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CSE - comité social d'établissement mis en place en janvier 2023
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Le comité social d’établissement ou CSE, c’est maintenant !

Article rédigé le 4 décembre 2022 par Me Guillaume Champenois

Le CSE, né de la fusion du comité technique d’établissement et du CHSCT doit être installé début janvier 2023 dans la continuité du résultat des élections professionnelles au sein de la fonction publique hospitalière. Schématiquement, les règles régissant le CSE sont en grande partie celles du comité technique d’établissement à l’exception de deux ou trois points. En revanche, le fonctionnement de la formation spécialisée est sensiblement différent du fonctionnement du CHSCT. L’ordre du jour n’est plus établi d’un commun accord entre le président et le secrétaire et ce dernier n’a plus à sa charge la rédaction du procès-verbal de la séance. Enfin, les visites de service doivent s’opérer sur délibération de l’instance et non à l’initiative de l’un des membres du CSE.

 

 

La fin d’année 2022 est marquée par l’organisation des élections professionnelles générales dans tous les établissements publics de santé et dans tous les établissements sociaux et médico-sociaux de droit public.
À la différence des années précédentes, ce n’est pas un comité technique d’établissement (CTE) et un CHSCT qu’il y aura lieu d’installer dans la continuité du scrutin de décembre 2022 mais le comité social d’établissement. Cette nouvelle instance représentative du personnel comprend une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail laquelle est investie des missions initialement confiées au CHSCT par le législateur par le code du travail.
L’analyse du décret n°2021-1570 du 3/12/2021 est riche d’enseignements et ceux-ci concernent essentiellement les modifications sensibles entre le fonctionnement du CHSCT et le fonctionnement de la formation spécialisée. En effet, le fonctionnement du CSE est, peu ou prou, identique au fonctionnement du CTE

 

Il ne peut etre crée qu’un seul cse, le schema de plusieurs cse et d’un cse central applicable au secteur prive n’est pas possible

Premier enseignement et première différence avec le secteur privé, il ne peut exister qu’un seul comité social d’établissement. Le schéma d’un CSE d’établissement et un CSE central (CSEC) applicable dans le secteur privé n’est pas transposable même si l’établissement public de santé est doté de différents sites géographiques distincts

 

Des formations spécialisées de site créées en cas de risques professionnels particuliers

Deuxième enseignement, il est en revanche possible de créer des formations spécialisées de site. En effet, aux termes de l’article L 251-13 du code général de la fonction publique, en complément des formations spécialisées du comité, une ou plusieurs formation spécialisée de site peuvent être crées « lorsque des risques professionnels particuliers sur un ou plusieurs sites de l’établissement le justifient

Pour rappel, pour la création d’un CHSCT de site, les critères fixés par l’article L 4613-4 du code du travail étaient les suivants ; « la nature, la fréquence et la gravité des risques, aux dimensions et à la répartition des locaux ou groupes de locaux, au nombre des travailleurs occupés dans ces locaux ou groupes de locaux ainsi qu’aux modes d’organisation du travail. »

Le III de l’article 3 du décret précité précise pour sa part que les « formations spécialisées créées en cas de risques professionnels particuliers mentionnées aux I et II peuvent l’être sur proposition de la majorité des membres du comité ».

On retiendra que le désaccord entre le comité technique d’établissement et le directeur de l’hôpital sur le nombre de CHSCT de site devant être créés conduisait nécessairement à la saisine de l’inspecteur du travail lequel tranchait la question par une décision qui s’imposait tant au chef d’établissement qu’au CTE, à charge pour l’un comme pour l’autre de saisir dans les délais fixés par les textes le tribunal administratif territorialement compétent par un recours en annulation.

Rien de tel pour les formations spécialisées de site.

 

Un droit de visite des services clairement encadré

Troisième enseignement qu’il nous semble utile de relever, le décret 2021-1570 du 3 décembre 2021 fixe les modalités d’une inspection des services de l’établissement opérée par les membres de la formation spécialisée laquelle prend désormais la dénomination de « visite de service ». Si le code du travail prévoyait expressément que le CHSCT doit réaliser au minimum 4 inspections par an, le décret précité précise que les visites de service doivent intervenir à intervalle régulier. Surtout, le décret intègre la jurisprudence de la Cour de cassation sur le fait que le droit d’inspection du CHSCT n’est pas un droit individuel et personnel de chacun de ses membres mais une prérogative de l’instance elle-même (Cassation sociale 19 janvier 2010 n°08-45092). Ainsi, la visite d’un service ne peut s’opérer que dans le cadre d’une délibération de la formation spécialisée laquelle doit mandater une délégation de la formation spécialisée pour procéder à ladite visite, en fixe l’objectif, détermine le secteur géographique concerné ainsi que la composition de la délégation précitée.

Il s’évince de ces dispositions règlementaires, qu’un agent siégeant au sein de la formation spécialisée ne peut de son propre chef réaliser « une visite de service ».

 

Une rédaction du règlement intérieur qui est arrête par le chef l’établissement

Quatrième enseignement, en application de l’article 65 du décret du 3 décembre 2021, le règlement intérieur du CSE est désormais arrêté par le chef d’établissement après avis du CSE et après avoir reçu les propositions de la formation spécialisée du CSE et des formations spécialisées de site si elles existent. Il n’est pas prévu de règlement intérieur spécifique à la formation spécialisée.

C’est ici une évolution sensible par rapport au règlement intérieur du CTE et au règlement intérieur du CHSCT.

Aux termes de l’article R6144-68 du code de la santé publique, « chaque comité établit son règlement intérieur. » Autrement formulé, le règlement intérieur du comité technique était adopté par un vote à la majorité des membres présents.

Le règlement intérieur du CHSCT était également adopté à la majorité des membres présents étant observé que le Président de l’instance avait ici le droit de vote.

Reste que l’adoption du règlement intérieur du CHSCT par le CHSCT à l’issu d’un vote a conduit dans les faits à quelques dérives.

En effet, nombres de règlements intérieurs de CHSCT d’établissements publics de santé imposaient à la direction de l’établissement des sujétions non prévues par le code du travail.

Or, il est de jurisprudence constante que le règlement intérieur d’un CHSCT ne peut imposer à l’employeur des sujétions non prévues par le code du travail (confer par exemple : Cour d’appel de Douai, 14ème chambre, arrêt du 30 juin 2009 n°08/07742, SA France Telecom et autre).

À compter du 1er janvier 2023, c’est le Président du CSE qui arrête le règlement intérieur et celui-ci portera tant sur le fonctionnement du CSE que sur le fonctionnement de la ou des formations spécialisées.

 

Il n’y a aucune obligation d’accorder des moyens financiers au CSE pour son fonctionnement

Cinquième enseignement, le décret du 3 décembre 2021 précité ne reprend pas les dispositions de l’article L 4614-9 du code du travail.

Cet article énonçait que « le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail reçoit de l’employeur les informations qui lui sont nécessaires pour l’exercice de ses missions, ainsi que les moyens nécessaires à la préparation et à l’organisation des réunions et aux déplacements imposés par les enquêtes ou inspections ».

Au visa de cet article, le juge judiciaire imposait à l’employeur de donner les moyens matériels et financiers au CHSCT pour préparer les séances (ordinateur, papier, traitement de texte, etc…) sans que cela ne conduise pour autant à devoir mettre à sa disposition un local dédié (confer Cour d’appel de Douai 14ème chambre, arrêt du 30 juin 2009 n°08/07742, SA France Telecom et autre, précité).

En effet, l’ordre du jour était établi d’un commun accord entre le président et le secrétaire et ce dernier devait rédiger le procès-verbal de la séance conformément à la circulaire n°93-15 du 25 mars 1993 relative à l’application de la loi n° 82.1097 du 23 décembre 1982.

Pour le CSE, on relève que le décret du 3 décembre 2021 ne reprend pas à son compte ce schéma et confie la rédaction du procès-verbal du CSE comme la rédaction du procès-verbal de la séance de la formation spécialisée à un agent administratif mandaté à cet effet par la direction.

L’article 63 du décret dispose en effet qu’un « agent, désigné par le directeur d’établissement ou l’administrateur du groupement, assiste aux réunions de ces instances et en assure le secrétariat administratif ». Il n’y a donc pas d’obligation à prévoir un budget de fonctionnement pour le CSE comme c’était le cas pour le CHSCT.

En revanche, le CSE n’ayant pas de budget, l’établissement prendra nécessairement en charge les honoraires de l’expert certifié qui serait désigné par la formation spécialisée pour la réalisation d’une expertise pour risque grave ou pour projet important.

 

Le CSE est seul compétent pour rendre un avis sur les réorganisations de service

Sixième enseignement, le CSE est seul compétent pour rendre un avis sur un projet important qui « s’intègre dans une réorganisation de service » à l’exclusion des formations spécialisées (dispositions combinées des articles 36 et 53 du décret) quand bien même ce projet important impacterait de manière significative les conditions de travail des agents concernés.

En pareille hypothèse, le CSE est seul compétent pour rendre un avis quant bien même ledit projet emporterait des conséquences sur les conditions de travail des agents du service concerné.

 

Une obligation de debattre chaque annee sur les travaux de l’instance et les politiques des ressources humaines

Enfin, septième et dernier enseignement que nous relèverons dans le présent article, aux termes de l’article 35 du décret précité, le CSE doit débattre chaque année sur « 1°La programmation des travaux de l’instance ; 2°L’évolution des politiques des ressources humaines lors de la présentation du rapport social unique

L’obligation de débattre sur la programmation des instances du CSE peut se lire de différentes manières. Ce faisant, c’est ici l’occasion d’aller au-delà de la fixation d’un simple calendrier des instances et de s’engager mutuellement sur un vrai dialogue social en établissant un programme annuel sur quelques sujets centraux en lien tant avec les objectifs de la direction qu’en lien avec les revendications des organisations syndicales, pour in fine répondre collectivement aux contraintes fortes auxquelles les établissements publics de santé sont confrontés.

 

Conclusion

En conclusion, l’installation du CSE ainsi que des formations spécialisées induisent de bien appréhender ces nouveaux textes et de bien se projeter sur de nouvelles règles de fonctionnement qui vont nécessairement bouleverser les habitudes.

Nous distinguons un enjeu majeur pour les directions des établissements et une opportunité pour lesdites directions et les organisations syndicales.

L’enjeu majeur est de ne pas perpétuer certaines pratiques qui étaient déjà non conformes aux dispositions législatives et règlementaires encadrant le fonctionnement du CHSCT.

L’opportunité est celle de l’ouverture d’un véritable dialogue social. Cela induit des efforts importants tant du côté des directions des établissements que des organisations syndicales. Pour débuter, pourquoi ne pas envisager de participer en commun à une formation dédiée au fonctionnement du CSE ?

 

Guillaume CHAMPENOIS est associé et responsable du pôle social – ressources humaines au sein du Cabinet.

Il bénéficie de plus de 16 années d’expérience dans les activités de conseil et de représentation en justice en droit de la fonction publique et droit du statut des praticiens hospitaliers.

Expert reconnu et formateur sur les problématiques de gestion et de conduite du CHSCT à l’hôpital, il conseille les directeurs d’hôpitaux au quotidien sur l’ensemble des problématiques statutaires, juridiques et de management auxquels ses clients sont confrontés chaque jour.

Il intervient également en droit du travail auprès d’employeurs de droit privé (fusion acquisition, transfert d’activité, conseil juridique sur des opérations complexes, gestion des situations de crise, contentieux sur l’ensemble des problématiques sociales auxquelles sont confrontés les employeurs tant individuelles que collectives).