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jurisprudence judiciaire
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Nouvelles questions prioritaires de constitutionnalité en matière de soins psychiatriques sans consentement transmises par la cour de cassation au conseil constitutionnel  

Article rédigé par Alice Agard et Nelson Deecke

Cour de cassation, première chambre civile, 26 janvier 2023 (n°22-40.019)

Cour de cassation, première chambre civile, 26 janvier 2023 (n°22-40.021)

Deux questions prioritaires de constitutionnalité (« QPC ») relatives aux soins psychiatriques sans consentement ont été transmises le 26 janvier dernier par la 1ère chambre civile de la Cour de cassation au Conseil constitutionnel.

Dans ces affaires, les personnes concernées avaient fait l’objet, sur le fondement de l’article L. 3212-1, II., 2° du Code de la Santé Publique (« CSP »), d’une mesure d’hospitalisation complète pour péril imminent prononcée par le directeur de chacun de ces établissements.

Dans l’affaire n°22-40.019, la personne est admise en soins psychiatriques sans consentement le 11 octobre 2022. Huit jours plus tard, soit le 17 octobre, elle est placée en chambre d’isolement. Le 19 octobre, avant que le délai de 72 heures prévu par l’article L. 3222-5-1 du CSP ne vienne à expirer, le directeur de l’établissement a saisi le Juge des Libertés et de la Détention (« JLD ») afin qu’il soit statué sur le renouvellement de cette mesure.

C’est dans ces conditions que, par ordonnance du 21 octobre 2022, le JLD a transmis à la Cour de cassation la QPC suivante : « Les dispositions de l’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, en ce qu’elles ne prévoient pas d’obligation pour le directeur de l’établissement spécialisé en psychiatrie ou pour le médecin d’informer le patient soumis à une mesure d’isolement ou de contention – et ce, dès le début de la mesure – de la voie de recours qui lui est ouverte contre cette décision médicale sur le fondement de l’article L. 3211-12 du même code et de son droit d’être assisté ou représenté par un avocat choisi, désigné au titre de l’aide juridictionnelle ou commis d’office, est-il conforme à la Constitution et notamment au principe constitutionnel des droits de la défense, du droit à une procédure juste et équitable, au principe de dignité de la personne, à la liberté fondamentale d’aller et venir et du droit à un recours effectif, ainsi qu’à l’objectif à valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice résultant des articles 12, 15 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ? ».

En effet, si les articles R. 3211-33-1 et R. 3211-35 du CSP prévoient l’obligation d’informer la personne de son droit d’être  assisté d’un avocat, rien n’impose expressément que cette information ait lieu dès le début de la mesure d’isolement ou de contention.

Dans l’affaire n°22-40.021, la personne est admise le 17 juin 2022 en soins psychiatriques sans consentement – sous la forme d’une hospitalisation complète – sur décision prise au vu d’un péril imminent et sur la base du même fondement légal que l’affaire précédente. A ce titre, elle a fait l’objet de mesures d’isolement et de contention de manière discontinue.

Le JLD est saisi le 22 juin 2022 par le directeur d’établissement afin de renouveler la mesure d’hospitalisation complète.

Il transmet alors la QPC suivante : « Le II de l’article L. 3222-5-1 du code de la santé publique est-il contraire à la Constitution en ce qu’il porte atteinte aux principes du respect des droits de la défense qui découle de l’article 16 de la Déclaration de 1789 et au respect de la liberté individuelle que l’article 66 de la Constitution place sous la protection de l’autorité judiciaire, en ne prévoyant pas l’intervention systématique d’un avocat au côté du patient lors du contrôle des mesures d’isolement et de contention ? ».

Dans ces deux décisions, la 1ère chambre civile commence d’abord par constater le silence des textes du CSP, aussi bien quant à l’information du patient dès le début de la mesure que concernant sa représentation ou assistance systématique par un avocat.

Dans les deux cas, la Cour de cassation estime que l’article L. 3222-5-1 est susceptible de porter atteinte au principe des droits de la défense garantis par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et accepte donc de renvoyer la QPC au Conseil constitutionnel.

A la suite des deux abrogations déjà intervenues en matière de soins psychiatriques sans consentement (Cons. Const, 19 juin 2020, n°2020-844 QPC et Cons. Const 4 juin 2021, n°2021-912/913/914 QPC), il n’est donc pas à exclure une nouvelle remise en cause des textes sur l’isolement et la contention, dans leur version issue de la loi du 22 janvier et du décret du 23 mars 2022.

 

 

 

 

 

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