PEUT-ON APPORTER DES FONDS PUBLICS À UN FONDS DE DOTATION ?
Article rédigé le 21 novembre 2024 par Me Laurent Houdart et Anaïs Bakali
La règle est bien connue : Le fonds de dotation ne peut bénéficier de subventions publiques ni d’un quelconque soutien public indirect (mise à disposition de locaux, de moyens, de personnel, etc.), sauf dérogation accordée par arrêté conjoint des ministres chargés de l’économie et du budget.
Pour la constitution de la dotation initiale, la règle est bien respectée par les établissements publics mais pour leur fonctionnement ? et quid des mises à disposition de personnel ?
Mises à disposition de personnel, locaux, équipements
Il arrive assez fréquemment que les établissements « fondateurs » apportent une aide financière indirecte au financement de “leur” FDD sous la forme de la mise à disposition gratuite d’un local ou d’un membre de leur personnel chargé de la gestion courante du fonds. Trop souvent, l’interdiction d’apporter des fonds publics est cantonnée à la dotation initiale. Le fonctionnement du FDD exige au moins de disposer d’un bureau, d’équipements informatiques et surtout de personnel. La dotation initiale, même consomptible n’est généralement pas suffisante. La pratique, et nous le voyons souvent, consiste à mettre à disposition un bureau de l’établissement public, quelques équipements et d’y affecter un membre de l’équipe de direction.
Des pratiques irrégulières
Cette pratique est directement contraire à la prohibition de principe de tout financement public des fonds de dotation, et lorsqu’elle existe il doit y être mis fin : si le fonds de dotation a besoin d’un local ou de l’aide d’un membre du personnel d’un établissement public de santé, ce concours doit être payant et facturé à son prix de marché. L’arrêt de ce type de pratique est d’autant plus impérieux que désormais, le fait pour un fonds de recevoir des concours publics est passible d’une mesure de suspension temporaire de son activité, voire de dissolution. Nous y reviendrons dans un prochain numéro de la Lettre juridique du mécénat en santé.
Rechercher des fonds privés et/ou des partenaires privés
L’interdiction de principe de toute subvention publique contraint de fait toute personne morale de droit public désireuse de créer un fonds de dotation :
- Soit à pouvoir utiliser des fonds en provenance de son domaine privé sous réserve de pouvoir le justifier ;
- Soit, à réunir autour d’elle un ou plusieurs partenaires privés pour que préalablement à la création du fonds ces derniers s’engagent à lui apporter les moyens financiers nécessaires à sa création et à son fonctionnement. La cocréation avec une personne privée, qui versera par ailleurs le montant de la dotation initiale requise, est certainement l’un des mécanismes les plus surs.
Or bien souvent, il s’avère que l’initiative de création du fonds a précédé la recherche de fonds privés ou de mécènes privés, alors que la démarche devrait être inverse : on ne devrait créer de fonds de dotation que si on a trouvé des fonds privés et/ou mécènes et que ceux-ci sont effectivement capables de soutenir le fonds dans la durée et de lui apporter des capitaux suffisants pour justifier son existence et les coûts inhérents à la création et surtout au fonctionnement d’une telle structure.
Disposer d’une dotation initiale couverte par des fonds privés n’est pas suffisant, il est impératif de disposer soit de partenaires privés en capacité d’aider au début aux paiement des frais de fonctionnement, soit de premiers versements conséquents par des donateurs !
Faut il alors s’empresser de constituer un FDD pour faire comme son voisin ? Il existe d’autres solutions. Nous le verrons dans un autre article de la Lettre juridique du mécénat en santé.
Cet article est issu de la lettre juridique du Mécénat en santé #1 de novembre 2024.
AU SOMMAIRE DE LA LETTRE :
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Fondateur du Cabinet Houdart et Associés en 1987, Laurent Houdart assiste, conseille et représente nombres d’opérateurs publics comme privés au sein du monde sanitaire et médico-social depuis plus de 20 ans.
Après avoir contribué à l’émergence d’un « Droit de la coopération sanitaire et médico-sociale », il consacre aujourd’hui une part importante de son activité à l’accompagnement des établissements de santé publics comme privés dans la restructuration de l’offre de soins (fusions, transferts partiel d’activité, coopération publique & privé, …).
Expert juridique reconnu dans le secteur sanitaire comme médico-social, il est régulièrement saisi pour des missions spécifiques sur des projets et ou opérations complexes (Ministère de la santé, Ministère des affaires étrangères, Fédération hospitalière de France, AP-HM,…).
Il ne délaisse pas pour autant son activité plaidante et représente les établissements publics de santé à l’occasion d’affaires pénales à résonance nationale.
Souhaitant apporter son expérience au monde associatif et plus particulièrement aux personnes en situation de fragilité, il est depuis 2015 Président de la Fédération des luttes contre la maltraitance qui regroupe 1200 bénévoles et 55 centres et reçoit plus de 33000 appels par an.
Anaïs Bakali a rejoint le Cabinet Houdart & Associés en mai 2018 après plusieurs expériences notamment en qualité de juriste dans un cabinet spécialisé en droit bancaire, droit des procédures collectives et voies d'exécution puis en qualité de chargée de contentieux chez un bailleur social.
Elle intervient en qualité de juriste auprès des acteurs des secteurs de la santé et du médico-social en matière de fiscalité, de création et d'évolution de groupement et de société.