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Veille juridique
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VEILLE JURIDIQUE DU 26 OCtOBRE 2021

 

Article rédigé le 26 octobre 2021 par Alice Agard, sous la supervision de Me Nicolas Porte

Dépôt au Parlement du PLFSS, réforme très attendue du financement de la psychiatrie et récentes décisions des juges administratifs quant à l’obligation vaccinale des professionnels de santé seront présentées. Deux décrets marquants, y compris relatif aux modalités du concours national de praticien hospitalier seront également abordés.
À travers une analyse synthétique et globale des dernières décisions et textes marquants pour le secteur sanitaire social et médico-social, l’actualité juridique vous est décryptée dans ces colonnes.
Quelles sont les mesures phares du PLFSS 2022 ? Que vient changer la réforme du financement de la psychiatrie ? Quelle est la position de la Cour de cassation en matière d’accès aux données de santé des patients ?

 

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DEPÔT AU PARLEMENT DU PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SECURITE SOCIALE POUR 2022

 

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 (PLFSS 2022) est examiné par le Parlement, depuis le 11 octobre.

Une réduction portant le projet à 62 articles ainsi que quelques modifications ont été opérés depuis sa présentation le 24 septembre par le gouvernement à la Commission des comptes de la Sécurité sociale.
Celle-ci avait été l’occasion pour le gouvernement d’annoncer sa volonté d’investir dans la transformation du système de santé, notamment par l’octroi d’une enveloppe de 12,5 milliards d’euros afin de poursuivre la mise en œuvre du Ségur de la santé. En outre, 2 milliards d’euros devraient être dégagés en 2022 aux fins d’investir dans les hôpitaux, les EHPAD et les outils numériques. Le gouvernement avait en outre réitéré son ambition de décloisonner les acteurs de santé et d’encourager leur coopération.

Au sein de la quatrième partie relative aux recettes et à l’équilibre de la sécurité sociale pour 2022, le premier chapitre est ainsi nommé : « Poursuivre la transformation du système de santé ».
Y sont prévus, entre autres : le développement de la télésurveillance pour renforcer la prise en charge des maladies chroniques et les principes de son financement par l’assurance maladie ;

  • la mise en œuvre des réformes de financement des établissements de santé et médico-sociaux, tenant notamment compte de l’impact de la crise sanitaire ;
  • des ajustements concernant le financement de la réforme des urgences et la prolongation des expérimentations portant sur les transports sanitaires urgents préhospitaliers ;
  • tirant les conséquences d’une décision récente du Conseil Constitutionnel, l’instauration d’un contrôle automatique du juge des libertés et de la détention en cas de renouvellement des mesures d’isolement et de contention au-delà des durées totales de principe (celles-ci étant respectivement fixées à 48 h et 24 h). Il est en effet prévu que dans le cas exceptionnel où le médecin décide de renouveler les mesures au-delà de ces durées, le directeur de l’établissement en informe sans délai le juge, lui permettant ainsi de se saisir d’office pour y mettre fin.

Il est également proposé que la rémunération liée aux passages non suivis d’hospitalisation des praticiens libéraux intervenant dans les services d’urgences d’établissements privés repose sur des forfaits et suppléments venant se substituer à leurs honoraires facturés.

Le chapitre 2 annonce des efforts prévus dans le domaine du soutien à la perte d’autonomie. On compte parmi ceux-ci :

  • des revalorisations salariales dans le secteur médico-social
  • un soutien à l’offre des services à domicile de l’autonomie au bénéfice des personnes âgées et handicapées
  • la création d’une « mission EHPAD centre de ressource territorial », visant à accompagner le « virage domiciliaire ». De manière facultative, les EHPAD pourraient intervenir dans le cadre de deux nouvelles missions : une mission d’appui aux professionnels du territoire et une mission d’accompagnement renforcé pour les personnes âgées en perte d’autonomie nécessitant un accompagnement à domicile plus intensif, en alternative à l’EHPAD. Le projet entend ainsi concrétiser l’émergence d’EHPAD « Hors les murs », pour lesquels la coordination avec les services à domicile est essentielle.
  • un renforcement de la médicalisation des EHPAD est prévu, par une augmentation du nombre de personnels médicaux et soignants au sein de ces établissements dès 2022 (renforcement du temps de médecins coordinateurs, généralisation des astreintes infirmières de nuit, objectif de recrutements d’infirmières)
  • est aussi proposée la création d’un système d’information national pour la gestion de l’allocation personnalisée à l’autonomie (« Apa »).
  • dans l’objectif de pallier l’abandon très critiqué de la loi « Grand âge et autonomie », le gouvernement entend ainsi introduire plusieurs dispositions pour aider le secteur du grand âge et favoriser le maintien à domicile.

Il propose ainsi, en sus de la réforme de la tarification des soins infirmiers à domicile (SSIAD), de généraliser le modèle des services polyvalents d’aide et de soins à domicile (SPASAD), dont l’expérimentation prend fin en 2021. Afin d’en améliorer la lisibilité, l’ensemble de ces services d’aide et de soins à domicile se verraient réunis sous la dénomination de « services autonomie à domicile ».
On se souvient toutefois qu’à l’occasion des assises nationales des EHPAD, l’ensemble de ce secteur avait jugé les mesures annoncées insuffisantes.

Le chapitre 4 énonce les mesures visant au renforcement de l’accès aux soins et les actions de prévention en santé, notamment l’amélioration de l’accès à la filière visuelle, les modalités de prescription des masseurs-kinésithérapeutes et la généralisation d’expérimentations en santé.

Parmi les propositions faites par le gouvernement dans ce chapitre, on peut citer la prolongation de l’expérimentation des salles de consommation à moindre risque (SCMR) pour une durée de trois ans. Celles-ci, seront désormais appelées « Halte soins addiction », et font partie d’un projet plus large visant au renforcement de l’offre d’accompagnement des usagers de drogues et de son intégration et développement au sein de nouveaux dispositifs, tels que les CPTS.
Autre mesure phare annoncée : l’extension pour les femmes jusqu’à 25 ans de la prise en charge intégrale par l’assurance maladie des frais liés à la contraception a bien été inscrite dans le projet.

Le chapitre 5 vise à simplifier et moderniser le service public de la sécurité sociale, et prolonge notamment les dispositifs d’assurance maladie relatifs à la crise sanitaire.

Il est à noter toutefois que le remboursement des consultations de psychologues via un forfait n’a finalement pas été inscrit dans le projet de loi.

La vidéo de présentation du gouvernement est disponible : https://twitter.com/Economie_Gouv/status/1441327582637559817

 

REFORME DU FINANCEMENT DE LA PSYCHIATRIE : PUBLICATION D’UN DECRET TRES ATTENDU

DÉCRET N°2021-1255 DU 29 SEPTEMBRE 2021

 

Le décret relatif à la réforme du financement des activités de psychiatrie est paru le 30 septembre dernier au journal officiel.
Son entrée en vigueur est prévue pour le 1er janvier 2022.

Pour mémoire, Les dispositions de l’article 34 de la loi de la loi n°2019-1446 du 24 décembre 2019 ont réformé le régime de financement des établissements de soins psychiatriques, jusqu’à présent structuré de façon duale entre d’une part, les secteurs public et privé non lucratif financés sur la base d’une enveloppe budgétaire annuelle fermée  (DAF psy) et d’autre part, le secteur privé commercial dont les dépenses de soins remboursables (prestations hospitalières et spécialités pharmaceutiques sont encadrées par un objectif quantifié national (OQN).

Le nouveau régime de financement, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2022, instaure un objectif unique de dépenses d’assurance maladie afférent aux activités de psychiatrie (dit « ODAM psychiatrie »), sans distinction de statut public ou privé, cet objectif national étant lui-même composé de plusieurs dotations correspondant à des compartiments de financement dédiés à la réalisation d’objectifs spécifiques :

  • une dotation populationnelle, dont le montant tient compte des besoins de la population, des caractéristiques de l’offre de soins hospitalière et extrahospitalière et des projets de développement de nouvelles activités ;
  • des dotations complémentaires, dont le montant tient compte de l’activité hospitalière et extrahospitalière des établissements et de leurs missions spécifiques ;
  • une dotation complémentaire attribuée en fonctions des résultats évalués à l’aide d’indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins
  • le cas échéant, des crédits issus de la dotation « MIG » pour le financement des activités de recherche en psychiatrie

Deux compartiments représentent à eux-seuls près de 95% de la « DAF Psy », à savoir la dotation populationnelle (79,7% de l’objectif) et la dotation à l’activité (15% de l’objectif).

Le décret du 29/09/2021 est pris en application de ces dispositions législatives, inscrites principalement aux articles L 162-22-18, L 162-22-19 et L 174-15 du code de la sécurité sociale.

Il prévoit que les quatre dotations de financement fixées par l’article L 162-22-18 du code de la sécurité sociale se déclinent en 8 catégories, à savoir :

  1. une dotation populationnelle ;
  2. une dotation à la file active ;
  3. une dotation liée aux activités spécifiques ;
  4. une dotation relative à l’amélioration de la qualité des soins ;
  5. une relative à la structuration de la recherche ;
  6. une dotation relative aux nouvelles activités ;
  7. une dotation relative à la qualité du codage ;
  8. une dotation d’accompagnement à la transformation.

 

Chaque année, après arrêt du montant de l’objectif de dépenses (dit « ODAM psychiatrie »), les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale répartissent ce montant entre différentes dotations.

La dotation populationnelle, qui devrait représenter la plus grande part de l’enveloppe totale (estimée à 80%), est répartie entre régions en tenant compte de plusieurs critères :

  • Le nombre d’habitants par région avec une survalorisation de la population mineure ;
  • Le taux de densité de psychiatres libéraux et hospitaliers ;
  • Le pourcentage de la population régionale dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté ;
  • Le taux de personnes vivant seules ;
  • Le taux de places dans le secteur médico-social à destination des patients souffrant de pathologies psychiatriques.

 

En outre, cette dotation devra tenir compte de l’offre hospitalière déjà existante dans chaque région.
Il est à préciser que le directeur général de l’ARS « peut décider de ne pas allouer l’intégralité de la dotation populationnelle régionale sur la base des critères régionaux et de constituer une enveloppe régionale de contractualisation », enveloppe qui ne pourra toutefois excéder 2% de la dotation populationnelle régionale.

Le décret prévoit en outre que la dotation populationnelle est répartie par le directeur général l’ARS entre les établissements de santé de la région sur la base de critères définis au niveau régional après avis [de la section psychiatrie du comité consultatif d’allocation des ressources.

S’agissant de la deuxième dotation la plus importante (dotation relative à la file active), le décret précise que le montant alloué à chaque établissement « est déterminé en fonction de l’activité réalisée par l’établissement de santé au cours de l’année précédant l’exercice considéré, mesurée en fonction du nombre de patients pris en charge et de la durée de prise en charge cumulée sur l’année civile pour ces patients prenant en compte le nombre de journées ou de venues ou d’actes réalisés, à temps complet, à temps partiel et en ambulatoire ».

Le décret précise par ailleurs les délais impartis au directeur général de l’ARS pour arrêter les montants des différentes dotations allouées à chaque établissement.

L’article 2 du décret instaure des mesures transitoires visant à permettre une montée en charge progressive du nouveau modèle de financement. Il est ainsi prévu que pour l’année 2022, chaque établissement percevra un acompte mensuel au titre de ses activités de psychiatrie, dont le montant est établi à partir des recettes perçues mensuellement par l’établissement en 2021.

Le décret prévoit enfin que du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2025, pour chaque établissement « à périmètre d’autorisations d’activités et de capacités constantes, le montant cumulé annuel des dotations ne peut être inférieur au montant notifié l’année précédente, dans le respect du montant de l’objectif de dépenses » dédiées à la psychiatrie.

Attention, la présentation ci-dessus ne se veut pas exhaustive. Pour une appréhension complète et détaillée de la réforme du financement de la psychiatrie, il convient de se reporter au décret.

 

OBLIGATION VACCINALE DES PROFESSIONNELS DE SANTE : LES RECENTES DECISIONS DES JUGES ADMINISTRATIFS

 

Voir également sur le même sujet :

https://www.houdart.org/obligation-vaccinale-des-personnels-de-sante-qui-est-concerne-qui-est-responsable/

https://www.houdart.org/passe-sanitaire-et-obligation-vaccinale-attention-a-leffet-boomerang-partie-2/

 

A la suite de l’entrée en vigueur le 15 septembre dernier de l’obligation vaccinale pour les professionnels de santé, plusieurs requêtes en référés tendant à contester cette mesure ont déjà été présentées aux juges administratifs.

Dans la lignée du Conseil d’Etat qui a déjà rejeté plusieurs requêtes, les tribunaux administratifs n’ont pas remis en cause l’obligation édictée par le décret du 7 aout 2021.

Pour demander la suspension de l’exécution de ce décret, une infirmière libérale soutenait qu’il portait une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales, notamment : le principe de précaution, l’article 2 de la charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne, le droit au respect de la vie privée eu égard à la conservation des données de santé au sein des systèmes d’information de lutte contre l’épidémie. Elle soutenait de plus une méconnaissance par le décret du principe d’égalité et d’interdiction des discriminations, dès lors que l’obligation vaccinale s’applique aux seuls soignants qui encourent une suspension de leur rémunération et des restrictions dans l’exercice de leur liberté d’aller et venir en cas d’absence de passe sanitaire.
Dans son ordonnance du 10 septembre 2021 n°456233, le CE a rejeté la requête au motif que les allégations de l’infirmière étaient « très générales et non développées », sur fondement de l’article L 522-3 du code de justice administrative, qui permet ce mode de rejet notamment lorsque la demande « est irrecevable ou mal fondée ».

 

Les juridictions du fond ont quant à elles plus amplement  développé les motifs de leurs décisions de rejet.

Dans une ordonnance du 27 septembre 2021, le Tribunal administratif de Strasbourg , confirmant la décision de suspension sans traitement d’un aide-soignant, a ainsi carté l’atteinte aux droits et libertés en considérant que le requérant se borne à les invoquer « de manière générale, sans aucune précision à l’appui de son moyen ». Pour rejeter le motif pris de l’atteinte au droit à l’intégrité physique, le tribunal estime que l’ingérence constituée par la vaccination obligatoire est justifiée par des considérations de santé publique et proportionnée à l’objectif poursuivi, et par là même, conforme à l’article 8 de la CEDH. Il estime ainsi qu’il existe « un rapport suffisamment favorable entre, d’une part, la contrainte et le risque présentés par la vaccination pour chaque personne vaccinée, et d’autre part, le bénéfice qui en est attendu tant pour cet individu que pour la collectivité dans son entier ».
L’aide-soignant contestait aussi sa suspension au motif qu’elle n’avait pas fait été précédée d’un entretien préalable. Le juge des référés constate toutefois qu’il avait été informé à plusieurs reprises de la nécessité d’un justificatif de conformité à l’obligation vaccinale et qu’il avait en outre bien été convoqué à un entretien « qui pouvait lui permettre de régulariser sa situation ».

 

Dans une autre décision de référé du 27 septembre dernier, le Conseil d’Etat a rejeté un recours dirigé contre le 10e de l’article 1er du décret n°2021-1059 du 7 août 2021 fixant la liste des contre-indications médicales faisant obstacle à la vaccination contre la Covid19., Les requérantes reprochaient à ces dispositions de ne pas laisser la possibilité pour les personnes soumises à la vaccination obligatoire de faire valoir d’autres contre-indications médicales personnelles.

Afin d’obtenir la suspension de l’exécution de la disposition litigieuse et son abrogation, les requérantes arguaient, notamment :

  • d’une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale du patient de donner son consentement libre et éclairé aux soins médicaux ainsi qu’au droit à la vie issu de l’article 2 de la CEDH.
  • de la méconnaissance par ces dispositions de l’interdiction de prononcer des mesures à caractère général et absolu empêchant de se prévaloir d’autres contre-indications à la vaccination obligatoire que celles listées.
  • elles estimaient en outre que le vaccin Pfizer ne pouvait plus leur être administré dès lors que son autorisation conditionnelle de mise sur le marché est caduque et qu’aucune demande de renouvellement de celle-ci ne semble avoir été présentée dans les délais prévus par les règlements européens applicables.

Le Conseil d’Etat a rejeté l’ensemble des moyens invoqués en estimant que :

  • les requérantes ne peuvent se prévaloir utilement des conditions de renouvellement de l’autorisation de mise sur le marché conditionnelle délivrée pour l’un des vaccins ;
  • le principe même de l’obligation de vaccination établie par la loi pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 justifie d’écarter l’application du droit du patient de donner son consentement libre et éclairé aux soins médicaux et qu’il ne saurait ainsi être invoqué à l’encontre des dispositions prises par le pouvoir réglementaire pour mettre en œuvre cette loi ;
  • les requérantes, en contestant la limitation par le décret des possibilités de contre-indication individuelles, font valoir une « atteinte potentielle (au droit à la vie), compte tenu des risques révélés par les données de pharmacovigilance ». De tels éléments n’étant « pas de nature à caractériser un danger de cette nature », le juge des référés exclut donc toute atteinte grave et manifestement illégale au droit à la vie.

 

Deux éléments issus d’ordonnances de référés rendues récemment par des tribunaux administratifs méritent d’être signalés :

  • Selon une ordonnance du TA de Cergy-Pontoise, les dispositions de la loi sur l’obligation vaccinale ne s’appliquent pas à un agent placé en congé maladie et n’étant pas en mesure d’exercer son activité. L’agent doit ainsi conserver ses droits acquis à l’avancement de carrière tout comme la rémunération due dans le cadre de son arrêt de travail.
  • Concernant la demande d’un médecin non vacciné d’exercer en télémédecine pendant la durée de l’obligation vaccinale, le juge a invité celui-ci à faire sa demande auprès de l’ARS, ne pouvant statuer sur une demande « qui n’a fait l’objet d’aucune instruction de l’administration ni d’aucun refus ». La question demeure donc pour le moment en suspens.

 

DROIT D’ACCES AUX DONNEES DE SANTE ET EXPERTISE MEDICALE

COUR DE CASSATION N°19-25.045, 30 SEPTEMBRE 2021

 

A l’occasion d’un récent arrêt du 30 septembre 2021 concernant la victime d’un accident routier, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rappelé la nécessité de respecter le droit d’accès aux données de santé, tant pour le médecin désigné expert que pour l’assureur du véhicule responsable.

En l’espèce, la victime d’un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré avait, avec des membres de sa famille, assigné l’assureur devant le juge des référés afin que soit ordonnée une mesure d’expertise médicale destinée à évaluer son préjudice corporel et d’obtenir la communication sous astreinte des notes techniques de l’expert amiable désigné par l’assureur.
Cette demande de communication des notes techniques fut rejetée par la Cour d’Appel, celle-ci estimant :

  • Que la demande de communication des notes techniques établies par l’expert médecin n’était pas suffisamment précise, en ne se limitant pas aux données strictement médicales ;
  • Que le requérant ne démontrait pas son intérêt légitime à obtenir les documents réclamés ;
  • Et que, selon l’assureur, les documents demandés pouvaient contenir, outre les éléments médicaux, des informations strictement confidentielles destinées à sa seule intention.

La victime a alors formé un pourvoi en cassation, au moyen « que toute personne a accès à l’ensemble des informations concernant sa santé » et en invoquant notamment son droit à la vie privé garanti par l’article 8 de la CEDH et l’article L 1111-7 du CSP donnant le principe de l’accès par toute personne aux informations concernant sa santé.

La Haute juridiction a accueilli sa demande, en rappelant les dispositions de cet article qui permettent à toute personne d’avoir accès à « l’ensemble des informations concernant sa santé détenues, à quelque titre que ce soit, par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisés ou ont fait l’objet d’échanges écrits entre professionnels de santé (…) ».

Elle en tire une double obligation :

  • pour le médecin conseil désigné par l’assureur de communiquer à la victime les informations relatives à sa santé recueillies au cours de l’expertise
  • pour l’assureur de s’assurer que le médecin-conseil  désigné par lui a bien communiqué à la victime des informations de santé la concernant.

La Cour en conclut en outre que la victime disposant d’un droit d’accès aux données de santé la concernant, elle justifiait d’un intérêt légitime à les obtenir de l’assureur, qui aurait dû s’assurer qu’elles lui avaient bien été communiquées par le médecin expert.

 

FONCTION PUBLIQUE HOSPITALIÈRE : NOUVELLE PRISE EN COMPTE DE L’APPRENTISSAGE DANS LA FORMATION PROFESSIONNELLE TOUT AU LONG DE LA VIE

DÉCRET N°2021-1209 DU 20 SEPTEMBRE 2021

 

Le décret du 21 aout 2008 énonçait déjà un certain nombre d’actions comprises dans la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de la fonction publique hospitalière (notamment visant à maintenir et parfaire leurs connaissances, à leur proposer des actions de préparation à certains examens de promotion internes, des actions de conversion…).

Le présent décret entend désormais valoriser l’apprentissage, en l’intégrant dans le champ de ces actions de formation professionnelle. Au même titre que plusieurs de ces actions de formation, l’apprentissage pourra donc être financé par les établissements publics de santé.

A noter que pour l’ensemble de ces actions de formations, le financement couvre le coût pédagogique, la rémunération des stagiaires en formation, leurs déplacements et leur hébergement.

 

MODIFICATION DES MODALITES D’ACCES AU CONCOURS NATIONAL DU PRATICIEN HOSPITALIER

DÉCRET N°2021-1230 DU 25 SEPTEMBRE 2021

 

Le présent décret s’inscrit dans la lignée du Ségur de la santé et répond à l’une de ses ambitions majeures : la revalorisation de la fonction publique hospitalière.

Dans cette perspective, les modalités d’accès au concours national de praticien hospitalier ont été modifiées et sont entrées en vigueur le 1e octobre.

Le modèle des épreuves est désormais unifié pour tous les candidats et il n’existe plus aucune condition d’ancienneté pour se présenter au concours.
Le décret vient par ailleurs expliciter et préciser dans quelle mesure il peut être refusé à une personne le statut de praticien hospitalier en raison de son handicap. L’impossibilité de nommer un agent praticien hospitalier peut ainsi être justifiée si celui-ci ne remplit pas les conditions de santé particulières exigées pour certaines fonctions, en raison des « risques particuliers que ces fonctions comportent pour les agents ou pour les tiers et des sujétions que celles-ci impliquent ». L’examen de ces conditions de santé particulières devra prendre en compte les possibilités de compensation du handicap de la personne.

Deux arrêtés du même jour viennent compléter le décret l’un, relatif à l’organisation des épreuves du concours, l’autre relatif à l’ouverture du concours pour la session 2021.

 

Nicolas Porte, avocat associé, exerce son métier au sein du Pôle organisation du Cabinet Houdart & Associés.

Après cinq années consacrées à exercer les fonctions de responsable des affaires juridiques d’une Agence Régionale de Santé, Nicolas PORTE a rejoint récemment le Cabinet Houdart et Associés pour mettre son expérience au service des établissements publics de santé et plus généralement, des acteurs publics et associatifs du monde de la santé.

Auparavant, il a exercé pendant plus de dix années diverses fonctions au sein du département juridique d’un organisme d’assurance maladie.

Ces expériences lui ont permis d’acquérir une solide pratique des affaires contentieuses, aussi bien devant les juridictions civiles qu’administratives, et d’acquérir des compétences variées dans divers domaines du droit (droit de la sécurité sociale, droit du travail, baux, procédures collectives, tarification AT/MP, marchés publics). Ses cinq années passées en ARS lui ont notamment permis d’exercer une activité de conseil auprès du directeur général et des responsables opérationnels de l’agence et développer une expertise spécifique en matière de droit des autorisations sanitaires et médico-sociales (établissements de santé, établissements médico-sociaux, pharmacies d’officines) et de contentieux de la tarification à l’activité.