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jurisprudence judiciaire
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hospitalisation d’office et motivation des arrêtés   

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 29 septembre 2021, 20-14.611 

Rappelant l’exigence indispensable d’une motivation des arrêtés à deux niveaux en cas d’hospitalisation d’office, l’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 29 septembre 2021 illustre la nécessité d’un équilibre entre liberté individuelle et protection de l’ordre public.

L’article L. 3213-2 du CSP instaure une procédure d’urgence d’hospitalisation d’office : « en cas de danger imminent pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical, le maire et, à Paris, les commissaires de police arrêtent, à l’égard des personnes dont le comportement révèlent des troubles manifestes, toutes les mesures provisoires nécessaires, à charge d’en référer dans les vingt-quatre heures au représentant de l’État dans le département qui statue sans délai et prononce, s’il y a lieu, un arrêté d’admission en soins psychiatriques »

En l’espèce et sur ce fondement, le maire d’une commune avait ordonné l’hospitalisation provisoire d’un malade au sein d’un établissement public de santé, suivi le lendemain d’une décision du préfet du département d’admission en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d’une hospitalisation complète. La famille du malade a alors fait assigner en responsabilité la commune, l’État et l’établissement public de santé devant le juge judiciaire et contesté la régularité des décisions administratives.
Si la Cour d’Appel de Paris a rejeté la demande d’annulation des arrêtés préfectoraux, les considérant comme suffisamment motivés, elle a en revanche annulé l’arrêté municipal.
La famille du malade s’est alors pourvue en cassation tandis que la commune a formé un pourvoi incident.

Rejetant ces deux pourvois, la Haute juridiction conclut en premier lieu à la motivation suffisante des arrêtés préfectoraux sur fondement de l’article L 3213-1 du CSP. En effet, la CA a bien relevé d’une part, que l’arrêté préfectoral du 28 mai 2014 vise deux certificats médicaux dont il déclare s’approprier leur contenu tout en précisant que le premier est joint et que le second conclut à la dangerosité. D’autre part, que selon les termes même des certificats médicaux et de l’arrêté, ces troubles mentaux « nécessitent des soins et compromettent la sureté des personnes ». Les deux prérequis d’une hospitalisation d’office, à savoir l’existence de troubles mentaux ainsi que la compromission de la sureté des personnes ou le risque d’atteinte grave à l’ordre public sont vérifiés et les arrêtés du préfet suffisamment motivés.

En revanche, tel n’est pas le cas de l’arrêté municipal. Se fondant tant sur l’article 3213-2 du CSP que sur les dispositions du Code des relations entre le public et l’administration, la Cour de cassation confirme le raisonnement de la CA, jugeant cet arrêté « insuffisamment motivé, et partant, irrégulier ». En effet, ce dernier d’une part ne mentionnait pas le moindre élément laissant à penser que le malade était dangereux et d’autre part, ne précisait pas s’approprier le contenu du certificat d’un expert psychiatre et n’indiquait pas que l’avis de ce praticien était joint à la décision.

Le rappel par la Haute Juridiction de ces garde fous à deux niveaux témoigne ainsi de l’importance d’un équilibre à trouver entre liberté individuelle des malades atteints de troubles mentaux et préservation de l’ordre public. La seule constatation de tels troubles mentaux ne saurait justifier à elle seule une mesure d’hospitalisation d’office : encore faut il que l’arrêté, tant préfectoral que municipal atteste d’une suffisante motivation.

Se faisant, si la Haute juridiction rappelle l’exigence fondamentale de motivation des arrêtés municipaux, la distinction faite n’en est pas moins claire : la responsabilité de la commune reste indépendante de celle des praticiens et personnels hospitaliers dans les modalités de prise en charge des patients concernés.

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