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L’instruction du 29 juillet 2015 émanant de la Direction Générale de l’Offre de Soins (n° DGOS/RH3/2015/261) rappelle aux établissements publics de santé qu’il ne leur sera désormais plus possible d’adhérer au régime d’assurance chômage.

Ce changement intervenant dans la gestion de l’indemnisation du chômage est une conséquence de la loi HPST du 21 juillet 2009, n°2009-879.

Depuis la loi HPST, l’article L. 6141-1 du code de la santé publique, définissant les établissements publics de santé, est rédigé ainsi : Les établissements publics de santé sont des personnes morales de droit public dotées de l’autonomie administrative et financière. Ils sont soumis au contrôle de l’Etat dans les conditions prévues par le présent titre. Leur objet principal n’est ni industriel ni commercial.

Le ressort des centres hospitaliers peut être communal, intercommunal, départemental, régional, interrégional ou national. Ils sont créés par décret lorsque leur ressort est national, interrégional ou régional et par arrêté du directeur général de l’agence régionale de santé dans les autres cas.

Les établissements publics de santé sont dotés d’un conseil de surveillance et dirigés par un directeur assisté d’un directoire.

L’interprétation de cette disposition laissait planer quelques doutes quant au statut des établissements publics de santé. Toutefois, la circulaire du 14 février 2012, relative au guide de bonnes pratiques en matière de marchés publics (EFIM1201512C), dans sa première partie 1-1, dispose de manière très explicite que : Les établissements publics de santé qui, depuis la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, sont des établissements publics administratifs de l’Etat et non plus des établissements publics locaux, ainsi que les établissements du service de santé des armées sont soumis à certaines dispositions spécifiques (seuils de procédure formalisée applicables aux collectivités territoriales, délais de paiement particuliers). Les syndicats interhospitaliers sont soumis au même régime que les établissements de santé.

 La loi HPST a donc donné aux EPS le statut d’établissement public administratif de l’Etat.

Or, l’article L. 5424-2 du Code du travail prévoit que :Les employeurs mentionnés à l’article L. 5424-1 assurent la charge et la gestion de l’allocation d’assurance. Ceux-ci peuvent, par convention conclue avec l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1, pour le compte de l’organisme mentionné à l’article L. 5427-1, lui confier cette gestion.

Il résulte de cette disposition que certains employeurs assurent eux-mêmes la charge et la gestion de l’allocation d’assurance chômage, c’est-à-dire qu’ils sont en situation d’auto-assurance. Les employeurs concernés sont mentionnés à l’article L. 5424-1 du Code du travail : Ont droit à une allocation d’assurance dans les conditions prévues aux articles L. 5422-2 et L. 5422-3 :

1° Les agents fonctionnaires et non fonctionnaires de l’Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ainsi que les militaires ;

 Il s’ensuit que les établissements publics de l’Etat, et donc les établissements publics de santé, sont en situation d’auto-assurance.

 La possibilité dont disposaient les EPS d’adhérer au régime de l’assurance chômage disparaît par l’effet de cette qualification d’établissement public de l’Etat opérée par la loi de 2009. La période transitoire de changement de régime prend fin le 15 septembre 2015 : à cette date, tous les EPS seront donc automatiquement en régime d’auto-assurance.

Les conséquences seront importantes pour les établissements concernés, qui devront dès lors examiner les droits à l’allocation d’assurance chômage de tous les agents qui cesseront leur travail, procéder au calcul du montant de ces allocations, faire les déclarations fiscales nécessaires, gérer les contentieux éventuels…

En effet, la détermination du droit à l’allocation d’assurance chômage n’est pas évidente.

L’article L. 5422-1 du code du travail indique que :« Ont droit à l’allocation d’assurance les travailleurs involontairement privés d’emploi ou dont le contrat de travail a été rompu conventionnellement selon les modalités prévues aux articles L. 1237-11 et suivants, aptes au travail et recherchant un emploi qui satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure. »

Il résulte de ce texte que, pour bénéficier de l’ARE, un travailleur doit notamment être privé involontairement d’emploi.

L’article 2 du règlement général du 14 mai 2014, annexé à la convention du 14 mai 2014 relative à l’indemnisation du chômage, énumère des cas où un travailleur est considéré comme involontairement privé d’emploi. Ce texte indique notamment qu’un travailleur peut être en situation de perte involontaire d’emploi suite à une démission, dans les cas envisagés à l’accord d’application n°14 du 14 mai 2014.

Toutefois, cet accord d’application n°14 a valeur indicative. En effet, le Conseil d’Etat, dans un arrêt mentionné aux tables du recueil Lebon, du 2 mai 1994 (Ministre de l’éducation nationale c/ Commaret, req. n°135773) a retenu la solution suivante :

« Considérant que par arrêté du 21 août 1988, le ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale chargé de l’emploi a agréé la convention du 6 juillet 1988 relative à l’assurance chômage et le règlement annexé à cette convention ; qu’en vertu des dispositions du deuxième paragraphe du premier article de ce règlement, les salariés qui ont démissionné pour un motif reconnu légitime par la commission paritaire des A.S.S.E.D.I.C. peuvent bénéficier du régime d’assurance chômage et ont droit à l’allocation de base ; que, toutefois, s’agissant de la démission d’un agent non fonctionnaire de l’Etat, il appartient à la seule autorité administrative compétente d’apprécier, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si les motifs de cette démission permettent d’assimiler celle-ci à une perte involontaire d’emploi »

Cet arrêt indique que l’administration peut dépasser les cas de démissions légitimes prévus par l’accord du 14 mai 2014, en se livrant à une appréciation circonstanciée des motifs invoqués par le travailleur.

Par conséquent, l’employeur en auto-assurance pourra être amené à déterminer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, le caractère légitime de la démission d’un travailleur, au-delà des cas prévus par l’accord du 14 mai 2014.

Il convient toutefois de préciser que les établissements publics de santé peuvent, sur le fondement de l’article L. 5424-2 du code du travail, passer une convention de gestion avec Pôle emploi, pour se délester de la charge administrative liée au régime de l’auto-assurance.

En revanche, ils seront toujours débiteurs du versement de l’allocation d’assurance chômage aux agents, ainsi que du coût de la prestation assurée par Pôle emploi si une telle convention de gestion est conclue.

Armelle De Brébisson, stagiaire