Protection fonctionnelle des agents : Débat et Explications
Interview réalisé le 23 septembre 2024 par Me Pierre-Yves Fouré et Me Laurent Houdart
La protection fonctionnelle, qu’est-ce que c’est ?
Article rédigé le 23 septembre 2024 par Marie Courtois
Vous êtes un agent public ? Praticiens hospitaliers, praticiens contractuels, personnels enseignants d’un CHU, étudiants en médecine ? Votre administration a le devoir de vous protéger et de vous assister dans l’hypothèse où vous seriez victime d’une agression dans le cadre de votre travail ou mis en cause dans l’exercice de vos fonctions. On parle de « protection fonctionnelle ».
De quoi s’agit-il ? Comment l’obtenir ? On vous explique tout ce qu’il faut savoir.
La protection fonctionnelle est un dispositif mis en œuvre par l’état dont l’objet est d’apporter un soutien à l’agent public, victime d’une agression en raison de sa qualité d’agent public, ou poursuivi pour des faits commis dans l’exercice de ses fonctions. Les mesures de protection fonctionnelle prennent plusieurs formes :
- Des actions de soutien et de prévention permettant d’assurer la sécurité de l’agent et sa prise en charge médicale et psychologique si nécessaire. L’administration peut diligenter une enquête, donner des droits de réponse, engager, le cas échéant, une procédure disciplinaire à l’encontre de l’auteur présumé des attaques s’il est un agent public. Il s’agit d’assurer à l’agent un soutien moral et institutionnel.
- La fourniture d’une assistance juridique et judiciaire à l’agent. L’administration doit offrir à l’agent une assistance juridique gratuite : l’agent pourra choisir librement son avocat et ce dernier sera rémunéré par l’administration. Les frais de procédure et les condamnations civiles prononcées à raison de faute de services seront également pris en charge.
- La réparation des préjudices subis par l’agent qu’ils soient économiques, personnels, matériels, corporels ou moraux. L’administration sera alors subrogée dans les droits de l’agent contre le tiers responsable.
Quels agents peuvent en bénéficier ?
Remarque : Vous pouvez bénéficier de la protection fonctionnelle de votre administration que vous soyez fonctionnaire ou contractuel. Vous pouvez aussi en bénéficier si vous êtes un ancien agent public (ex. retraité). Votre demande devra alors s’adresser à l’administration qui vous employait à la date des faits en cause.
Comment l’obtenir ?
Faire sa demande : A qui s’adresser et dans quel délai ?
Avant toute démarche, il vous faut informer votre hiérarchie : elle n’a pas nécessairement eu connaissance de l’agression dont vous avez été victime ou des poursuites pénales dont vous faites l’objet.
Ensuite, vous devez adresser votre demande de protection fonctionnelle par écrit à votre administration. Si vous êtes membre du personnel de direction, il faudra adresser votre demande au directeur général de l’ARS ou au préfet. Cette demande peut prendre la forme d’un papier libre, d’un courriel électronique mais il existe aussi des formulaires dédiés.
Aucun délai n’est prévu pour effectuer sa demande, mais plus tôt elle est faite, mieux c’est ! Cela vous évitera d’avancer les frais d’avocats et le montant des éventuelles condamnations civiles. Attention, elle devra être demandée à chaque nouvelle étape de la procédure (première instance, appel, cassation).
Monter son dossier : Quelles pièces fournir ?
Votre demande de protection fonctionnelle doit être motivée. Elle doit apporter toutes précisions utiles sur les faits ou les poursuites pour éclairer l’autorité compétente dans sa prise de décision.
L’agent peut adjoindre à sa demande :
- Un compte-rendu des faits,
- Un rapport de son supérieur hiérarchique,
- Des certificats médicaux,
- Des attestations de témoins,
- L’éventuel récépissé du dépôt de plainte aux services de police ou de gendarmerie ou de la convocation judiciaire.
L’agent peut également préciser dans sa demande les modalités de la protection fonctionnelle dont il souhaite bénéficier (soutien, assistance juridique).
L’examen de la demande : les conditions exigées sont-elles remplies ?
Vous pouvez bénéficier de la protection fonctionnelle si vous êtes victime d’une agression ou mis en cause dans le cadre de vos fonctions. Les conditions d’octroi sont différentes selon cette qualité.
Si vous remplissez ces conditions, l’administration sera tenue de vous accorder la protection fonctionnelle (sauf hypothèse où elle invoquerait un motif d’intérêt général).
La décision de l’administration
Que se passe-t-il concrètement une fois votre demande envoyée ?
L’administration accusera sa bonne réception. Elle pourra, si elle l’estime nécessaire, solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction du dossier.
Ensuite, dans un souci de bonne administration et dans l’intérêt de l’agent, elle statuera dans les meilleurs délais et apportera une réponse écrite.
- En cas de refus de la protection fonctionnelle, la décision doit être motivée en fait et en droit et comporter les voies et délais de recours. Le silence gardé par l’administration pendant deux mois vaut rejet de la protection (Article L.231-4 5° du CRPA).
- En cas d’acceptation, l’autorité administrative devra indiquer dans quelles modalités elle envisage d’accorder la protection.
Un coût pour l’agent public ?
En principe, la protection fonctionnelle couvre l’ensemble des frais que vous pourriez être conduit à engager. Toutefois, il ressort de la récente circulaire, une volonté de rationner les dépenses de l’administration et ce en contrôlant les honoraires des avocats. L’administration ayant consigne d’apprécier l’excessivité des honoraires des avocats et de ne payer que ce qu’elle estime raisonnable, vous pourriez être contraint de sortir votre porte-monnaie.
Depuis sa prestation de serment (février 2000), Pierre-Yves FOURÉ conseille et défend directeurs d’établissements, cadres et professionnels du monde de la santé (établissements de santé, médecins, établissements médico-sociaux, organismes d’assurance maladie et complémentaires), de l’université, ainsi que tous dirigeants et institutions nationales, déconcentrées ou locales.
Avocat de la défense dans les affaires complexes à forts enjeux de responsabilités (sang contaminé, amiante, surriradiés, accidents graves, harcèlement et conflits professionnels, infractions aux biens), Pierre-Yves FOURÉ est également le conseil de proximité au quotidien comme celui des situations de crises médiatisées.
Pierre-Yves FOURÉ intervient devant les juridictions pénales (juge d’instruction, tribunal correctionnel), disciplinaires (conseil de l’ordre), financières (cour de discipline budgétaire et financière), administratives ou civiles.
Au-delà de sa maitrise des matières juridiques qu’il pratique depuis plus de 20 ans, Pierre-Yves FOURÉ est reconnu pour son engagement dans la défense et la forte dimension humaine de la relation client.
Fondateur du Cabinet Houdart et Associés en 1987, Laurent Houdart assiste, conseille et représente nombres d’opérateurs publics comme privés au sein du monde sanitaire et médico-social depuis plus de 20 ans.
Après avoir contribué à l’émergence d’un « Droit de la coopération sanitaire et médico-sociale », il consacre aujourd’hui une part importante de son activité à l’accompagnement des établissements de santé publics comme privés dans la restructuration de l’offre de soins (fusions, transferts partiel d’activité, coopération publique & privé, …).
Expert juridique reconnu dans le secteur sanitaire comme médico-social, il est régulièrement saisi pour des missions spécifiques sur des projets et ou opérations complexes (Ministère de la santé, Ministère des affaires étrangères, Fédération hospitalière de France, AP-HM,…).
Il ne délaisse pas pour autant son activité plaidante et représente les établissements publics de santé à l’occasion d’affaires pénales à résonance nationale.
Souhaitant apporter son expérience au monde associatif et plus particulièrement aux personnes en situation de fragilité, il est depuis 2015 Président de la Fédération des luttes contre la maltraitance qui regroupe 1200 bénévoles et 55 centres et reçoit plus de 33000 appels par an.
Etudiante en première année de master, Marie Courtois a rejoint le Cabinet HOUDART & Associés, en qualité de juriste, en septembre 2023.
En charge de la veille juridique et jurisprudentielle, elle met ses compétences rédactionnelles au service du cabinet. Attentive à l’actualité législative, règlementaire et jurisprudentielle liée au domaine médico-social, elle décrypte pour vous les derniers arrêts rendus par la Cour de cassation ou le Conseil d’État et les textes récents.