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Délais échus et adaptation des procédures pendant la période d’urgence sanitaire
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DÉLAIS ÉCHUS ET ADAPTATION DES PROCÉDURES PENDANT LA PÉRIODE D’URGENCE SANITAIRE

Article rédigé le 26 mars 2020 par Me Anne Mottet

L’Ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 est relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période.

 

Sur les dispositions générales sur la prorogation des délais

 

Quels sont les délais qui sont concernés ?

 

L’article 1erde l’ordonnance prévoit qu’il s’agit de ceux qui arrivent à échéance entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré, et le cas échéant prorogé, sur le fondement des articles L. 3131-20 à L. 3131-22 du code de la santé publique.

 

Sont cependant exclus de ce périmètre :

 

  • les délais applicables en matière pénale et de procédure pénale,
  • les délais applicables en matière d’élections régies par le code électoral,
  • les délais encadrant les mesures privatives de liberté,
  • les délais concernant les procédures d’inscription à une voie d’accès de la fonction publique ou à une formation dans un établissement d’enseignement,
  • les délais concernant les obligations financières et garanties y afférentes mentionnées aux articles L. 211-36 et suivants du code monétaire et financier ainsi que les conventions conclues dans le cadre d’un système de paiement et systèmes de règlement et de livraison d’instruments financiers mentionné à l’article L. 330-1 du même code,
  • les délais et mesures aménagés en application de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie.

 

Quel est le mécanisme de report de terme et d’échéance ?

 

Pour les actes, actions en justice, recours, formalités, inscriptions, déclarations, notifications, ou publications prescrits par la loi ou le règlement, à peine de nullité, sanction, y compris désistement d’office, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque et qui devaient être réalisés dans la période mentionnée ci-dessus, les délais sont prorogés à compter de la fin de cette période, pour la durée qui était légalement impartie, mais dans la limite de deux mois.

 

Il en est de même pour les paiements prescrits par la loi ou le règlement en vue de l’acquisition ou de la conservation d’un droit.

 

Ainsi, l’ordonnance ne prévoit pas de supprimer la réalisation de tout acte ou formalité dont le terme échoit dans la période visée ; elle permet simplement de considérer comme n’étant pas tardif l’acte réalisé dans le délai supplémentaire imparti.    

 

L’ordonnance exclut les actes prévus par des stipulations contractuelles. Le paiement des obligations contractuelles doit donc toujours avoir lieu à la date prévue par le contrat.

 

S’agissant des contrats, néanmoins les dispositions de droit commun restent applicables le cas échéant si leurs conditions sont réunies, par exemple la suspension de la prescription pour impossibilité d’agir en application de l’article 2224 du code civil, ou encore le jeu de la force majeure prévue par l’article 1218 du code civil.

 

Qu’en est-il des mesures judiciaires et administratives ?

 

L’ordonnance fixe la liste des mesures judiciaires et administratives dont l’effet est prorogé de plein droit pour une durée de deux mois à compter de l’expiration de la période précitée, dès lors que leur échéance est intervenue dans cette période, sauf si elles sont levées ou leur terme modifié par l’autorité compétente entre temps.

 

Il s’agit :

 

  • des mesures d’aide, d’accompagnement ou de soutien aux personnes en difficulté sociale,
  • des mesures conservatoires, d’enquête, d’instruction, de conciliation ou de médiation, des mesures d’interdiction ou de suspension qui n’ont pas été prononcées à titre de sanction, ainsi que des autorisations, des permis et des agréments.

 

Quel est le sort des astreintes et des clauses contractuelles visant à sanctionner l’inexécution du débiteur ?

 

Les astreintes, clauses pénales, clauses résolutoires et clauses de déchéance qui auraient dû produire ou commencer à produire leurs effets entre le 12 mars 2020 et l’expiration du délai précité défini à l’article 1erde l’ordonnance sont suspendues : leur effet est paralysé ; elles prendront effet un mois après la fin de cette période, si le débiteur n’a pas exécuté son obligation d’ici là.

 

Les astreintes et clauses pénales qui avaient commencé à courir avant le 12 mars 2020 voient quant à elles leur cours suspendu pendant la période précitée de l’article 1erde l’ordonnance ; elles reprendront effet dès le lendemain.

 

En toute hypothèse, lorsque les mesures précédentes ont été prononcées avant le 12 mars 2020, le juge ou l’autorité administrative peut y mettre fin s’il est saisi.

 

 

Qu’en est il des délais pour résilier ou dénoncer une convention ?

 

Il est prévu la prolongation de deux mois après la fin de la période définie à l’article 1er de l’ordonnance des délais pour résilier ou dénoncer une convention lorsque sa résiliation ou l’opposition à son renouvellement devait avoir lieu dans une période ou un délai qui expire durant la période définie à l’article 1erde l’ordonnance.

 

 

Sur les dispositions particulières aux délais et procédures en matière administrative afin de tenir compte de certaines spécificités de l’action administrative

 

 

Quel est le champ d’application de ces dispositions particulières ?

 

Une conception extensive de la notion d’autorité administrative est retenue reprenant celle du code des relations entre le public et l’administration. Il s’agit des administrations de l’Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics administratifs, des organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d’une mission de service public administratif, y compris les organismes de sécurité sociale.

 

 

Les délais de l’action administrative sont-ils suspendus ?

 

Les délais à l’issue desquels une décision, un accord ou un avis de l’un des organismes ou personnes mentionnés dans le champ d’application précité peut ou doit intervenir ou est acquis implicitement et qui n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020 sont, à cette date, suspendus jusqu’à la fin de la période mentionnée à l’article 1erprécité.

 

Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant la période de l’article 1er précité interviendra à l’achèvement de celle-ci.

 

Les mêmes règles s’appliquent aux délais impartis aux mêmes organismes ou personnes pour vérifier le caractère complet d’un dossier ou pour solliciter des pièces complémentaires dans le cadre de l’instruction d’une demande ainsi qu’aux délais prévus pour la consultation ou la participation du public.

 

Les délais imposés par l’administration, conformément à la loi et au règlement, à toute personne pour réaliser des contrôles et des travaux ou pour se conformer à des prescriptions de toute nature sont, à compter du 12 mars 2020 jusqu’à la fin du mois suivant la période d’état d’urgence sanitaire, sauf lorsqu’ils résultent d’une décision de justice. Le point de départ des délais de même nature qui auraient dû commencer à courir pendant cette même période est reporté jusqu’à l’achèvement de celle-ci.

 

Quelles sont les exceptions au principe de suspension de ces délais de l’action administrative ?

 

D’une part, un décret pourra fixer les catégories d’actes, de procédures et d’obligations pour lesquels, pour des motifs de protection des intérêts fondamentaux de la Nation, de sécurité, de protection de la santé, de la salubrité publique, de préservation de l’environnement et de protection de l’enfance et de la jeunesse, le cours des délais reprend.

 

D’autre part, pour les mêmes motifs, un décret peut, pour un acte, une procédure ou une obligation déterminés fixer une date de reprise des délais à condition d’en informer les personnes concernées.

 

Qu’en est-il du domaine fiscal ?

 

En matière de contrôle fiscal, sont suspendus les délais de prescription du droit de reprise qui arrivent à terme le 31 décembre 2020 pour une durée égale à celle de la période comprise entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire.

 

En outre, sont suspendus pendant la même période, tant pour le contribuable que pour les services de l’administration fiscale, l’ensemble des délais prévus dans le cadre de la conduite des procédures de contrôle et de recherche en matière fiscale, sans qu’une décision en ce sens de l’autorité administrative ne soit nécessaire. La suspension des délais concerne également ceux applicables en matière de rescrit. Des dispositions identiques sont prises pour les délais de reprise, de contrôle et de rescrit prévus par le code des douanes.

 

Enfin, sont suspendus les délais prévus à l’article 32 de la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance, relatif à l’expérimentation de la limitation de la durée des contrôles administratifs sur certaines entreprises dans les régions Hauts-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes.

 

Il est aussi prévu que le report des formalités déclaratives prévu par l’article 2 ne s’applique pas aux déclarations servant à l’imposition et à l’assiette, à la liquidation et au recouvrement des impôts droits et taxes. Il s’agit ici de préserver le recouvrement des recettes publiques nécessaires au fonctionnement des services publics et au soutien de l’économie.

 

Qu’en est il des délais applicables en matière de recouvrement et de contestation des créances publiques ?

 

Les délais applicables en matière de recouvrement et de contestation des créances publiques prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité ou déchéance d’un droit ou d’une action sont suspendus pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire augmentée de trois mois. Ces dispositions concernent l’ensemble des créances dont le recouvrement incombe aux comptables publics.

 

Qu’en est-il des procédures d’enquête publique relatives à des projets présentant tout à la fois un intérêt national et un caractère d’urgence ?

 

À compter du 12 mars 2020 et pour la durée de la période d’état d’urgence sanitaire augmentée d’un mois, les procédures d’enquête publique relatives à des projets présentant tout à la fois un intérêt national et un caractère d’urgence. L’autorité compétente pour organiser l’enquête peut, pour toute enquête publique déjà ouverte relative à un tel projet, décider qu’elle se poursuit uniquement par des moyens électroniques dématérialisés. Toute nouvelle enquête publique relative à un tel projet sera ouverte et conduite uniquement par des moyens électroniques dématérialisés. Si la durée de l’enquête publique excède celle de l’état d’urgence sanitaire augmentée d’un mois, l’autorité qui l’organise peut choisir de l’achever selon les mêmes modalités dématérialisées ou de l’achever selon les modalités de droit commun.

 

 

Après avoir exercé son activité au sein du département de droit social d’un Cabinet de droit des affaires parisien, où elle a développé une expertise tant en droit du travail (relations individuelles et relations collectives) qu’en droit de la sécurité sociale, Anne MOTTET a rejoint le département Ressources Humaines du Cabinet HOUDART ET ASSOCIÉS en octobre 2017 en tant qu’avocat.

Présentant une compétence en droit du travail, elle a également élargi son domaine d’intervention  au droit de la fonction publique et accompagne aujourd’hui les établissements privés et publics de santé dans la gestion de leurs personnels (salariés de droit privé, personnels statutaires et contractuels).

Elle conseille également les établissements publics et privés de santé sur le volet social de leurs projets à enjeux stratégiques (déménagement d’établissements, fusion d’établissements, suppression d’un service, intégration de personnels de droit privés au sein de l’hôpital dans le cadre d’un transfert d’activité).