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Veille juridique
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I – ACTUALITE JURIDIQUE

  • I –La loi n°2019-180 du 8 mars 2019 visant à renforcer la prise en charge des cancers pédiatriques par la recherche, le soutien aux aidants familiaux, la formation des professionnels et le droit à l’oubli.
  • II –Décret n°2019-17 du 9 janvier 2019 relatif aux missions, à la composition et au fonctionnement des conseils nationaux professionnels des professions de santé.
  • III –Décret n°2019-105 du 15 février 2019 relatif à l’organisation de la collecte de sang total en l’absence physique du médecin.
  • IV-Décret n°2019-137 du 27 février 2019 relatifs aux examens médicaux obligatoires de l’enfant et au contrôle vaccinale obligatoire et l’arrêté du 26 février 2019 SSAP1833603A.
  • V-Décret n°2019-149 du 27 février 2019 modifiant le décret n°2007-1111 relatif à l’obligation vaccinale par le vaccin antituberculeux.

 

II – ACTUALITE JURISPRUDENTIELLE DU CONSEIL D’ETAT

  • I-Conseil d’Etat, 5et 6echambres, 4 février 2019, n°413247.
  • II-Conseil d’Etat, 5 et 6echambres, 4 février 2019, n°412729.
  • III-Conseil d’Etat, 5echambre, 15 février 2019, n°415988.
  • IV-Conseil d’Etat, 12 mars 2019, n°4147038.

 

III – ACTUALITE JURISPRUDENTIELLE DE LA COUR DE CASSATION

  • I-  Cour de cassation, Chambre civile 1, 9 janvier 2019, n°18-12906.
  • II-Cour de Cassation, Chambre civile 1, 23 janvier 2019, n°18-10706.
  • III-Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 janvier 2019, n°16-85746.
  • IV-Cour de cassation, Chambre criminelle, 5 mars 2019, n°18-80712.

 

IV – FOCUS GLYPHOSATE

 

 


 

I – ACTUALITE JURIDIQUE

 

  • La loi n°2019-180 du 8 mars 2019 visant à renforcer la prise en charge des cancers pédiatriques par la recherche, le soutien aux aidants familiaux, la formation des professionnels et le droit à l’oubli.

 

  • La recherche scientifique sur les cancers pédiatriques :

L’article 1erde la loi modifie l’article L. 1415-2 du code de la santé publique qui définit les missions de l’Institut national du cancer (INCa), et qui est désormais en charge de proposer une stratégie décennale de lutte contre cette pathologie. Cette stratégie devra prévoir les axes de la recherche en cancérologie, l’affectation des moyens et la part des crédits affectés à la recherche en cancérologie pédiatrique.

L’article 9 de cette loi prévoit que le Gouvernement doit remettre chaque année au Parlement un rapport relatif à l’ensemble des financements publics, annuels et pluriannuels, allouées à la recherche sur les cancers pédiatriques. Ce rapport devra également préciser les avancées obtenues ainsi que les projets scientifiques engagées dans les cancers pédiatriques.

L’article 3 de la loi précitée élargit sensiblement la possibilité de recourir à des essais cliniques sur les mineurs en modifiant l’article L. 1121-7 du code de la santé publique par « Les mineurs ne peuvent être sollicités pour se prêter à des recherches seulement si des recherches d’une efficacité comparable ne peuvent être effectuées sur des personnes majeures », au lieu de « que si des recherches d’une efficacité comparable ne peuvent être effectuées sur des personnes majeures ». Le but est de permettre une meilleure adéquation entre les essais et la particularité des cancers pédiatriques. Cependant les conditions pour réaliser ces recherches restent identiques :

  • Des recherches d’une efficacité comparable ne peuvent être effectuées sur des personnes majeures.
  • Soit le bénéfice escompté pour ces personnes est de nature à justifier un risque prévisible encouru, soit ces recherches se justifient au regard du bénéfice escompté pour d’autres mineurs. Mais les risques prévisibles et les contraintes doivent présenter un caractère minimal.

 

  • Le droit à l’oubli pour les personnes ayant souffert d’un cancer pédiatrique :

L’article 7 de la loi du 8 mars 2018 prévoit que les signataires de la convention AERAS (s’assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé) engagent dans un délai maximal de six mois une négociation sur la possibilité d’appliquer à l’ensemble des pathologies cancéreuses survenues avant l’âge de dix-huit ans, un droit à l’oubli après un délai de cinq ans à compter de la rémission, au lieu de dix ans actuellement.

En cas de carence des signataires, l’âge et le délai à partir desquels un droit à l’oubli est obligatoire seront fixés par décret en Conseil d’Etat, sans pouvoir être inférieurs à cinq ans à compter de la fin du protocole thérapeutique pour les cancers survenus avant l’âge de dix-huit ans.

L’article 8 de la loi précitée prévoit également que le Gouvernement devra remettre un rapport au Parlement avant le 8 mars 2020 sur l’accès aux crédits par les personnes ayant souffert d’un cancer pédiatrique, sur la possibilité d’appliquer ce droit à l’oubli pour les personnes ayant souffert d’un cancer pédiatrique avant vingt-et-un ans, au lieu de dix-huit ans, et sur la possibilité d’accroitre les sanctions en cas de manquement à la convention AERAS.

  • Mesures en faveur des proches aidants :

Le congé de présence parental est accordé au salarié dont un enfant à charge est atteint notamment d’une maladie d’une particulière gravité, rendant indispensable une présence soutenue et des soins courants, (article L. 1225-62 du code du travail).

Initialement, la durée de ce congé était au maximum de 310 jours ouvrés (article L. 1225-62 du code du travail), pendant une période égale à la durée prévisible du traitement de l’enfant établi par certificat médical dans la limite de trois ans (article D. 1225-16 du code du travail), et cette période devait faire l’objet d’un nouvel examen tous les dix mois (article D. 1225-17 du code du travail).

Dorénavant, grâce à l’article 5 de la loi qui modifie l’article L. 1225-62 du code du travail et L. 544-2 du code de la sécurité, le salarié peut bénéficier d’un nouveau congé de présence parentale en cas de rechute ou de récidive de la pathologie de l’enfant, malgré l’utilisation du crédit des 310 jours ouvrés. Le droit aux allocations parentales journalières peut également être reconduit après ce délai de 310 jours, dans les mêmes conditions.

Par ailleurs, lorsque le médecin le prévoit, le réexamen du congé parental ne peut être inférieur à six mois, ni supérieur à un an. Il en va de même concernant le réexamen des droits à l’allocation journalière de présence parentale, dont la durée prévisible devra être mentionnée dans un certificat médical.

Enfin, l’article 5 de la loi modifie l’article L. 1225-65 du code du travail et permet dès à présent de prendre en compte la totalité du congé de présence parentale pour calculer les droits du salarié dus à l’ancienneté dans l’entreprise, et non plus la moitié de la période de congé de présence parentale.

  • Décret n°2019-17 du 9 janvier 2019 relatif aux missions, à la composition et au fonctionnement des conseils nationaux professionnels des professions de santé.

Le décret susvisé prévoit que chaque profession ou spécialité ne peut être représenté que par un seul conseil national professionnel et que ce conseil, pour être reconnu en tant que tel, doit signer une convention avec l’Etat.

Puis, le décret précise qu’un conseil national professionnel regroupe les sociétés savantes et les organismes regroupant des professionnels de santé exerçant la même profession ou la même spécialité, et ne peut être crée que sous la forme associative. Les activités d’un conseil national professionnel doit respecter les exigences de l’éthique scientifique et de l’indépendance de l’expertise conformément aux principes définies par la charte de l’expertise sanitaire.

De plus, le décret prévoit, outre les missions déjà mentionnées à l’article D. 4021-2, que les conseils nationaux professionnels se doivent :

  • D’apporter une contribution en proposant des professionnels susceptibles d’être désignés en tant qu’expert dans les domaines scientifiques et opérationnel,
  • De contribuer à analyser et à accompagner l’évolution des métiers et des compétences des professionnels de santé à travers la définition de référentiels métiers et de recommandations professionnelles,
  • De participer à la mise en place de registres épidémiologiques pour la surveillance des évènements de santé et de registres professionnels d’observation des pratiques,
  • De désigner, sur demande de l’Etat, des représentants de la profession ou de la spécialité pour siéger dans les structures appelées à émettre des avis sur les demandes d’autorisations d’exercice ou de reconnaissance des qualifications professionnelles.

Par ailleurs, dorénavant, lorsque plusieurs conseils nationaux créent une structure fédérative, création possible uniquement sous la forme associative, celle-ci se doit de :

  • Coordonner des réflexions et des travaux sur des sujets d’intérêt commun ainsi que des partages méthodologiques afin d’encourager les approches transdisciplinaires et de faire progresser les connaissances communes,
  • Prendre en charge des fonctions pour le compte de ses membres, mettre en place des centres de ressources et mutualiser les charges correspondant à des activités exercées en commun,
  • Assurer par l’intermédiaire de membres issus des conseils nationaux, une représentation auprès des pouvoirs publics, dans le cadre d’actions nécessitant une approche transversale.

Le décret impose également désormais à chaque conseil national professionnel et à chaque structure fédérative d’adopter un règlement intérieur qui devra prévoir, si les statuts ne le font pas déjà :

  • Les moyens permettant de garantir la représentation équilibrée des différents modes d’exercice de la profession ou de la spécialité,
  • La composition et les modalités de fonctionnement des instances mentionnées à l’article 4021-4 du code de la santé publique,
  • Les procédures liées au cycle budgétaire,
  • Les conditions de conclusions de conventions,
  • Les modalités d’identification des professionnels susceptibles d’être désignés expert,
  • Les dispositions relatives à la gestion des déclarations d’intérêt des membres des instances et des experts désignés au nom du conseil national professionnel ou de la structure fédérative.

Les fédérations se doivent de préciser également dans leur règlement intérieur, les modalités selon lesquelles elles remplissent leurs missions de coordination de réflexion et de travaux, de prise en charge de fonctions pour le compte de ses membres et de représentation auprès des pouvoirs publics.

  • Décret n°2019-105 du 15 février 2019 relatif à l’organisation de la collecte de sang total en l’absence physique du médecin.

Ce décret, modifiant considérablement l’article R. 1222-18 du code de la santé publique, permet désormais aux infirmiers et infirmières diplômés d’Etat d’assurer la surveillance des opérations de prélèvement de produits sanguins labiles en l’absence physique d’un médecin sur les lieux.

Initialement, la surveillance du déroulement des opérations de prélèvements de produits sanguins labiles devait être assurée par des personnes satisfaisant aux conditions d’exercice de la médecine et étant titulaire du diplôme d’étude spécialisé complémentaire d’hémobiologie-transfusion, de la capacité en technologie transfusionnelle, du diplôme universitaire de transfusion sanguine ou d’un diplôme de médecine du don. Les personnes qui satisfont aux conditions d’exercice de la médecine sans être titulaire d’un diplôme ou titre susmentionné peuvent assurer la surveillance du déroulement du prélèvement et conduire l’entretien préalable au don, mais sous la responsable d’un médecin titulaire de l’un des diplômes ou titres susmentionnés.

Le décret n°2019-105 prévoit désormais qu’en l’absence d’un médecin sur le site de la collecte, la surveillance du déroulement des opérations sont confiées aux infirmiers et infirmières si :

  • Ils justifient d’au moins deux ans d’expérience dans l’activité de collecte, d’encadrement ou de coordination de soins,
  • Ils ont suivis une formation spécifique relative à la surveillance du déroulement du prélèvement,
  • Ils bénéficient d’un moyen de communication pour joindre à tout moment un médecin titulaire d’un des diplômes susmentionnés.

En ce sens, le décret prévoit ainsi que le prélèvement de sang total doit être mis en œuvre au sein d’un établissement de transfusion sanguine sous la direction et la responsabilité d’un médecin, mais celui-ci n’est pas obligé d’être présent s’il est joignable à distance par tout moyen de communication.

Le décret prévoit enfin que, avant le 15 août 2020, l’EFS devra remettre au directeur général de l’ANSM un bilan des collectes de sang total réalisées selon ces nouvelles dispositions en prenant en compte le critère relatif à la sécurité des donneurs de sang, et devra mentionner les situation dans lesquelles un médecin a été appelé, ainsi que les difficultés rencontrées dans ce nouveau dispositif de surveillance.

  • Décret n°2019-137 du 27 février 2019 relatifs aux examens médicaux obligatoires de l’enfant et au contrôle vaccinal obligatoire et l’arrêté du 26 février 2019 SSAP1833603A.

La loi de financement de la Sécurité sociale du 22 décembre 2018 pour 2019 a modifié l’article L. 2132-2 du code de la santé publique portant sur les examens obligatoires dont les enfants doivent bénéficier. Le décret et l’arrêté précités viennent en préciser les modalités d’application.

Initialement, les enfants n’étaient soumis qu’à treize examens médicaux aux cours des six premières années, dont neuf au cours de la première année.

Le décret précité, modifiant l’article R. 2132-1 du code de la santé publique, prévoit vingt examens médicaux obligatoires au cours des dix-huit premières années de l’enfant, dont quatorze durant les trois premières années. L’arrêté précité fixe le calendrier des examens médicaux. Ces vingt examens doivent permettre :

  • La surveillance de la croissance staturo-pondérale de l’enfant,
  • La surveillance de son développement psychique, psychoaffectif et neuro-développemental,
  • Le dépistage des troubles sensoriels,
  • La pratique ou la vérification des vaccinations,
  • La promotion des comportements et environnements favorables à la santé.

Trois des examens pratiqués lors des trois premières années doivent donner lieu à l’établissement d’un certificat médical (R. 2132-2 I du code de la santé publique). Le médecin qui a établi ce certificat médical doit l’adresser dans un délai de huit jours, au médecin responsable de la PMI du département des personnes en charge de l’autorité parentale.

Par ailleurs, le décret prévoit que désormais lorsque le mineur est admis dans une collectivité d’enfants (crèche, assistant maternel, établissement scolaire…), son maintien est subordonné à la présentation chaque année du carnet de santé ou de vaccination attestant du respect de l’obligation de vaccination (articles R. 3111-8 et D. 3111-6 du code de la santé publique).

  • Décret n°2019-149 du 27 février 2019 modifiant le décret n°2007-1111 relatif à l’obligation vaccinale par le vaccin antituberculeux.

Ce décret suspend pour un grand nombre d’activités et de professionnels, notamment de professions médicales ou paramédicales, l’obligation vaccinale par le vaccin obligatoire antituberculeux compte tenu de l’évolution de la situation épidémiologique et des connaissances médicales et scientifiques à partir du 1eravril 2019.

 

II : ACTUALITE JURISPRUDENTIELLE DU CONSEIL D’ETAT

 

  • Conseil d’Etat, 5et 6echambres, 4 février 2019, n°413247.

Un risque de subir un AVC de 3% constitue une probabilité faible de survenance du dommage permettant au patient de se faire indemniser au titre de la solidarité nationale.

Le 28 juin 2011, un patient subissait au CHU de CAEN une intervention chirurgicale en vue de remplacer son défibrillateur cardiaque implantable. De retour à son domicile, il a été victime d’un accident vasculaire cérébrale entrainant, de manière définitive, une hémiplégie droite massive, d’un déficit facial droit, d’aphasie et de troubles de la compréhension, caractérisant ainsi un déficit fonctionnel évalué à 90 %.

Le 9 juin 2017, la cour administrative d’appel de NANTES estimait que les conditions d’indemnisation au titre de la solidarité nationale prévues à l’article L. 1142-1 du code de la santé publique n’étaient pas remplies et décida de mettre l’ONIAM hors de cause.

Au visa de l’article L.1142-1 du code de la santé publique, le Conseil d’Etat rappelle qu’en l’absence d’une faute d’un professionnel de santé, l’ONIAM doit assurer, au titre de la solidarité nationale, la réparation de dommages résultant directement d’un acte de prévention, de diagnostic ou de soins à la condition qu’ils présentent un caractère d’anormalité au regard de l’état de santé du patient comme de l’évolution prévisible de cet état.

Il est ensuite précisé que la condition d’anormalité du dommage est caractérisée lorsqu’un acte médical a entrainé des conséquences plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable dans l’hypothèse où il ne suivrait aucun traitement thérapeutique.

Mais surtout, le Conseil d’Etat explique que « Lorsque les conséquences de l’acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l’absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l’acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible ».

De ces constatations, le Conseil d’Etat considère qu’un risque de survenance d’un AVC de 3% lors d’un changement de défibrillateur constitue une probabilité faible de survenance du dommage, caractérisant ainsi un risque anormal et entrainant par conséquent une indemnisation au titre de la solidarité nationale.

  • Conseil d’Etat, 5 et 6echambres, 4 février 2019, n°412729.

Dans le cadre d’une contamination transfusionnelle, les tiers payeurs peuvent demander à l’EFS, de lui rembourser les frais et débours engagés, même si le centre de transfusion sanguine n’a commis aucune faute, et même si l’établissement qui a fabriqué le produit et différent de celui qui la fournit si au moins l’un des deux est assuré pour le risque de contamination contracté par la victime.

Le 27 mars 1981, un patient se voyait administrer deux culots de globules rouges et une unité de plasma au sein du centre hospitalier de Châlons-en-Champagne. En novembre 2000, il apprenait qu’il avait contracté le virus de l’hépatique C. Une enquête transfusionnelle réalisée par l’EFS révélait que les culots de globules rouges administrés provenaient du centre de transfusion sanguine de REIMS, aux droits et obligations de laquelle vient désormais l’EFS.

Le 7 mai 2008, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne rejetait la demande d’indemnisation du patient. La CPAM saisissait ce même tribunal, qui le 12 novembre 2015, condamna l’Etablissement français du sang (EFS) à rembourser les frais et débours engagés par la CPAM des Ardennes et à lui rembourser au fur et à mesure de l’engagement de ses dépenses le montant des frais futurs en fixant un plafond.

Le 23 mai 2017, la cour administrative d’appel de Nancy rejetait la requête formulée par l’EFS contre ce jugement, qui décida alors de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’Etat.

Dans sa décision, le Conseil d’Etat rappelle qu’en vertu de l’article L. 1221-14 du code de la santé publique, les tiers payeurs qui ont versé des prestations au titre d’une contamination transfusionnelle ne peuvent exercer un recours subrogatoire contre l’EFS, en sa qualité de fournisseur de produits sanguins ou d’héritier des obligations du fournisseur de ces produits, si celui-ci n’est pas assuré, si sa couverture d’assurance est épuisée ou encore dans le cas où le délai de validité de sa couverture est expiré.

En revanche, il est précisé qu’aucune disposition ne subordonne l’exercice d’un recours subrogatoire à l’existence d’une faute du fournisseur des produits sanguins. La responsabilité de ce fournisseur se trouve engagée du seul fait que les produits transfusés étaient porteurs d’un agent infectieux.

Enfin, le Conseil d’Etat, explique que dans l’hypothèse où l’établissement ayant fabriqué le produit sanguin n’est pas le même que celui qui l’a distribué à l’établissement de santé qui a pratiqué la transfusion, ces deux établissements de transfusion sanguine doivent être regardés comme les fournisseurs du produit sanguin, qui sont par conséquent, solidairement responsables des préjudices résultant de la contamination d’un patient. Les tiers payeurs peuvent donc exercer un recours subrogatoire contre l’EFS si l’un au moins des deux établissements rempli la condition de couverture assurantielle.

  • Conseil d’Etat, 5echambre, 15 février 2019, n°415988

Un centre hospitalier qui n’a pas vérifié le consentement d’un patient qui avait manifesté, la veille de l’opération, sa rétractation de donner son reins, constitue une faute entrainant l’indemnisation d’un préjudice permanent exceptionnel.

Le droit à réparation de la victime ne peut être réduit en raison d’une prédisposition pathologique lorsque l’affectation dont elle est atteinte a été provoquée ou révélée par le fait dommageable.

Le 9 novembre 2004, un patient subissait au CHU d’Angers une opération chirurgicale consistant à prélever son rein gauche en vue d’une greffe au bénéfice de son frère. Depuis cette opération, le patient souffre de douleurs abdominales et thoraco-lombaires, accompagnées de crises de type neurologique et d’une symptomatologie anxio-dépressive.

De plus, la veille au soir de l’opération, le patient avait exprimé son souhait de quitter l’établissement hospitalier et de renoncer au don.

Le Conseil d’état rappelle dans sa décision que « le droit à réparation de la victime ne pouvant être réduit en raison d’une prédisposition pathologique lorsque l’affection dont elle est atteinte n’a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable ». Elle considère donc qu’un patient qui a subi des complications médicales suite une intervention chirurgicale entrainant une dépression l’empêchant de travailler, doit pouvoir se faire indemniser du poste de préjudice de perte de gains professionnels même si l’expert a indiqué dans son rapport, que le patient souffrait initialement d’un terrain dépressif qui avait pu pérenniser les phénomènes douloureux et la dépression réactionnelle.

Puis, le Conseil d’Etat estime que la faute du centre hospitalier de ne pas vérifier le consentement du patient qui a exprimé sa volonté de se rétracter la veille constitue un préjudice permanent exceptionnel, sans que le patient n’ait besoin de préciser les motifs de sa rétractation.

  • Conseil d’Etat, 12 mars 2019, n°4147038

Un centre hospitalier a commis une faute, entrainant réparation, pour avoir tardé à annoncer le décès d’un patient à sa famille.

Un patient a été admis au service d’urgences d’un centre hospitalier à 23h30, puis une infirmière a constaté le décès le lendemain matin à 7h45.

La famille du défunt reprochait au centre hospitalier les conditions dans lesquelles le décès leur a été annoncé. Le tribunal administratif et la cour administrative de Marseille rejetèrent leur demande d’indemnisation, et la victime du défunt formulait un pourvoi en cassation.

Le Conseil d’Etat considère quant à lui que le retard par le centre hospitalier dans l’annonce du décès d’un patient à sa famille cause nécessairement une souffrance morale distincte du préjudice d’affectation éprouvée par les membres de la famille du défunt, du fait du manque d’empathie de l’établissement et du caractère fautif de l’annonce.

 

 

 

III – ACTUALITE JURISPRUDENTIELLE DE LA COUR DE CASSATION

 

  • Cour de cassation, Chambre civile 1, 9 janvier 2019, n°18-12906

Lorsque la date de contamination transfusionnelle ne peut être établie avec certitude, l’ONIAM ne peut demander la garantie assurantielle à une société d’assurance, seulement s’il est parfaitement établi que le risque était couvert pendant la période durant laquelle la contamination a eu lieu.

Un patient hémophile a reçu à partir de 1968 un grand nombre de produits sanguins provenant du centre de transfusion sanguine du Mans et du centre régional de transfusion sanguine de Nantes.

Un tribunal administratif a condamné l’Etablissement français du sang (EFS), venu aux droits et obligations des centres de transfusion sanguine, ainsi que l’ONIAM, substitué à l’EFS, à indemniser la victime et à rembourser la CPAM.

L’EFS a assigné devant la juridiction civile la société COVEA RISK, assureur du centre de transfusion sanguine du Mans, et la société SMACL, assureur du centre de transfusion sanguine de Nantes, de 1977 à 1989. La société MMA IARD est intervenue volontairement à l’instance comme assureur du centre de transfusion sanguine du Mans de 1971 à 1981 et, comme venant aux droits et obligations de la société Winterthur qui était l’assureur du centre à compter du 1erjanvier 1982.  L’ONIAM est également intervenue volontairement à l’instance.

La Cour de cassation rappelle qu’en vertu de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002, de la loi n°2008-1330 du 17 décembre 2008 et de la loi n°2012-1404 du 17 décembre 2012, l’ONIAM venant aux droits et obligations de l’EFS, assure la mission d’indemnisation des victimes de contaminations transfusionnelles, sans modifier le régime de responsabilité, et dispose de la possibilité de demander à être garantie des sommes versées aux victimes et aux tiers payeurs par les assureurs des  centres de transfusion sanguine.

Mais, la Cour de cassation rappelle que la garantie assurantielle ne peut être mobilisée que s’il est établi au préalable que le fait dommageable, constitué par la contamination, s’est produit pendant la période de validité du contrat.

Par conséquent, le fait que la date de contamination de la victime est restée indéterminée, tout en sachant qu’elle avait pu se produire entre 1968 et 1987, les sociétés d’assurances ne sont pas tenues à garantie puisqu’elles n’avaient pas assuré les centres de transfusion sanguine sur l’ensemble de cette période, mais que partiellement.

  • Cour de Cassation, Chambre civile 1, 23 janvier 2019, n°18-10706

Même si l’accouchement par voie basse est un phénomène naturel et non un acte médical, la future mère bénéficie d’un droit d’information des risques pouvant survenir du fait de sa pathologie, ou de celle de son enfant, ou du fait de ses antécédents médicaux.

Le 1ernovembre 2011, Madame Y a donné naissance par voie basse à son enfant après que le Dr Z gynécologue obstétricien exerçant à titre libéral, ait déclenché l’accouchement. L’enfant a subi plusieurs séquelles liées à une atteinte du plexus brachial.

La Cour d’appel a écarté toute réparation au titre d’un défaut de réparation au motif qu’en présence d’un accouchement par voies naturelles en présence d’une macrosomie fœtale, le gynécologue obstétricien devait seulement informer la patiente sur les modalités de déclenchement de l’accouchement.

Or, la Cour de cassation considère que même si l’accouchement par voie basse constitue un évènement naturel et non un acte médical, le praticien se doit d’informer la femme enceinte sur les risques susceptibles de se présenter au regard de son état de santé ou de celui du fœtus, et de ses antécédents médicaux. Autrement dit, en présence d’une pathologie de la mère ou de l’enfant à naître ou d’antécédents médicaux entrainant un risque connu en cas d’accouchement par voie basse, la mère doit être informée de ce risque ainsi que de la possibilité de procéder à une césarienne et des risques inhérents à une telle information.

Elle ajoute également que même si les complications de l’accouchement sont dues à une faute du praticien qui n’a pas décidé d’avoir recours à une césarienne, la mère est fondée à faire valoir un préjudice d’impréparation pour défaut d’information.

  • Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 janvier 2019, n°16-85746.

Deux sociétés de soins esthétiques contestaient leur condamnation pour exercice illégal de la médecine pour avoir réalisé des épilations à la lumière pulsée.

La Cour de cassation suit l’avis de la cour d’appel selon lequel « La restriction (…) de la possibilité de pratiquer l’épilation à la lumière pulsée aux seules personnes titulaires d’un diplôme de médecine, relève d’impératifs de santé publique et ne porte pas atteinte aux principes de libre concurrence, de libre établissement et de libre prestation de services instaurés par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ».

Par ailleurs, la Cour de cassation affirme que même si l’épilation à lumière pulsée n’existait pas lors de l’adoption de l’arrêté du 6 janvier 1962 qui autorise l’esthéticienne à pratiquer seulement l’épilation à la cire ou à la pince épiler, il ne peut être abrogé par désuétude puisque seul un acte réglementaire ou une norme supérieure peut le supprimer.

  • Cour de cassation, Chambre criminelle, 5 mars 2019, n°18-807120.

Affaire Lambert :

L’arrêt de l’alimentation et la réduction de l’hydratation au strict minimum ne peut s’analyser en une intention de nuire à la personne du patient alors même que la procédure collégiale dite « Léonetti » est imparfaite.

En 2008, après un accident de la circulation, un homme se retrouve en état neurovégétatif chronique.

Les parents de la victime portaient plainte contre le CHU et plusieurs médecins des chefs de tentative d’assassinat, violences aggravées, délaissement d’une personne vulnérable, non-assistance à personne en péril, atteinte arbitraire à la liberté individuelle, séquestration et violation du secret professionnel.

Le juge d’instruction a rendu une ordonnance d’irrecevabilité de constitution de partie civile et de refus d’informer.

La Cour d’appel a considéré que le fait de mettre un terme à l’alimentation et de réduire l’hydratation au strict minimum ne pouvait s’analyser en un acte positif de violence physique et ne pouvait caractériser l’élément matériel de l’homicide volontaire. La Cour a estimé également que la cessation de l’alimentation et la réduction de l’hydratation étaient en l’espèce justifiées par l’engagement d’une procédure collégiale n’ayant pas pour but de donner la mort, mais de mettre fin à un maintien en vie artificiel dans le cas reconnu d’obstination déraisonnable.

Puis la Cour d’appel, après avoir relevé que l’épouse du patient avait été associée à la procédure collégiale dite « Léonetti », dans le cadre de laquelle la mère avait fait part de son opposition et le père ne s’était pas présenté, les juges ont retenu que l’inobservation des règles de consultation prévues par cette procédure collégiale ne pouvait avoir pour effet de transformer une intention de cesser les traitements en une intention criminelle dans la mesure où cette démarche n’était nullement intervenue en dehors de tout cadre légal.

Enfin, la Cour d’appel a estimé que le défaut de mise à disposition du patient d’un fauteuil adapté et de l’absence de séance de kinésithérapeute et de rééducation à la déglutition ne constituaient pas un délaissement de personne vulnérable, ni des violences volontaires, faute d’acte positif commis avec l’intention de nuire à la victime, ni de délit de non-assistance à personne en danger, et que la perspective de l’introduction d’une nouvelle procédure collégiale ne pouvait s’analyser comme un péril imminent alors qu’elle est prévue par la loi.

La Cour de cassation a repris la solution de la Cour d’appel selon laquelle le fait pour un médecin de mettre un terme à l’alimentation d’une personne en état neurovégétatif et de réduire l’hydratation à un strict minimum, dans le cadre de la procédure collégiale « Léonetti », même si ce protocole a été réalisé de manière imparfaite, exclut toute intention de porter atteinte à la personne du patient et n’est lors insusceptible de qualification pénale.

 

IV : FOCUS GLYPHOSATE

Actuellement 8000 procédures judiciaires sont en cours aux Etats-Unis contre les produits Glyphosate de la société Monsanto. Pour la première fois, ce produit se retrouvait sur le banc des accusés.

Monsieur Johnson DEWAYNE c/ Monsanto :

Le 10 août 2018, un jury populaire siégeant au sein d’un tribunal de San Francisco avait conclu que la société Monsanto avait agi avec malveillance en cachant le caractère potentiellement cancérigène du Glyphosate et que ses désherbants grand public Roundup et professionnel RangerPro avaient considérablement contribué à la maladie de Monsieur Johnson DEWAYNE, âgé de 46 ans et actuellement en phase terminale. Les citoyens américains avaient condamné la société à verser à la victime la somme de 289 millions de dollars de dommages et intérêts.

La société Monsanto avait demandé à Madame BOLANOS, juge à San Francisco d’organiser une procédure distincte de l’appel. Le 22 octobre 2018, elle maintenait le verdict au fond mais réduisait l’indemnisation à 78.5 millions d’euros. Le plaignant avait accepté cette transaction.

Mais la société américaine Monsanto, racheté par la société Bayer, a interjeté appel de la décision au motif que « Les données scientifiques présentées lors du procès ne soutiennent pas la conclusion d’un lien certain entre le Glyphosate ou le Roundup et le cancer de Monsieur Johnson ».

 

Monsieur Edwin Hardeman c/ Monsanto :

 

Le 25 février 2019, un nouveau procès, mais cette fois-ci au niveau fédéral, se tenait à San Francisco intenté par Monsieur Edwin Hardeman qui avait utilisé du Roundup entre 1986 à 2012 et qui était atteint aujourd’hui d’un cancer.

L’avocat de la société Monsanto affirmait que le Roundup n’avait pas causé le cancer de Monsieur Edwin Hardeman qui était atteint d’un cancer courant touchant entre 70 000 et 75 000 personnes par an, sans qu’elles aient utilisé le produit. La société Bayer qui a acheté la société Monsanto a demandé au juge Vince CHHABRIA de diviser les débats, en commençant par une première phase déterminant le lien de causalité entre l’utilisation du produit et le cancer du plaignant, et une deuxième phase permettant de déterminer, si le lien de causalité est établi, si la société Monsanto avait connaissance des risques.

Les avocats du plaignant font valoir que l’utilisation du glyphosate est encore plus dangereux lorsqu’il est utilisé dans le cadre du Roundup puisque ce produit est composé selon eux d’autres produits chimiques bien plus dangereux.

Le 19 mars 2019, le jury populaire a considéré que le désherbant Roundup de Monsanto a contribué au cancer de Monsieur Edwin Hardeman, permettant ainsi de débuter la deuxième phase du procès afin de déterminer si la société poursuivie avait connaissance des risques engendrés par le produit commercialisé.

Les avocats des plaignants vont essayer de démontrer que la société Monsanto a téléguidé et modifié certaines études à son avantage.

L’issu de ce procès, tenu au niveau fédéral, servira de baromètre pour les procès à venir.

 

En France :

 

Le 15 janvier 2019, le tribunal administratif de Lyon, saisi par le Comité de recherche et d’information indépendante sur le génie génétique, a annulé l’autorisation de mise sur le marché du Roundup Pro 360 commercialisé par la société Monsanto. Le tribunal a affirmé que l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail avait « commis une erreur d’appréciation au regard du principe de précaution » en autorisant ce produit le 6 mars 2017.