : 

« Mais attendu que l’arrêt rappelle, à bon droit, que le recours d’un établissement public de santé contre les débiteurs alimentaires d’une personne hospitalisée est à la mesure de ce dont ces débiteurs sont redevables ; que, la règle « aliments ne s’arréragent pas » étant fondée sur l’absence de besoin et sur la présomption selon laquelle le créancier a renoncé à agir contre ses débiteurs alimentaires, elle s’apprécie en la seule personne du créancier d’aliments

Et attendu qu’ayant constaté, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, que l’établissement public ne renversait pas la présomption, selon laquelle Mme Y…, qui était hébergée depuis plusieurs mois lorsque la prise en charge par la sécurité sociale s’était interrompue, avait renoncé à agir contre ses débiteurs alimentaires, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ; » 

Ainsi, cet arrêt met une nouvelle fois en exergue les limites de l’action directe effectuée sur ce fondement de ces dispositions législatives, et nécessite d’anticiper l’absence de règlement des créances.  

En effet, la règle selon laquelle les « aliments ne s’arréragent pas » repose sur une double présomption : l’absence de besoin et la renonciation du créancier à agir contre les débiteurs alimentaires. Cette présomption n’étant irréfragable, il appartient à l’établissement public de santé créancier de démontrer qu’il n’a pas renoncé à agir, ce qui nécessite de démontrer des actions concrètes de sa part avant l’assignation des débiteurs alimentaires, actions qui seront l’objet d’une appréciation souveraine des juges du fond. 

A cet égard, pourraient notamment être mises en œuvre les dispositions de l’article R. 6145-4 du Code de la santé publique aux termes desquelles « Dans le cas où les frais de séjour, de consultations ou d’actes des patients ne sont pas susceptibles d’être pris en charge, soit par un organisme d’assurance maladie, soit par le ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre ou par tout autre organisme public, les intéressés ou, à défaut, leurs débiteurs ou les personnes désignées par les articles 205, 206, 207 et 212 du code civil souscrivent un engagement d’acquitter les frais de toute nature afférents au régime choisi. Ils sont tenus, sauf dans les cas d’urgence, de verser au moment de l’entrée du patient dans l’établissement une provision renouvelable calculée sur la base de la durée estimée du séjour, des frais de consultations, d’actes, ou d’un tarif moyen prévisionnel du séjour arrêté par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. Sous réserve des dispositions de l’article L. 253-2 du code de l’action sociale et des familles, lorsque la provision versée est supérieure aux montants dus, la différence est restituée à la personne qui l’a versée ».