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Création du GTSMS
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CONTRIBUTIONS à LA CREATION DU GTSMS (PARTIE 2/2)

Article rédigé le 29 janvier 2024 par Me Laurine Jeune

Suite et fin de notre analyse du GTSMS et de nos propositions pour améliorer ce nouvel outil (Pour retrouver le PRÉCÉDENT article consacré à la création du gtsms, c’est par ici).
Pour rappel, l’ambition des auteurs du GTSMS prévu par la Proposition de loi dite “Bien Vieillir”, est de développer les coopérations entre les EHPAD publics. Rappelons toutefois que le texte adopté en première lecture à l’Assemblée Générale vise plus largement les établissements et services médico-sociaux publics du secteur de la personne âgée.
La coopération et au-delà les restructurations publiques est une nécessité face aux enjeux et difficultés plurielles qui caractérise ce secteur : manque d’effectif et de financement, difficulté pour les établissements publics de santé à concilier sanitaire et médico-social, difficultés du secteur privé…etc.

 

Dans une optique de réussite des GTSMS, nous avons prioritairement formulé des propositions relatives aux conditions d’adhésion des acteurs.
D’autres paramètres nous semblent incontournables pour que les acteurs disposent des moyens permettant au GTSMS d’atteindre son objectif de développement des coopérations, et au-delà pour que les acteurs mettent en œuvre des coopérations efficaces.

 

PROPOSITIONS N°2 et N°3 : DOTER LES ACTEURS DES MOYENS D’AGIR ET DE S’APPROPRIER LEUR GTSMS

 

Créer une ambition – à savoir développer les coopérations et restructurations – sans doter les acteurs des moyens pour s’approprier le GTSMS serait une erreur.

Les auteurs du GTSMS ont manifestement voulu tirer les enseignements du passé et des difficultés de la création du GHT, en dotant le GTSMS d’une personnalité morale et en laissant trois ans aux acteurs pour créer le GTSMS.

Toutefois, en menant jusqu’au bout la réflexion, on s’aperçoit que deux paramètres manquent à l’appel :  la volonté des acteurs de participer au GTSMS et l’adaptation des outils.

 

La volonté des acteurs 

Imposer la création des GTSMS aux acteurs (en tout ou partie), ne permettrait pas d’atteindre la cible escomptée à savoir accélérer les coopérations pour préserver nos EHPAD publics.

Ce sont les acteurs du terrain qui sont les plus à mêmes de définir leurs besoins et les mesures à mettre en place et donc de réussir leurs projets. Et certains s’y sont déjà attelés avec succès.

D’ailleurs, tout en imposant aux personnes publiques autonomes d’adhérer à un groupement, le texte de la Proposition de loi dispose que le GTSMS « est constitué à l’initiative des établissements et des services ».

Aussi, et pour accélérer les coopérations escomptées mais aussi les restructurations, il pourrait être envisagé de créer une obligation de définition dans un délais contraint (par exemple 3 ans) d’un projet stratégique médico-social de territoire qui pourrait être porté et mis en œuvre au sein du GTSMS.

Ce projet serait défini au terme d’un diagnostic des besoins mené en commun par les acteurs en lien avec les tutelles et financé par l’Etat.

Le projet stratégique médico-social aurait pour objet de fixer les mesures et modalités de coopérations et de restructurations (fusion, transfert d’activité) à mettre en place et le calendrier correspondant.

 

L’adaptation des outils :

Comme évoqué dans un précédent article, le GCSMS qui sera la forme juridique que le GTSMS prendra, é été créé par la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale et n’a depuis lors guère fait l’objet de réforme.

En pourtant, les besoins d’évolution ou de clarifications ne manquent pas.

Si les coopérations en matière médico-sociales sont beaucoup moins développées que dans le secteur sanitaire, elles ne sont pas pour autant inexistantes.

Les actions de coopérations menées ici et là impliquent en majorité une coordination des acteurs ou encore la mutualisation de moyens. Mais de plus en plus, les acteurs recherchent des coopérations plus intégrées comme la gestion commune d’activité médico-sociales ou de fonctions.

Or, la mise en œuvre de ces coopérations dans le cadre d’un GCSMS se heurte à des dispositions lacunaires voire inadaptées, parfois source de confusion et d’interprétation bloquante de la part des autorités de tutelle.

Ce n’est pas tant la création du GTSMS que l’adaptation des textes relatifs au GCSMS qui est ici requise.

Soulignons cependant que la Proposition de loi dite « Bien Vieillir » offre de réelles perspectives en autorisant par exemple la conclusion d’un CPOM « unique » ou encore la mutualisation des disponibilités et la présentation d’un plan pluriannuel d’investissement (PPI).

En pratique, elles ne trouveront à notre sens de traduction que dans l’hypothèse où le groupement organise la mutualisation d’activités médico-sociales. Ainsi, le GTSMS ne pourra conclure de CPOM « unique » que pour les établissements et services « qui relève[ro]nt de son périmètre » comme le prévoit la Proposition de loi.

En outre, ces évolutions n’apparaissent pas ouvertes aux acteurs publics du secteur du handicap qui initieraient un projet dédié sans lien avec le secteur de la personne âgée. Pourtant, plusieurs d’entres eux demeurent dans l’attente d’une évolution législative en ce sens. Il semble néanmoins que la commission des affaires sociales du Sénat souhaite que ce nouveau groupement puisse investir le champ du handicap (cf. amendement n°163 proposé).

Pour citer un autre exemple qui semble constituer une avancée, le GTSMS tel qu’il ressort de la Proposition de loi offre la possibilité d’assurer la « gestion des achats » pour le compte de ses membres. Le texte ajoute que les membres d’un GTSMS « peuvent notamment mutualiser certains marchés et partager des compétences relatives à la passation des marchés publics. »

En première lecture, on pourrait croire que – comme cela est souhaité par plusieurs acteurs que nous accompagnons – le GTSMS pourra conclure des marchés pour le compte de ses membres. Or, la formulation apparait maladroite pour en garantir pleinement les effets. Il est impératif que les règles de la commande publique soient prises en compte. En outre, anticiper la fiscalité qui pourrait y être associée nous semble indispensable.

Par ailleurs, et compte-tenu en particulier des besoins des EHPAD en matière de reconstruction immobilière, il serait plus que nécessaire que le GTSMS puisse assurer la réalisation d’investissements répondants aux besoins de tous ou partis des acteurs avec la détermination d’un régime de responsabilité aux dettes fixé par la convention constitutive.

Enfin, lorsqu’on s’intéresse au GTSMS en tant qu’outil de rationalisation des modes de gestion et bien que la fusion ne soit pas expressément visée par la Proposition de loi, on peut s’interroger sur l’absence de dispositions qui confèreraient enfin un cadre légal aux fusions d’établissements publics médico-sociaux. Ces opérations sont en effet de plus en plus courantes et les établissements tout comme leurs tutelles et les collectivités territoriales sont bien démunies pour les mener.

Aussi, nous appelons à l’adaptation du cadre légal pour que le GTSMS puisse bénéficier des dispositions du GCSMS de droit commun et dispositions particulières, propres au secteur public, destinées à faciliter leurs coopérations et restructurations, mais aussi pour faciliter les coopérations portées par le GCSMS.

 

PROPOSITIONS N°4 : CLARIFIER LA GOUVERNANCE

 

Le GTSMS serait dirigé par un directeur d’établissement sanitaire, social ou médico-social nommé par le directeur général de l’ARS, après avis du président du conseil départemental, sur proposition de l’assemblée générale.

Ce directeur peut être commun à tout ou partie des établissements membres.

Il serait chargé du pilotage des fonctions, de représenter le GTSMS, d’élaborer le budget et du recrutement des agents fonctionnaires et contractuels.

L’idée d’un directeur du GTSMS est certes intéressante mais est en contradiction avec les textes concernant les GCSMS dont le représentant légal est un administrateur élu par l’assemblée générale.

En l’état, la Proposition de loi ferait coexister un directeur de GTSMS et l’administrateur du GCSMS.

Nous ne pouvons que mettre en garde le législateur sur un tel dispositif qui va créer des contradictions voire interdire sa mise en œuvre opérationnelle.

Le GTSMS doit avoir à sa tête un seul représentant légal unique en l’occurrence un administrateur qui puisse, si les acteurs le décident et uniquement dans cette hypothèse, assurer des missions de directions territoriales.

Ses fonctions devront être valorisées notamment sur le plan financier (exercice sur plusieurs sites) et sa formation suivie à l’EHESP devra être renforcée. Il s’appuierait sur une équipe de direction fonctionnelle.

La seule voie serait soit de modifier le régime des GCSMS pour le rapprocher de celui par exemple des GIP, soit plus simplement de prévoir une dérogation pour les GTSMS et que les fonctions de l’administrateur sont assurées par le directeur.

En outre, on peut s’interroger sur la place des élus, des professionnels et des usagers. La loi pourrait prévoir la création d’un conseil médico-social de territoire regroupant l’ensemble des gestionnaires, personnes publiques autonomes, CC(I)AS, établissements publics de santé, mais aussi les autres acteurs à savoir les élus, les professionnels de santé et les usagers (voire d’autres acteurs tels que les Gérontopôles ou le DAC), répartis au sein de collèges.

Ce conseil serait sollicité pour avis dans le cadre de l’élaboration du projet stratégique médico-social de territoire.

 

Me Laurine Jeune, avocate associée, a rejoint le Cabinet Houdart et Associés en janvier 2011.

Elle conseille et accompagne depuis plus de douze ans les acteurs du secteur de la santé et du médico-social, publics comme privés, dans leurs projets d’organisation ou de réorganisation de leurs activités :

- Coopération (GCS de moyens, GCS exploitant, GCS érigé en établissement, GCSMS, GCSMS exploitant, GIE, GIP, convention de coopération, co-construction,…etc.)
- Transfert partiel ou total d’activité (reprise d’activités entre établissements (privés vers public, public vers privé, privé/privé, public/public),
- Fusion (fusion d’association, fusion entre établissements),
- Délégation et mandat de gestion,
- GHT, etc.

Me Laurine Jeune intervient également en qualité de conseil juridique auprès des acteurs privés en matière de création et de fonctionnement de leurs structures (droit des associations, droit des fondations, droit des sociétés).

Enfin, elle intervient sur des problématiques juridiques spécifiquement liés à :

- la biologie médicale,
- la pharmacie hospitalière,
- l’imagerie médicale,
- aux activités logistiques (blanchisserie, restauration),
- ou encore à la recherche médicale.