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Un GHT en cours de formation peut il déposer un dossier d'autorisation ?
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UN GROUPEMENT EN FORMATION PEUT-IL DÉPOSER UN DOSSIER D’AUTORISATION ?

Les établissements publics de santé s’engagent régulièrement dans des partenariats dont l’objet est notamment de partager une autorisation d’équipements matériels lourds ou encore d’exploiter une autorisation d’activité de soins ou une autorisation médico-sociale.

À cet effet, ils se dotent de structures autorisées à être titulaire de ces autorisations tels que des groupement d’intérêt économique (GIE) en matière d’imagerie médicale ou encore des groupements de coopération sanitaire ou sociales et médico-sociales (GCS et GCSMS).

Mais pour autant, lors du dépôt du dossier (pour une nouvelle autorisation ou pour une confirmation par cession de l’un des membres), le groupement n’est parfois pas encore constitué.

Est-il possible de déposer une demande d’autorisation au titre d’un groupement en cours de constitution comme par exemple un GIE non encore immatriculé au registre du commerce et des sociétés ou un GCS dont la convention n’aurait pas été approuvée et publiée par le Directeur Général de l’Agence Régionale de Santé (ARS) ?

Oui, un groupement et plus largement une personne morale en cours de formation peut déposer un dossier d’autorisation mais ce dépôt doit répondre à certaines conditions.

 

Le dépôt du dossier d’autorisation par une personne morale en cours de constitution est prévu par le code de la santé publique.

L’article R. 6122-32-1 du code de la santé publique prévoit expressément que dans la partie administrative du dossier justificatif doivent figurer :

« L’identité, l’adresse et le statut juridique de la personne physique ou morale, constituée ou en cours de constitution, qui demande l’autorisation pour son compte, ainsi que la copie des statuts de l’organisme ».

Lorsque le demandeur est en cours de constitution, doivent être indiqués « les nom, adresse et qualité de la personne qui la représente pour la demande ».

Si le code de l’action sociale et des familles ne prévoit pas explicitement la possibilité pour une personne morale en cours de constitution de déposer une demande d’autorisation, les dispositions relatives au contenu du dossier de candidature[1]ne l’excluent pas formellement. L’article R. 313-4-3 exige en effet que le candidat produise les documents permettant de l’identifier, notamment un exemplaire de ses statuts s’il s’agit d’une personne morale de droit privé, mais il n’impose pas la production d’un document justifiant que le candidat est d’ores-et-déjà doté de la personnalité morale. Autrement formulé, les textes ne font pas de distinction entre les personnes morales constituées et celles en cours de constitution.

 

La coopération doit être voulue par les partenaires qui désignent un ou plusieurs mandataires pour accomplir les formalités nécessaires au dépôt de la demande d’autorisation.

Les partenaires désignent des mandataires pour accomplir les formalités nécessaires au déroulement de l’activité sociale du groupement dont le dépôt du dossier d’autorisation.

Conformément aux articles 1843 et suivants du code civil (et à l’article L. 251-4 du code du commerce pour les GIE), des personnes peuvent « agir au nom de la société [le groupement] en formation ». Elles sont alors « tenues des obligations nées des actes ainsi accomplis ».

Le groupement régulièrement constitué reprend ensuite les engagements souscrits, qui sont alors réputés avoir été dès l’origine contractés par ledit groupement.

Mais comment savoir si le groupement est bien en cours de formation ?

Un groupement est regardé comme étant en cours de formation dès lors qu’est démontrée la volonté de ses fondateurs de concrétiser l’existence dudit groupement. C’est ici l’affectio societatis qui est recherchée. Cette expression latine renvoie à l’idée de l’existence d’un lien psychologique entre les partenaires qui désigne un élément constitutif du futur groupement et dont les composantes sont l’absence de subordination entre les partenaires, la volonté de collaborer à la conduite des affaires sociales et l’acceptation d’aléas communs.

En matière de GIE, la jurisprudence a eu l’occasion de se prononcer et de confirmer la possibilité pour un GIE en formation de déposer un dossier d’autorisation d’installation d’équipements matériels lourds.

Le juge administratif  a ainsi pu considérer qu’était recevable une demande d’autorisation présentée au nom d’un GIE en cours de formation, conjointement par le directeur du Centre Hospitalier membre du groupement et le co-gérant d’une société de radiologues libéraux[2]. Le juge s’est fondé sur les dispositions de l’article L. 251-4 du code de commerce, cité précédemment, qui prévoient que les engagements souscrits par les personnes ayant agi au nom du GIE en formation peuvent être repris par le groupement une fois que celui-ci a été régulièrement constitué et immatriculé, les engagements étant alors réputés avoir été souscrits dès l’origine par le groupement.

Malgré l’absence de jurisprudence en ce qui concerne les GCS et les GCSMS, il est possible de raisonner par analogie et de considérer que les parties ont manifesté leur affectio societatis par l’élaboration d’un projet de convention constitutive, signée ou non.

 

Les articles R. 6122-32-1 du code de la santé publique et R. 313-4-3 du code de l’action sociale et des familles imposent en effet que le dossier de demande d’autorisation contienne un exemplaire des statuts de la personne morale pétitionnaire.

 

Il est recommandé que l’acte constitutif joint au dossier de demande d’autorisation contienne une clause stipulant la reprise des actes accomplis pour le compte du groupement en formation.

 

Bien que l’article L .251-4 du code de commerce n’ait pas d’équivalent dans la législation applicable aux GCS et aux GCSMS, la délivrance d’une autorisation à un groupement en formation apparaît possible dans la mesure où la jurisprudence admet la reprise des actes accomplis par des personnes morales en formation, même en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires le prévoyant expressément[3]. Il semble dès lors possible que les fondateurs d’un groupement en formation puissent agir en son nom et pour son compte. En pratique, afin de sécuriser la demande, il est recommandé que la convention constitutive contienne une clause prévoyant expressément la reprise des actes accomplis pour le compte du groupement en formation.

Pour les GCS, le code de la santé publique prévoit depuis 2017[4]que lorsqu’un groupement se créé en ayant notamment pour objet d’être titulaire d’une autorisation d’activité de soins, le directeur général de l’Agence Régionale de Santé décide aux termes d’un même acte :

  1. L’approbation de la convention constitutive du groupement ;
  2. La délivrance d’une autorisation d’activités de soins à ce groupement ;
  3. L’érection du groupement de coopération sanitaire titulaire d’une autorisation d’activités de soins en établissement de santé

 

Ce faisant, la réglementation consacre désormais explicitement la possibilité pour un GCS en cours de constitution de déposer pour son compte une demande d’autorisation, la délivrance de l’autorisation au groupement et l’approbation de sa convention constitutive par l’ARS devant se faire simultanément, dans le même acte administratif.

 

 


[1]Articles R. 313-4-3 du CASF pour les demandes soumises à appel à projet et R. 313-8-1 du CASF pour les demandes ne relevant pas de la procédure d’appel à projet.

[2]Cour administrative d’appel de LYON, 9 mars 2010, SELARL Groupe radiologique du Léman c/Ministère de la santé et des sports, n° 07LY01869

[3]Par exemple pour les associations ; v. Cass. civ, 1ère4 juillet 1995, n°93-18-432.

[4]Article R. 6133-17 II issu du décret n° 2017-631 du 25 avril 2017 relatif à la constitution et au fonctionnement des groupements de coopération sanitaire.

Me Laurine Jeune, avocate associée, a rejoint le Cabinet Houdart et Associés en janvier 2011.

Elle conseille et accompagne depuis plus de douze ans les acteurs du secteur de la santé et du médico-social, publics comme privés, dans leurs projets d’organisation ou de réorganisation de leurs activités :

- Coopération (GCS de moyens, GCS exploitant, GCS érigé en établissement, GCSMS, GCSMS exploitant, GIE, GIP, convention de coopération, co-construction,…etc.)
- Transfert partiel ou total d’activité (reprise d’activités entre établissements (privés vers public, public vers privé, privé/privé, public/public),
- Fusion (fusion d’association, fusion entre établissements),
- Délégation et mandat de gestion,
- GHT, etc.

Me Laurine Jeune intervient également en qualité de conseil juridique auprès des acteurs privés en matière de création et de fonctionnement de leurs structures (droit des associations, droit des fondations, droit des sociétés).

Enfin, elle intervient sur des problématiques juridiques spécifiquement liés à :

- la biologie médicale,
- la pharmacie hospitalière,
- l’imagerie médicale,
- aux activités logistiques (blanchisserie, restauration),
- ou encore à la recherche médicale.

Nicolas Porte, avocat associé, exerce son métier au sein du Pôle organisation du Cabinet Houdart & Associés.

Après cinq années consacrées à exercer les fonctions de responsable des affaires juridiques d’une Agence Régionale de Santé, Nicolas PORTE a rejoint récemment le Cabinet Houdart et Associés pour mettre son expérience au service des établissements publics de santé et plus généralement, des acteurs publics et associatifs du monde de la santé.

Auparavant, il a exercé pendant plus de dix années diverses fonctions au sein du département juridique d’un organisme d’assurance maladie.

Ces expériences lui ont permis d’acquérir une solide pratique des affaires contentieuses, aussi bien devant les juridictions civiles qu’administratives, et d’acquérir des compétences variées dans divers domaines du droit (droit de la sécurité sociale, droit du travail, baux, procédures collectives, tarification AT/MP, marchés publics). Ses cinq années passées en ARS lui ont notamment permis d’exercer une activité de conseil auprès du directeur général et des responsables opérationnels de l’agence et développer une expertise spécifique en matière de droit des autorisations sanitaires et médico-sociales (établissements de santé, établissements médico-sociaux, pharmacies d’officines) et de contentieux de la tarification à l’activité.