Demande de paiement finale des marchés publics de travaux : décryptage
Article rédigé le 23 juin 2023 par Me Jessica Phillips
Étape phare de l’exécution des marchés publics de travaux, la demande de paiement finale peut être appréhendée par les acheteurs : les formalités et délais se succèdent, les interlocuteurs sont multiples (titulaire, maître d’œuvre, ou encore maître d’ouvrage), et les incidences, notamment financières, peuvent être conséquentes. Appréhension justifiée donc. Mais surmontable ! Sous réserve de bien maîtriser les différentes étapes…
La demande de paiement finale intervenant dans le cadre de l’exécution des marchés publics de travaux est envisagée aux articles 12.3 et suivants du dernier CCAG travaux (2021 ).
Les documents de la consultation donnent très souvent valeur contractuelle à ces dispositions.
L’importance d’en connaître la teneur est donc capitale.
Ainsi, et bien que le maître d’œuvre occupe une place centrale dans le processus, le maître d’ouvrage doit être particulièrement vigilant et rigoureux en la matière. En substance, un décompte irrégulièrement établi implique un risque important en termes de contestation du solde du marché. Il convient donc de tout mettre en œuvre pour l’éviter.
Les principales étapes à suivre sont synthétisées ci-après.
L’établissement du projet de décompte final par le titulaire
La première étape à intervenir dans le cadre de la demande de paiement finale est l’établissement, par le titulaire du marché public de travaux, du document appelé projet de décompte final.
Ce projet de décompte final est établi parallèlement au dernier projet de décompte mensuel, à partir des prix initiaux du marché, en prenant en compte le montant total des sommes auquel le titulaire prétend, selon les prestations qu’il estime effectivement exécutées.
Le titulaire est lié par les indications figurant dans le projet de décompte final.
Il doit par ailleurs récapituler les observations qu’il a émises et qui n’ont pas été acceptées par le maître d’œuvre ou le maître d’ouvrage. A défaut, il est réputé les avoir abandonnées. Le maître d’ouvrage veillera donc à vérifier ce point de manière systématique.
La transmission du projet de décompte final par le titulaire au maître d’œuvre et au maître d’ouvrage
Une fois établi, le projet de décompte final est notifié par le titulaire.
La transmission doit s’effectuer, simultanément, au maître d’ouvrage et au maître d’œuvre.
En principe, elle doit avoir lieu dans un délai de trente jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux (ou à défaut d’une telle notification selon les modalités envisagées aux articles 41.1.3, 41.3, 41.5 ou 41.6 du CCAG).
L’établissement du décompte final par le maître d’œuvre
A l’issue de sa transmission par le titulaire, le maître d’œuvre accepte ou rectifie le projet de décompte final.
Le projet de décompte final accepté ou rectifié par le maître d’œuvre devient décompte final (dans l’hypothèse où le projet de décompte final a été rectifié, le paiement est effectué sur la base provisoire des sommes admises par le maître d’œuvre).
Si le titulaire ne transmet pas le projet de décompte final, le maître d’ouvrage doit, copie au maître d’œuvre, le mettre en demeure de transmettre son projet, dans un délai désormais fixé à quinze jours à compter de la réception de la mise en demeure. Cette procédure doit être systématisée.
Si aucune réponse n’est adressée par le titulaire, le maître d’œuvre établit d’office le décompte final.
Ce décompte final est notifié au titulaire avec le décompte général.
L’établissement du projet de décompte général par le maître d’œuvre
Sur la base du décompte final, le maître d’œuvre établit le projet de décompte général qui comprend le décompte final, l’état du solde et la récapitulation des acomptes mensuels et du solde.
Il transmet ce projet de décompte général au maître d’ouvrage.
Le décompte général
Le maître d’ouvrage qui reçoit le projet de décompte général du maître d’œuvre peut :
Soit le valider et le signer ;
Soit le rectifier et le signer.
Le projet de décompte général devient alors décompte général.
En cas de réserves émises à l’occasion des opérations de réception, une mention spécifique doit être intégrée. Une vérification devra être effectuée par le maître d’ouvrage sur ce point.
La notification du décompte général au titulaire par le maître d’ouvrage et ses suites : le décompte général et définitif
En principe, le maître d’ouvrage notifie le décompte général au titulaire à la plus tardive des dates suivantes : trente jours à compter de la réception par le maître d’œuvre de la demande de paiement finale transmise par le titulaire ; ou trente jours à compter de la réception par le maître d’ouvrage de la demande de paiement finale transmise par le titulaire.
Le titulaire dispose alors de trente jours pour le renvoyer au maître d’ouvrage, copie au maître d’œuvre, signé.
Le décompte général devient alors décompte général et définitif.
Il lie en principe définitivement les parties (en cas de contestation sur le montant des sommes dues, seules les sommes admises dans le décompte final sont réglées).
Si le maître d’ouvrage ne notifie pas le décompte général au titulaire dans le délai de trente jours susvisé, le titulaire notifie au maître d’ouvrage, copie au maître d’œuvre, un projet de décompte général signé.
Dans un délai de dix jours à compter de la réception de ce document, le maître d’ouvrage notifie le décompte général au titulaire et le décompte général et définitif est établi.
A défaut, le projet de décompte général transmis par le titulaire devient décompte général et définitif. Il lie en principe définitivement les parties.
Si le titulaire n’a pas renvoyé le décompte général dans le délai de trente jours susvisé, il est réputé l’accepter tel qu’adressé par le maître d’ouvrage. Le décompte général devient alors décompte général et définitif.
Pour conclure, les étapes, et sous-étapes, sont donc nombreuses, parfois complexes, et le maître d’ouvrage a un rôle indéniable à jouer au sein de chacune d’entre elles.
L’établissement d’une feuille de route, d’un document interne, ou d’un règlement intérieur encadrant le processus est donc vivement préconisé. Le cabinet Houdart est à votre disposition pour vous assister dans ce cadre.
Jessica Phillips est avocate collaboratrice au sein du cabinet depuis 2019, et intervient principalement sur les dossiers de conseils et de contentieux en droit public et droit de la commande publique.
Elle réalise des audit Marchés publics pour les acheteurs.
Elle assure également des formations en droit de la commande publique au profit des agents en charge de la passation et l’exécution des marchés publics.
Jessica Phillips possède une Spécialisation droit public - Qualification spécifique droit de la commande publique.