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Par un arrêt du 3 février 2012, N° 353737 publié au recueil Lebon, le Conseil d’Etat vient confirmer et renforcer une jurisprudence désormais bien établie concernant la légalité des coopérations entre personnes publiques au regard du droit des marchés publics (et des délégations de service public).

La COMMUNE DE VEYRIER-DU-LAC a signé le 21 mai 2011 avec la COMMUNAUTE D’AGGLOMERATION D’ANNECY, dont elle n’est pas membre, une convention ayant pour objet d’instaurer une entente entre elles dans les conditions définies par les dispositions des articles L. 5221-1 et L. 5221-2 du code général des collectivités territoriales, visant à confier à la communauté d’agglomération, dont la population excède 140 000 habitants, l’exploitation du service public de distribution d’eau potable sur le territoire de la commune, qui compte environ 2 200 habitants.

La société Lyonnaise des eaux France a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Grenoblesur le fondement de l’article L. 551-13 du code de justice administrative qui a annulé cette convention au motif qu’elle était constitutive d’une délégation de service public, conclue en méconnaissance des obligations de publicité et de mise en concurrence inhérentes à la passation de telles conventions.

La COMMUNE DE VEYRIER-DU-LAC et la COMMUNAUTE D’AGGLOMERATION D’ANNECY se sont pourvues en cassation contre cette ordonnance.

Le Conseil d’Etat, après avoir rappelé que l’article L. 5221-1 du code général des collectivités territoriales autorise la constitution d’ententes entre collectivités territoriales et établissements publics de coopération ou syndicats mixtes et qu’une commune peut accomplir les missions de service public qui lui incombent par ses propres moyens ou en coopération avec d’autres personnes publiques, selon les modalités prévues par le législateur, annule l’ordonnance du 12 octobre 2011 du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble et la demande de la société Lyonnaise des eaux France qu’elle condamne à verser 2000 € à chacune des collectivités en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il considère :
– d’une part, que la convention litigieuse, conclue à des fins des coopération entre personnes publiques dans le cadre de relations qui ne sont pas celles du marché, n’était pas soumise aux règles de la commande publique ;
– d’autre part, que, par suite, cette convention était hors du champ d’application de l’article L. 551-13 du code de justice administrative.

Deux éléments qui ont contribué à la décision méritent d’être relevés :

– la convention litigieuse avait pour objet de faire prendre en charge par la communauté d’agglomération le service public de distribution d’eau de la COMMUNE DE VEYRIER-DU-LAC, jusqu’alors exploité dans le cadre d’une délégation de service public ; la communauté d’agglomération exerçant cette compétence de la distribution d’eau sur son propre territoire, l’entente tendait à l’exploitation d’un même service public, en continuité géographique, sur l’ensemble du territoire couvert par ces deux personnes publiques, sous la responsabilité opérationnelle de la communauté d’agglomération ; la convention devait ainsi permettre à la COMMUNE DE VEYRIER-DU-LAC, qui met à disposition de l’entente l’intégralité de ses propres infrastructures, de bénéficier des installations plus performantes de la communauté d’agglomération ;

– le tarif de l’eau fixé par la convention pour les usagers de la COMMUNE DE VEYRIER-DU-LAC correspondait, en sa partie fixe, à la répartition entre usagers de la quote-part de la commune dans les investissements à réaliser sur les installations mutualisées, et en sa partie proportionnelle au prix coûtant de la production et de l’acheminement par mètre cube d’eau potable, supporté par la régie directe de la communauté d’agglomération ; la convention stipulait que ce prix proportionnel était révisé chaque année selon le même indice que celui du tarif appliqué aux usagers de la COMMUNAUTE D’AGGLOMERATION D’ANNECY par la régie gestionnaire du service, dont les recettes doivent strictement équilibrer les dépenses ; ainsi, la convention litigieuse n’avait pas provoqué de transferts financiers indirects entre collectivités autres que ceux résultant strictement de la compensation de charges d’investissement et d’exploitation du service mutualisé, et la communauté d’agglomération ne pouvait être regardée comme agissant tel un opérateur sur un marché concurrentiel.