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DE L’AIR POUR LES GCS : LE CONSEIL D’ÉTAT CONFIRME L’EXONÉRATION DE LA TAXE FONCIÈRE SUR LES PROPRIÉTÉS BÂTIES
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DE L’AIR POUR LES GCS :

LE CONSEIL D’ÉTAT

CONFIRME

L’EXONÉRATION DE LA

TAXE FONCIÈRE

SUR LES PROPRIÉTÉS

BÂTIES

Article rédigé le 11 avril 2019 par Liselotte Larue et Laurent Houdart

Voici une nouvelle qui devrait ravir tous les administrateurs de GCS disposant de propriétés bâties.

 

Nos lecteurs fidèles n’ignorent pas que dans plusieurs articles, et sur le fondement des dossiers que nous avons eu à connaître dans le cadre de notre exercice professionnel, nous avions alerté sur la potentielle remise en cause, lors de la mise en œuvre de certains montages juridiques – en particulier avec création de GCS – de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties dont bénéficient pourtant les établissements publics de santé sur le fondement de l’article 1382 du code général de santé.

 

En effet, l’administration fiscale cède souvent (trop) à la tentation de fiscaliser des activités dites « accessoires » telles que la blanchisserie ou la restauration lorsqu’elles sont mutualisées, estimant qu’il ne peut s’agir d’une activité de service public ou d’utilité générale.

 

Elle rejoint ainsi – et paradoxalement – la position de la direction générale de l’offre de soins qui, dans sa fiche relative à la fiscalité des groupements de coopération sanitaire de moyens du mois de septembre 2011, exposait s’agissant de l’article 1382 C du CGI que « Sont concernés par l’exonération, les immeubles ou parties d’immeubles affectés aux activités de soins du GCS ». À contrario, les activités accessoires ne pourraient en profiter !

 

Position qui ne participe guère à favoriser les coopérations tant l’impact d’une taxe foncière peut être important.

 

Après une longue bataille juridique, le Conseil d’État s’est prononcé le 27 mars 2019 (n° 422428, 428357) en faveur des établissements publics de santé s’agissant de la taxe foncière sur les propriétés bâties dans le cadre d’un partenariat public-privé (PPP).

 

La portée de cet arrêt n’est pas mince.

 

Rappelons que les établissements publics de santé disposent, sur le fondement de l’article 1382 1° du code général des impôts[1](étendue aux PPP sous les mêmes conditions par l’article 1382 1° bis du CGI), d’une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, s’ils remplissent les trois conditions cumulatives visées par cette disposition :

 

  • Être une propriété publique, condition qui ne pose que très rarement difficulté.

 

  • Affecter le bâtiment à un service public ou d’utilité générale, qualification que refuse en général l’administration fiscale aux activités accessoires des établissements publics de santé.

 

Mais que se passe t’il lorsque la propriété est grand-gérée à un groupement dans un but de mutualisation des moyens logistiques ?

 

Précisément, dans l’affaire jugée par le Conseil d’Etat, un établissement public de santé avait conclu un bail emphytéotique administratif avec une personne morale de droit privé sur le fondement de l’article L. 6148-2 du code de la santé publique aux fins de construction d’une plateforme médico-logistique, laquelle a par la suite été exploitée par un groupement de coopération sanitaire de moyens de droit public.

 

L’administration fiscale a assujetti l’emphytéote à la taxe foncière sur les propriétés bâties (naturellement refacturée à l’établissement public de santé), faisant valoir que l’immeuble n’est pas affecté à un service public ou d’utilité générale aux motifs, d’une part que le GCS ne constitue pas un établissement public de santé disposant d’autorisation(s) de soins, et d’autre part que ses missions ne sont que logistiques et non médicales.

 

Le Conseil d’État n’a pas suivi l’administration fiscale :

 

« Ce groupement effectue des prestations de logistique pharmaceutique et de stérilisation du matériel médical et opératoire, de blanchisserie et de production alimentaire. Il doit être regardé comme affecté à la réalisation de prestations concourant à l’exécution du service public hospitalier dont le centre hospitalier Antoine Gayraud est chargé, la circonstance que les mêmes prestations soient également fournies par le groupement à ses autres membres étant sans incidence à cet égard. »

 

Par conséquent, les activités dites « accessoires » ne sont plus aujourd’hui incompatibles avec la qualification de service public ou d’utilité générale, ce qui ne manquera pas d’avoir une incidence sur d’autres impositions (CET par exemple).

 

  • Et le bâtiment doit être improductif de revenus pour la personne publique propriétaire.

 

Sur ce point, le Conseil d’État a rappelé sa conception particulièrement stricte de cette condition :

 

« Il résulte de ces dispositions que l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties qu’elles prévoient est subordonnée à l’absence de perception de revenus, fût-ce pour un montant symbolique, par la personne publique propriétaire du bien (…)

S’il résulte aussi de l’instruction que le centre hospitalier perçoit une redevance en contrepartie du bail emphytéotique qu’il a consenti, de sorte que l’immeuble ne peut être regardé comme non productif de revenus au sens et pour l’application des dispositions du 1° de l’article 1382 du code général des impôts, auxquelles renvoient celles du 1° bis du même article »

 

In fine, le bénéfice de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties au cas d’espèce a été retenu sur le fondement de la garantie contre les changements d’interprétation formelle des textes fiscaux par l’administration prévue à l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales[2].

 

En effet, l’administration fiscale précise au sein de sa doctrine[3]qu’ « Il est précisé que la perception d’une redevance par la personne publique en contrepartie de l’occupation de son domaine public ne fait pas obstacle à l’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties prévue par le 1°bis de l’article 1382 du CGI ».

 

Ainsi, le Conseil d’État ne réglant pas le problème pour l’avenir, la sécurité juridique de ces montages n’est toujours pas assurée. Cela n’est pas sans poser un problème de cohérence, le législateur appelant de ses vœux la mise en place de coopérations, les établissements y participant se trouvant par la suite fiscalisés là où ils ne l’étaient pas auparavant.

 

Un petit pas pour le Conseil d’Etat mais un grand pas pour les GCS qui lèvent ainsi un obstacle sérieux pour la mutualisation des fonctions logistiques. Le combat n’est pas complètement terminé, et dans l’attente d’une réforme législative attendue, nous invitons à la vigilance, en particulier lors de la réalisation des projets et la rédaction des actes constitutifs.

 

 

 


[1]« Sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties :

1° Les immeubles nationaux, les immeubles régionaux, les immeubles départementaux pour les taxes perçues par les communes et par le département auquel ils appartiennent et les immeubles communaux pour les taxes perçues par les départements et par la commune à laquelle ils appartiennent, lorsqu’ils sont affectés à un service public ou d’utilité générale et non productifs de revenus, notamment : (…)

Les hospices, dépôts de mendicité, prisons, maisons de détention ; (…)

Sous réserve des dispositions du 9°, cette exonération n’est pas applicable aux immeubles qui appartiennent à des établissements publics autres que les établissements publics de coopération intercommunale, les syndicats mixtes, les pôles métropolitains, les ententes interdépartementales, les établissements publics scientifiques, d’enseignement et d’assistance ainsi que les établissements visés aux articles 12 et 13 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, ni aux organismes de l’Etat, des départements ou des communes ayant un caractère industriel ou commercial.

Les immeubles qui sont incorporés gratuitement au domaine de l’Etat, des collectivités locales ou des établissements publics, en vertu d’une convention, sont imposables jusqu’à l’expiration de celle-ci.

1° bis Pendant toute la durée du contrat et dans les mêmes conditions que celles prévues au 1°, les immeubles construits dans le cadre de contrats de partenariat, de contrats conclus en application de l’article L. 2122-15 du code général de la propriété des personnes publiques, ou de contrats visés au premier alinéa de l’article L. 6148-5 du code de la santé publique, et qui, à l’expiration du contrat, sont incorporés au domaine de la personne publique conformément aux clauses de ce contrat.

Pour l’application des conditions prévues au 1°, la condition relative à l’absence de production de revenus doit être appréciée au regard de la personne publique au domaine de laquelle l’immeuble doit être incorporé.

Pour bénéficier de cette exonération, le titulaire du contrat doit joindre à la déclaration prévue à l’article 1406 une copie du contrat et tout document justifiant de l’affectation de l’immeuble. (….) »

[2]« Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. »

[3]BOI-IF-TFB-10-50-10-50-20120912 du 12/09/2012, § 330

Ayant une parfaite maîtrise et connaissance du droit de la responsabilité administrative, civile et pénale ainsi qu’une fine connaissance de la procédure par son expérience en juridiction, elle met aujourd’hui son expertise au service d’établissements publics de santé et d’établissements publics de l’Etat à résonance nationale. À titre d’exemple, elle conseille et accompagne plusieurs établissements publics sur des problématiques d’amiante aux côtés de maître Pierre-Yves FOURE, associé du Cabinet.

Aux côtés, de Maître Pierre-Yves FOURE, associé du Cabinet, elle pratique régulièrement le droit pénal tant devant les juridictions d’instruction, notamment au pôle santé et financier du Tribunal de Grande Instance de Paris, que devant les juridictions de jugement pour des affaires d’homicides et blessures involontaires, de mise en danger de la vie d’autrui, ainsi qu’une activité de conseil et de représentation en justice en droit la presse (diffamation, droit de réponse et rectification & loi 29 juillet 1881)..

Elle accompagne également les établissements publics de santé, les groupements établis dans le domaine sanitaire, et les établissements publics de l’État dans leurs relations avec l’administration fiscale et le conciliateur fiscal en matière de Taxe sur la Valeur Ajoutée, d’Impôt sur les sociétés, de Taxe foncière….. Elle apporte enfin son expertise en matière de restructurations sanitaire et médico-sociale (fusion, transfert d’activité, coopération) s’agissant des questions spécifiques de fiscalité.

Fondateur du Cabinet Houdart et Associés en 1987, Laurent Houdart assiste, conseille et représente nombres d’opérateurs publics comme privés au sein du monde sanitaire et médico-social depuis plus de 20 ans.

Après avoir contribué à l’émergence d’un « Droit de la coopération sanitaire et médico-sociale », il consacre aujourd’hui une part importante de son activité à l’accompagnement des établissements de santé publics comme privés dans la restructuration de l’offre de soins (fusions, transferts partiel d’activité, coopération publique & privé, …). 

Expert juridique reconnu dans le secteur sanitaire comme médico-social, il est régulièrement saisi pour des missions spécifiques sur des projets et ou opérations complexes (Ministère de la santé, Ministère des affaires étrangères, Fédération hospitalière de France, AP-HM,…).

Il ne délaisse pas pour autant son activité plaidante et représente les établissements publics de santé à l’occasion d’affaires pénales à résonance nationale.

Souhaitant apporter son expérience au monde associatif et plus particulièrement aux personnes en situation de fragilité, il est depuis 2015 Président de la Fédération des luttes contre la maltraitance qui regroupe 1200 bénévoles et 55 centres et reçoit plus de 33000 appels par an.