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veille juridique
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VEILLE JURIDIQUE 18 JUIN 2021

Article rédigé le 18 juin 2021 par Elssy El Rassi sous la supervision Me Marine Jacquet

Ouverture du télésoin et de la télé expertise aux auxiliaires médicaux et pharmaciens

Décret n° 2021-707 du 3 juin 2021
Arrêté du 3 juin 2021 définissant les activités de télésoin

 

La publication au journal officiel du décret n° 2021-707 du 3 juin 2021  et de l’arrêté du 3 juin 2021  marque une étape importante dans l’évolution des activités de soins.

Ces deux textes entérinent la possibilité pour les professionnels auxiliaires médicaux et pharmaciens de recourir aux télésoins.

Aux termes de ces textes, un auxiliaire médical ou un pharmacien peut désormais exercer à distance l’ensemble de ses compétences professionnelles, à la seule exclusion des soins nécessitant un contact direct en présentiel ou un équipement spécifique non disponible auprès du patient.

La pertinence du recours à la télémédecine ou au télésoin relève du professionnel médical, du pharmacien et de l’auxiliaire médical prenant en charge le patient. La décision doit être partagée avec le patient.

En cas de recours à la télésanté, le texte impose aux professionnels d’inscrire dans le dossier patient les informations suivantes :

« 1° Le compte rendu de la réalisation de l’acte de télémédecine ou de l’activité, et, le cas échéant, de la série d’activités, de télésoin ;

2° Les actes et les prescriptions effectués dans le cadre de l’acte de télémédecine ou de l’activité de télésoin ;

3° Son identité et éventuellement celles des autres professionnels participant à l’acte de télémédecine ou à l’activité de télésoin ;

4° La date et l’heure de l’acte de télémédecine ou de l’activité de télésoin ;

5° Le cas échéant, les incidents techniques survenus au cours de l’acte de télémédecine ou de l’activité de télésoin. »

Les tarifs des activités de télésoin réalisées par les auxiliaires médicaux et les majorations qui y sont associées ne peuvent être supérieurs à ceux fixés pour les mêmes activités mettant physiquement en présence le professionnel de santé et le patient. Il en est de même pour le pharmacien.

Le décret ouvre également le recours à la téléexpertise à tout professionnel de santé.

La téléexpertise est désormais définie ainsi : « Relèvent de la télémédecine (…) 2° La téléexpertise, qui a pour objet de permettre à un professionnel de santé de solliciter à distance l’avis d’un ou de plusieurs professionnels médicaux en raison de leurs formations ou de leurs compétences particulières, sur la base des informations de santé liées à la prise en charge d’un patient ; »

 

 

 

 Dépôt au sénat du projet de loi visant à favoriser l’attractivité des carrières médicales hospitalières et relative aux groupements hospitaliers de territoire et à la médicalisation des décisions à l’hôpital

Projet de loi (n° 664)

 

Le projet de loi (n° 664)  a été présenté en Conseil des ministres et déposé au Sénat le 2 juin 2021.  Il vise à procéder à la ratification des deux ordonnances suivantes :

•D’une part, l’ordonnance n° 2021-291 du 17 mars 2021  relative aux groupements hospitaliers de territoire et à la médicalisation des décisions à l’hôpital ;
•Et, d’autre part, l’ordonnance n° 2021-292 du 17 mars 2021  visant à favoriser l’attractivité des carrières médicales hospitalières.

Pour rappel, l’ordonnance n°2021-291 du 17 mars 2021 relative aux groupements hospitaliers de territoire et à la médicalisation des décisions à l’hôpital est venue renforcer le pouvoir décisionnel du corps médical dans la gestion de l’hôpital.

Elle permet la mise en place des commissions médicales de groupement, qui contribuent à l’élaboration et à la mise en oeuvre de la stratégie médicale du groupement hospitalier de territoire et du projet médical partagé. Le président de la CME devient co-décisionnaire avec le directeur pour la nomination et le retrait des fonctions de chef de pôle.

Ce dispositif qui peut susciter de nombreuses interrogations, comme le souligne Me Guillaume Champenois (article de Me Guillaume Champenois « Analyse de la médicalisation des décisions à l’hôpital » du 25 mai 2021), avait été récemment complété par deux décrets d’application publiés au Journal Officiel ce 29 mai 2021 (confer veille juridique du 7 juin 2021).

L’ordonnance n° 2021-292 du 17 mars 2021  visant à favoriser l’attractivité des carrières médicales hospitalières a, quant à elle, pour ambition de moderniser les conditions de recrutement et d’emploi des personnels médicaux des hôpitaux publics.

Le dispositif prévoit notamment de favoriser les exercices mixtes public/privé. Les praticiens dont la quotité de travail est inférieure ou égale à 90 % sont ainsi autorisés à exercer une activité privée lucrative, après déclaration au directeur de l’établissement. Les conditions d’accès à l’activité libérale intra-hospitalière sont également assouplies. Celle-ci n’est plus limitée à la seule qualité de praticien statutaire exerçant à temps plein.

L’ordonnance vient encore modifier les catégories de personnels médicaux pouvant être recrutés par les établissements publics de santé en introduisant la possibilité de recruter des étudiants de troisième cycle titulaires d’une autorisation d’exercice temporaire délivrée par le conseil départemental de l’ordre.

 

Allègement de la procédure de révision partielle du projet régional de santé

Décret n°2021-708 du 3 juin 2021.

 

La procédure de révision du projet régional de santé (PRS), est désormais simplifiée grâce à la publication au JO du décret n°2021-708 du 3 juin 2021.

En effet ce décret vient d’une part simplifier les conditions de révision des documents constituant le projet régional de santé et d’autre part en améliore la lisibilité.

Pour une analyse plus approfondie, nous vous invitons à lire l’article de Me Nicolas Porte :

SIMPLIFICATION DE LA PROCÉDURE DE RÉVISION DU PRS.

 

 

la SISA, groupement d’employeurs

Décret n° 2021-747 du 9 juin 2021
Le décret n° 2021-747 du 9 juin 2021  paru au journal officiel ce 11 juin 2021 vient définir les conditions de constitution et de fonctionnement d’un groupement d’employeurs porté par une société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA).

Ces changements s’inscrivent dans la lignée de ceux apportés récemment par  l’ordonnance n° 2021-584 du 12 mai 2021  relative aux communautés professionnelles territoriales de santé et aux maisons de santé qui ouvrent la possibilité aux SISA de salarier tout type de professionnels exerçant des activités de soins de premier recours et, le cas échéant, de second recours ainsi que toutes autres activités contribuant à la mise en œuvre du projet de santé (confer veille juridique du 25 mai 2021 – LIBÉRAL – BOULEVERSEMENTS JURIDIQUES DU CÔTÉ DES COMMUNAUTÉS PROFESSIONNELLES TERRITORIALES DE SANTÉ ET DES MAISONS DE SANTÉ).

Le décret encadre la question plus spécifique de l’ouverture du groupement d’employeurs à la SISA afin notamment de permettre  à la structure de recruter des assistants médicaux et les partager entre les différents médecins de la structure.

Il prévoit que lorsque le groupement d’employeurs n’est constitué qu’au bénéfice d’une partie seulement des associés de la SISA :

•En terme de répartition des charges : les charges communes à ces associés constituent pour chacun d’entre eux, en fonction de leur quote-part, une charge individuelle ;
•En terme de responsabilité financière : seuls les associés bénéficiant des services du groupement peuvent être tenus solidairement au paiement des dettes du groupement sous réserve que les statuts le précisent.

Une analyse plus approfondie sera communiquée à ce sujet.

 

Innovation : création du statut de pharmacien correspondant

Décret n° 2021-685 du 28 mai 2021

 

Afin d’améliorer et faciliter la prise en charge des maladies chroniques, le décret n° 2021-685, paru au Journal officiel le 30 mai, rend possible la désignation, par le patient, d’un pharmacien correspondant.

Le pharmacien ainsi désigné en informe le médecin traitant du patient. Il peut être suppléé dans cette fonction, après accord du patient, par un pharmacien exerçant dans la même officine.

Le pharmacien correspondant a la capacité de renouveler périodiquement des traitements chroniques et ajuster, si besoin, leur posologie.

La prescription médicale doit dans ce cadre comporter une mention autorisant le renouvellement par le pharmacien correspondant de tout ou partie des traitements prescrits ainsi que, le cas échéant, une mention autorisant l’ajustement de posologie.

La durée totale de la prescription et de l’ensemble des renouvellements réalisés par le pharmacien correspondant ne peut excéder douze mois.

Par ailleurs, il peut être relevé que l’officine doit disposer de locaux avec une isolation phonique et visuelle.

 

Commande publique : Possibilité de limiter l’indemnisation du cocontractant en cas de résiliation irrégulière au regard de ses fautes

CE, 7e – 2e chambres réunies, 18/05/2021, 442530

 

Le Conseil d’État dans  un arrêt mentionné aux tables du recueil Lebon publié ce 18 mai  s’est penché sur la question du régime de l’indemnisation du cocontractant de l’administration lors de la résiliation irrégulière de son contrat de commande publique.

Selon la Haute juridicition, si les fautes commises par le cocontractant ne sont pas d’une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat aux torts du titulaire, il n’en demeure pas moins que ces dernières doivent être prises en compte et limiter le droit à l’indemnisation du préjudice qu’il subit du fait de cette résiliation irrégulière.

Ainsi, il est retenu que commet une erreur de droit la cour qui condamne la personne publique à réparer l’intégralité du préjudice subi par son cocontractant, sans tenir compte des fautes commises par ce dernier dans l’exécution du contrat.

 

« Les fautes commises par le cocontractant de la personne publique dans l’exécution du contrat sont susceptibles, alors même qu’elles ne seraient pas d’une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat aux torts du titulaire, de limiter en partie son droit à l’indemnisation du préjudice qu’il subit du fait de cette résiliation irrégulière. Par suite, en condamnant la RTM à réparer l’intégralité du préjudice subi par la société Alapont du fait de la résiliation irrégulière du contrat, sans tenir compte des fautes commises par cette société dans l’exécution du contrat dont elle avait constaté l’existence tout en considérant qu’elles n’étaient pas d’une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat aux torts du titulaire, la cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit.»

 

Évolution professionnelle des agents publics les moins qualifiés, en situation de handicap ou les plus exposés aux risques d’usure professionnelle

Ordonnance n° 2021-658 du 26 mai 2021

 

L’Ordonnance n° 2021-658 du 26 mai 2021, prise sur le fondement de l’article 59 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019,  tend à renforcer la formation des agents les moins qualifiés de catégorie C, des agents en situation de handicap ainsi que des agents les plus exposés aux risques d’usure professionnelle afin de favoriser leur évolution professionnelle.

Aux termes de cette ordonnance, ces agents pourront désormais bénéficier :

  • d’un accès prioritaire à des actions de formation et à l’accompagnement personnalisé;
  • lorsqu’il leur est accordé un congé de formation professionnelle d’une majoration de la durée de ce congé et de la rémunération qui lui est attachée ;
  • lorsqu’il sollicite un congé pour validation des acquis de l’expérience ou un congé pour bilan de compétences, de conditions d’accès et d’une durée de congé adapté ;
  • en cas de nécessité d’exercer un nouveau métier constatée d’un commun accord avec l’administration, la collectivité ou l’établissement qui l’emploie, d’un congé de transition professionnelle d’une durée maximale d’un an permettant de suivre les actions de formation longue nécessaires à l’exercice d’un nouveau métier auprès d’une des administrations.

 

Autorisations d’activité de soins et d’installation d’équipements matériels lourds – exception d’illégalité tirée du SROS

Conseil d’État, l 19 mai 2021 Decision n° 433523

 

Le 19 mai 2021, le Conseil d’état  dans un arrêt mentionné aux tables du recueil Lebon s’est prononcé  sur un recours contre une autorisation de création d’une activité de soins et d’installation d’équipements matériels lourds. Il s’agissait d’une autorisation d’installer des appareils de scanographie.

La société requérante contestait la décision d’autorisation du directeur général de l’ARS au motif notamment de l’illégalité du schéma d’organisation des soins (SROS) au regard duquel l’autorisation a été accordée.

Selon la  Cour administrative d’appel de MARSEILLE, les décisions individuelles du directeur général de l’ARS accordant ces autorisations ne sont pas prises pour l’application du SROS ni n’y trouvent leur base légale. Elles doivent seulement être compatibles avec les objectifs fixés par celui-ci. Il suit de là que les moyens tirés, par la voie de l’exception, de l’illégalité à l’encontre du SROS sont sans incidence sur la légalité de la décision autorisant l’installation d’un appareil scanographe.

La Haute juridiction retient une toute autre analyse et décide d’annuler l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel.

Elle considère que ces autorisations qui font application du SROS en sa partie relative aux objectifs de l’offre de soins, et notamment de ses objectifs quantifiés, peuvent être utilement contestées par des moyens tirés, par voie d’exception, de leur illégalité.

 

«  4. Il résulte de l’ensemble de ces dispositions, d’une part, que le législateur a entendu que les autorisations d’activités de soins et d’équipements matériels lourds soient compatibles avec les objectifs fixés par le schéma régional d’organisation des soins. Mais, d’autre part, il a également prévu que ces autorisations soient prises pour l’application des objectifs de l’offre de soins arrêtés par le schéma régional de l’offre de soins, notamment de ses objectifs quantifiés, et entendu permettre que la légalité de ce schéma en sa partie relative à l’offre de soins et notamment en ce qui concerne les objectifs quantifiés de l’offre de soins, puisse être contestée par voie d’exception, dans la limite prévue par l’article L. 1434-3-1 du code de la santé publique, dont les dispositions sont désormais reprises à l’article L. 1434-5 du même code. Par suite, ces autorisations qui font application du schéma régional de l’offre de soins en sa partie relative aux objectifs de l’offre de soins et notamment de ses objectifs quantifiés, peuvent être utilement contestés par des moyens tirés, par voie d’exception, de leur illégalité. En écartant comme inopérants les moyens tirés, par la voie de l’exception, de l’illégalité du schéma régional d’organisation des soins de Provence-Alpes-Côte d’Azur pour les années 2012 à 2016 au motif que les décisions relatives à l’autorisation d’installation des équipements matériels lourds n’étaient pas prises pour l’application de ce schéma, la cour administrative d’appel de Marseille a dès lors commis une erreur de droit. »

 

Autorisations d’activité de soins et d’installation d’équipements matériels lourds et transaction

Cour administrative d’appel de Douai, 2e chambre, 11 mai 2021
La Cour administrative d’appel de Douai , s’est penchée ce 11 mai 2021 sur la question de la licéité d’une transaction relative à l’exploitation d’autorisations délivrées par les agences régionales de santé en matière d’installation d’équipements matériels lourds.

En l’occurrence, un groupe hospitalier avait conclu avec une société civile de moyens (SCM) d’imagerie médicale nucléaire un protocole transactionnel visant à mettre fin à deux litiges les opposant relatifs :

•aux conditions dans lesquelles les médecins libéraux de la SCM continuaient d’exploiter, sans autorisation d’occupation du domaine public, des gamma-caméras dans les locaux du groupe hospitalier;
•au recours contentieux formé contre l’autorisation d’exploiter un tomographe à émission de positons.

Par ce protocole transactionnel, les médecins se sont engagés à quitter les locaux du groupe hospitalier dans lesquels ils continuaient à exploiter les gamma-caméras, les parties se sont engagées mutuellement à renoncer à toute action contentieuse concernant ces modalités de départ ou relative aux autorisations d’exploiter les gamma-caméras et à ne pas former de recours contre l’autorisation d’exploiter un tomographe à émission de positons sur le territoire de santé qui serait accordée à l’une des parties.

Ces derniers ont néanmoins contesté cet accord soutenant notamment qu’il a été obtenu sous la contrainte, qu’il comporte un objet illicite tenant à la renonciation à l’exercice d’un recours pour excès de pouvoir.

La Cour après avoir constaté l’absence de vice de consentement rappelle  qu’ « aucune disposition législative ou réglementaire applicable aux autorisations délivrées par les agences régionales de santé en matière d’installation d’équipements matériels lourds, ni aucun principe général du droit, ne fait obstacle à ce qu’un établissement public de santé conclut, avec un particulier ou un autre établissement privé de santé, une transaction» .

Le moyen tiré de l’illicéité de la clause de renonciation à recours a donc été écarté. La requête de la SCM a donc été rejetée.

Marine JACQUET, avocate associée, exerce au sein du Cabinet HOUDART ET ASSOCIÉS depuis 2011.

Maître Jacquet se consacre plus particulièrement aux problématiques relatives aux ressources humaines au sein du Pôle social du cabinet, Pôle spécialisé en droit du travail, droit de la sécurité sociale, droit public et droit de la fonction publique.

Présentant une double compétence en droit du travail et en droit de la fonction publique, elle conseille quotidiennement depuis 7 ans  les établissements de santé privés comme publics, les établissements de l’assurance maladie, les acteurs du monde social, médico social et les professionnels de santé libéraux notamment sur la gestion de leurs personnels,  leurs projets et leur stratégie en s’efforçant de proposer des solutions innovantes.

Elle accompagne ces acteurs sur l’ensemble des différends auquel ils peuvent être confrontés avec leur personnel (à titre d’exemple, gestion d’accusation de situation d’harcèlement moral ou de discrimination syndicale, gestion en période de grève, gestion de l’inaptitude médicale, des carrières et contentieux y afférents, procédures disciplinaires ou de licenciement, indemnités chômage …etc).