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veille juridique
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VEILLE JURIDIQUE 9 AVRIL 2020

Article rédigé le 9 avril 2020 de Maude Geffray sous la supervision de Me Marine Jacquet

Une actualité juridique toujours aussi dense dans ce contexte de crise sanitaire. Pour s’y retrouver, le Cabinet vous propose une analyse synthétique et globale des dernières décisions et textes marquants.

 

SOMMAIRE

  1. Contrats publics : assouplissement des règles applicables en matière d’exécution 
  2. Contentieux : par trois ordonnances de référé, le Juge des référés du Conseil d’Etat a refusé d’enjoindre au Gouvernement différentes mesures relative à la lutte contre le Covid-19 (matériel professionnel de santé, tests de dépistage, hydroxy-chloroquine)
  3. Télémédecine : assouplissement de la prise en charge des actes de télémédecine pour les personnes atteintes du Covid-19 
  4. ONIAM et FIVA, adaptation des délais de procédure
  5. Droit social : conditions de recevabilité d’une action dans le cadre d’Unité économique et sociale (UES)
  6. Droit social : adaptation des règles relatives aux instances représentatives du personnel
  7. Possibilité de recours à des médicaments vétérinaires en cas de rupture d’approvisionnement de médicaments à usage humain 
  8. Réquisition possible de nouveaux laboratoires pour dépister le Covid-19

 


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1- Contrats publics, assouplissement des règles applicables à l’exécution des contrats publics : ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020

Tous les domaines du droit sont impactés par cette pandémie mondiale. Le droit de la commande publique n’en fait pas exception.

L’ordonnance n°2020-319 du 25 mars 2020 vise ainsi à adapter les règles de procédure et d’exécution des contrats publics afin de faire face aux difficultés rencontrées par les autorités contractantes pendant l’état d’urgence sanitaire lié à l’épidémie de Covid-19.

Pour faire face à l’épidémie, l’ordonnance permet notamment d’adapter, pour les marchés publics et les contrats de concession, les modalités de mise en concurrence prévues par les documents de consultation :

  • les délais de réception des candidatures et des offres peuvent être prolongés d’une durée suffisante pour permettre aux opérateurs économiques de déposer leur dossier dans les temps. La durée de cette prolongation est déterminée par l’autorité contractante au regard notamment de la complexité des dossiers à constituer ;
  • les autorités contractantes peuvent également organiser des modalités alternatives de mise en concurrence sous réserve du respect du principe d’égalité de traitement des candidats.

 

Il est également prévu que lorsqu’une procédure de mise en concurrence n’a pas été possible, les contrats publics dont le terme était fixé durant la période d’état d’urgence sanitaire peuvent être prolongés par avenant au-delà de la durée prévue par le contrat.

L’ordonnance prend également des mesures afin d’éviter que des sanctions soient prises envers les opérateurs n’étant pas en capacité d’honorer leurs engagements contractuels du fait de la pandémie.

Il peut être souligné que le texte concerne l’ensemble des contrats de la commande publique, y compris ceux qui sont exclus du champ d’application des directives européennes. Il concerne tant les contrats conclus par les personnes morales de droit public que ceux conclus par les personnes morales de droit privé qui répondent à la définition du pouvoir adjudicateur ou de l’entité adjudicatrice.

Afin de répondre aux nombreuses questions pouvant apparaître dans le domaine ainsi que dans le contexte particulier auquel nous faisons face, la Direction des Affaires Juridiques (DAJ), a publié :

Plus d’information dans l’article de Me Jessica Phillips : CORONAVIRUS : MODALITÉS DE PASSATION ET D’EXÉCUTION DES MARCHÉS PRÉCISÉES PAR ORDONNANCE

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– Contentieux, par trois ordonnances, le Juge des référés du Conseil d’Etat a refusé d’enjoindre au Gouvernement différentes mesures en lien avec la lutte contre le Covid-19 (matériel professionnel de santé, tests de dépistage, hydroxy-chloroquine) : ordonnances du 28 mars 2020 n°439765, n°439693etn°439726

 

Par trois ordonnances en référé rendues le 28 mars 2020, le Conseil d’Etat a rejeté les demandes déposées par des particuliers ou des professionnels de santé portant sur différentes mesures de protection en lien avec la lutte contre le Covid-19.

Plus précisément, les requêtes visaient à ce qu’il soit fait injonction à l’Etat de prendre toutes mesures utiles pour obtenir plus de matériel de protection, notamment des masques de protection pour les professionnels de santé, la prescription d’hydroxy-chloroquine et l’obtention de moyens de dépistage plus importants.

Le Juge des référés a rejeté ces requêtes au regard notamment des mesures déployées par le Gouvernement.

Pour les masques de protection, malgré le constat de carence, il est relevé que « cette situation devrait connaître une nette amélioration au fil des jours et semaines à venir ». Il est souligné ensuite que le Gouvernement avait ordonné des réquisitions et commandé plusieurs centaines de millions de masques qui devraient être livrés prochainement. De ce fait, il n’y pas, selon le Juge, matière à prononcer les mesures que les requérants sollicitent et « qui ne pourraient être utilement prises pour augmenter le volume de masques disponible à bref délai ».

Il a, en outre, constaté que la limitation des tests de dépistage résultait uniquement d’une insuffisante disponibilité des matériels.

Concernant le traitement plus large à la chloroquine, le juge retient notamment que « les études à ce jour disponibles souffrent d’insuffisances méthodologiques ». Dans ces conditions, il est conclu au fait que le choix des mesures ne peut être regardé, en l’état de l’instruction, comme portant une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie et au droit de recevoir, sous réserve de son consentement libre et éclairé, les traitements et les soins appropriés à son état de santé.

Par ailleurs, il peut être relevé une autre affaire.

Dans le cadre de cette dernière, l’Union Générale des Travailleurs de Guadeloupe (UGTG) avait obtenu du Juge des référés du Tribunal de Basse-Terre à ce qu’il soit fait injonction au CHU de Guadeloupe et à l’Agence Régionale de Santé (ARS) de commander des doses d’hydroxy-chloroquine et d’azythromycine, ainsi que des tests de dépistage.

Toutefois, le 4 avril 2020, dans la continuité des précédentes ordonnances, le Juge des référés du Conseil d’État a annulé ces deux injonctions constatant notamment qu’il n’avait pas été démontré que « le centre hospitalier universitaire et l’agence régionale de santé auraient porté, par une carence caractérisée, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale » (CE 4 avril 2020 n°439904, 439905).

 

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3 – Télémédecine, assouplissement de la prise en charge des actes de télémédecine pour les personnes atteintes du Covid-19 : décret n°2020-277 du 19 mars 2020

 

Le recours à la téléconsultation n’a jamais été aussi utile que dans ce contexte sanitaire. Les conditions d’accès à ce type d’acte ont été assouplies pour toutes les personnes atteintes du Covid-19.

En effet, ces personnes pourront bénéficier d’actes de télésoin pris en charge par l’assurance maladie même si elles ne remplissent pas les conditions de droit commun habituellement exigées. Elles pourront notamment y avoir recours même si elles n’ont pas réalisé au préalable une première consultation en présentiel avec un infirmier.

Ces activités de télésoin pourront être réalisées par n’importe quel moyen technologique actuellement disponible pour réaliser une vidéotransmission, l’usage du téléphone en dernier recours est admis. Lorsque le patient ne dispose pas du matériel nécessaire pour réaliser une vidéotransmission, les activités de télésoin pourront être effectuées par téléphone.

 

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4 – Adaptation des délais de procédure devant l’ONIAM et le FIVA : ordonnance du 25 mars 2020 n°2020-311

Les délais de procédures devant l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM) et devant le Fond d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante (FIVA) sont adaptés à la période de crise sanitaire.

Pour l’ONIAM, l’ordonnance proroge de 4 mois l’ensemble des délais dans lequel l’ONIAM, ainsi que les différentes instances en son sein doivent statuer sur les demandes d’indemnisation et payer les offres, lorsqu’ils arrivent à échéance entre le 12 mars 2020 et une date fixée par arrêté, sans pouvoir excéder le 12 juillet 2020.

Pour le FIVA, ce dernier bénéficie d’une prorogation de 3 mois pour présenter une offre d’indemnisation.

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5 – Droit social, conditions de recevabilité d’une action dans le cadre d’Unité Economique et Sociale (UES) :Cour de cassation, chambre sociale, 26 février 2020, n°18-22.123

La Cour de cassation est venue préciser, dans un arrêt publié au bulletin, que lorsqu’une action en justice concerne la mission d’une UES, cette action doit être introduite par ou dirigée contre toutes les entités composant l’UES, et ce sous peine d’irrecevabilité. Ceci étant, l’une des entités peut avoir mandat pour représenter l’ensemble des sociétés de l’UES.

En l’occurrence, dans les faits de l’espèce, une action en contestation des honoraires de l’expert mandaté par le CHSCT d’une UES a été déclarée irrecevable, car n’ayant pas été introduite dans les délais par l’une des entreprises composant l’UES. La vigilance est donc de mise dans les UES !

Pour rappel une UES est le regroupement d’entités juridiques distinctes mais présentant des liens étroits et considérées comme une seule entreprise pour l’application du droit du travail et notamment en matière de représentation du personnel.

 

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6 – Droit social, adaptation des règles relatives aux instances représentatives du personnel : ordonnance du 1er avril 2020 n°2020-389

A l’instar des élections municipales de 2020, les élections professionnelles ont fait l’objet de modifications temporaires afin d’assurer la continuité du fonctionnement des instances représentatives du personnel.

L’ordonnance du 1eravril 2020 n°2020-389 vise dans un premier temps la suspension immédiate de tous les processus électoraux en cours à la date du 12 mars 2020 et ce jusqu’à une date fixée à trois mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

Il est précisé que lorsque la suspension intervient entre la date du premier tour et la date du second tour des élections professionnelles, elle n’a pas d’incidence sur la régularité du premier tour.

Par ailleurs, il doit être relevé que les conditions d’électorat et d’éligibilité s’apprécient à la date d’organisation de chacun des tours du scrutin.

Ce texte donne également des garanties importantes concernant les représentants du personnel dans l’exercice de leurs fonctions, les mandats en cours sont maintenus si les résultats des élections du premier tour, ou, le cas échéant, du second tour n’ont pas été proclamés. De plus leur statut protecteur est maintenu durant toute la durée de la prorogation.

Enfin, cette ordonnance permet aux comités sociaux et économiques de recourir à la visioconférence pour tenir des réunions.

 

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7 – Recours à l’usage de médicaments vétérinaires en cas de rupture d’approvisionnement de médicaments à usage humain : décret du 2 avril 2020 n°2020-393.

En cas de rupture d’approvisionnement en spécialités pharmaceutiques à usage humain, les établissements de santé peuvent, par dérogation, recourir à l’usage de médicaments vétérinaires dont la composition en principe actif, le dosage et la voie d’administration sont identiques.

Il revient à l’agence nationale de sécurité du médicament de dresser la liste des médicaments concernés et leurs caractéristiques propres.

 

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8 – Réquisition de nouveaux laboratoires pour dépister le Covid-19 : décret du 5 avril 2020 n°2020-400 et arrêté du 5 avril 2020.

Afin de permettre un dépistage plus efficace du Covid-19, les préfets de département sont autorisés, si les laboratoires de biologie médicale ne sont pas en mesure d’effectuer les tests ou en quantité insuffisante, de réquisitionner les autres laboratoires autorisés à réaliser cet examen ainsi que les équipements et personnels nécessaires à leur fonctionnement.

Les laboratoires concernés sont listés par l’arrêté du 5 avril 2020.